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Noël Chadaré au sujet de l’Installation du Cne : « On présume qu’ils sont bons pour le job. Maintenant, on va les juger à l’œuvre »

Publié le jeudi 30 janvier 2020  |  Fraternité
Noël
© aCotonou.com par Didier Assogba
Noël Chadaré, Secrétaire général de la Confédération des organisations syndicales indépendantes (Cosi-Bénin)
Bourse du travail de Cotonou le 18 Novembre 2016. Meeting des femmes vendeuses du marché Missèbo. Elle dénoncent les décisions arbitraire du préfet Modeste Toboula.
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Patrice SOKEGBE


Nöel Chadaré, Sécrétaire de la Confédération des Organisations syndicales indépendantes du Bénin (Cosi-Bénin), s’est prononcé lundi dernier sur la chaine de télévision Canal3, sur l’installation du Conseil National de l’Education. Selon lui, l’équipe mise en place est a priori qualifiée pour relever les défis qui s’imposent dans le système éducatif béninois. Aussi a-t-il donné son avis les élections législatives prochaines.

Le Conseil National de l’Education s’est installé mais vous étiez le grand absent à cette installation-là pourquoi ?
Absent parce que j’étais hors du territoire national en ce moment-là. J’étais à l’étranger mais la confédération qui est la mienne était présente. Il y avait 05 membres de mon bureau qui étaient bien présents à cette installation du conseil national de l’éducation donc la Cosi était là comme les autres centrales syndicales.

On a entendu dire que c’est parce que les syndicats ne font pas partie du Cne que vous l’avez boycotté
Non, le boycotte n’est pas la meilleure des choses. Et je dois vous dire que nous n’avons pas cette habitude de boycotte. Ce n’est pas à tout moment qu’il faut boycotter. On veut installer un organe, le conseil national de l’éducation, on vous invite, il faut y être et on y était. Seulement que moi je n’y étais pas parce que j’étais hors du territoire national.

Une fois le cne installé, c’est à peine qu’on ne célébrait pas un super organe censé régenter l’éducation béninoise. Selon vous, quelle lecture doit-on avoir du Cne ?
Dès sa conception, j’ai pris connaissance de ce qu’il devrait finalement être. Je crois, il y a une loi portant orientation sur l’éducation nationale, une loi de 2003. La loi 11 de 2003, qui avait déjà prévu dans les textes le conseil national de l’éducation. Donc, ce conseil existait. Maintenant, le gouvernement de la rupture a voulu lui donner une autre allure en faisant voter un décret en 2018 qui lui donne les attributions que vous lui connaissez. Et quand vous voyez ces attributions, quand vous voyez les objectifs visés. Moi, je dis que c’est un super ministère d’Etat, parce qu’ils ont la conception, ils ont pratiquement toutes les prérogatives et mêmes aussi les questions en matières d’orientation budgétaire. Alors que dans les ministères on a un Daf. C’est un choix. On va attendre de voir dans l’application si cela est vraiment efficace. Mais, l’intention n’est pas mauvaise. Il faut le dire. L’intention n’est pas mauvaise de lui conférer, tout ce qu’on lui a conféré. Tous les droits, toutes les prérogatives. L’intention n’est pas mauvaise parce qu’on a dit qu’on veut dépolitiser l’éducation nationale. C’est une bonne intention. C’est des gens techniques qui ont été mis là.

Avec l’un des ministres dans ce conseil de l’éducation, les syndicats qui désormais n’en font plus partie, les parents d’élèves non plus. Quelle forme de collaboration pourrait y avoir entre les ministères sectoriels et ce Cne là ?
Le Cne est devenu une sorte de ministère d’Etat, et les ministères sectoriels sont comme des secrétariats d’Etat. Donc, ils doivent exécuter ce qui a été décidé. C’est ce qu’on peut tirer comme enseignement quand on jette un coup d’œil sur ce qu’on a conféré comme droit, comme objectifs, comme attributions au Cne.

Qu’est-ce qui justifie l’absence des syndicats ?
On a allégué que c’est un organe technique. Donc, vous avez vu on n’a pas mis les parents d’élèves, on n’a pas mis les syndicats dedans. Les intentions c’est de tout dépolitiser. On verra bien si ça peut permettre de véritablement de dépolitiser parce qu’on a vu que dans l’enseignement, les gens de la politique s’en sont véritablement mêlés. Où on nomme des gens à des postes de direction, on recrute des gens qui ne devraient pas être là et qui sont obligés de faire ce qu’ils n’ont pas vocation de faire. Donc, si ça peut changer un peu les choses, si ça peut apporter de la qualité, si ça peut apporter de la plus-value, je crois que l’intention est bonne. On attend de voir la mise en œuvre de ce qui a été décidé. Si effectivement on va pouvoir atteindre les objectifs. On en jugera à l’œuvre.

Dites-nous de l’ancien Cne à l’actuel Cne qu’est-ce qui selon vous a changé ?
Il y a beaucoup d’attributions. On lui a donné tous les pouvoirs. L’ancien Cne n’avait pas bien entendu ces pouvoirs. Mais ici, c’est des pouvoirs énormes qu’on lui a conférés. Pour lui donner la main libre de faire le travail, il peut faire presque tout. Donc, ces différences, c’est un conseil national de l’éducation nouvelle forme, nouvelle formule, nouvelle version parce que peut-être il y a des objectifs visés et on veut changer un peu les choses. Bon, on espère les voir changer et on va juger cela dans les mois et les années à venir.

Quand on fait un peu le point au niveau de l’éducation béninoise, il y a le manque d’infrastructures scolaires, il y a le manque d’enseignants, ce qui a d’ailleurs conduit à avoir recours aux aspirants. Est-ce que vous pensez que le Cne peut être la solution aux problèmes qui minent l’éducation béninoise ?
S’ils ne trouvent pas la solution, c’est qu’ils auraient échoué parce qu’on a dit, il faut dépolitiser. Il faut mettre celui qu’il faut à la place qu’il faut. C’est un organe purement technique. Des gens qui ont l’expertise ou qui sont présumés avoir l’expertise et donc, on attend d’eux qu’ils mettent en œuvre cette expertise. Il y a de la qualité dans le secteur de l’éducation. Dans les trois sous-secteurs. J’espère qu’ils ne vont pas faire comme ce qui s’est passé avec les aspirants. On a fait les choses dans la précipitation et ça a donné ce que ça a donné. Aujourd’hui on voit des professeurs d’Histoire-Géo, des professeurs qui ont d’autres vocations, des professeurs d’anglais qui vont enseigner le français. Des professeurs des Svt qui vont enseigner les mathématiques. C’est extrêmement grave. Alors que nous avons dans nos pays des professeurs qui sont sortis des écoles normales des instituteurs, qui sont sortis des écoles normales. Donc, quand ils sont sortis des écoles normales c’est avec des diplômes nationaux. Ce sont donc des gens qui sont présumés être compétents pour faire le travail. Ils ne devraient alors pas être à la maison. Nous n’avons rien contre ceux qui font Histoire-Géo, qui font Svt, c’est des enseignants, ils ont été formés pour cela. Mais qu’ils enseignent ce pour quoi ils ont été formés. Et donc, on aurait pu éviter un certain nombre de choses. Et vraiment mettre les personnes qu’il faut à la place qu’il faut pour vraiment donner de la qualité au système. Pour éviter ce que nous voyons. Ne plus faire les choses dans la précipitation. Prendre le temps, parce que je connais des gens, s’ils sont là c’est parce qu’ils ont de la qualité. J’espère qu’on leur donnera les moyens pour qu’ils atteignent les objectifs à eux fixés. Nous on attend de voir. S’ils font des choses qui ne sont pas bien, on va les critiquer, les dénoncer ; parce qu’on ne veut plus des nominations où un professeur ou un instituteur moins gradé dirigent ceux qui sont plus gradés qu’eux. Il faut que ça cesse, parce qu’on doit mériter la nomination.

Est-ce que vous pensez que les profils des membres du Cne sont prêts pour le travail ?
On présume qu’ils sont bons pour le job. Maintenant, on va les juger à l’œuvre. Il y a eu des appels d’offre.

Quelles est la priorité du Cne à l’heure actuelle ?
Tout est prioritaire. Il y a tellement de problèmes dans le système que si vous allez les voir, ils vous diront que ce que je dis est juste. Tout est prioritaire. Il faut faire de telle sorte que nous ayons la qualité. Dans le système, tout est à repenser. Regardez ce système qui ne fait que créer des chômeurs, on doit pouvoir arrimer le système éducatif au marché de l’emploi. C’est important, s’il y a quelque chose de prioritaire, c’est une priorité. Avoir de la qualité, des enseignants qui ont de la qualité et qui font vraiment le job. Et pour ça, il faut voir dans quelle mesure, inciter ces enseignants au travail. Le Cne a vraiment beaucoup à faire. Recruter des gens de qualités. On fait des cours à des heures qui ne sont plus appropriées. On n’a pas les professeurs qu’il faut, on a la démotivation dans le système et le système est à relancer, parce que les ressources humaines ne vont pas manquer à notre pays.

Quel peut être votre apport au Cne ?
Je pense qu’ils ne vont pas faire quelque chose sans nous. Je pense qu’ils vont nous appeler. Oui parce qu’ils ont quand même besoin de nous écouter. C’est vrai qu’ils sont techniques, c’est vrai, c’est des gens qui ont une certaine expertise mais ils doivent pouvoir écouter ceux-là qui sont là. On ne peut pas affecter des gens comme on le veut. Il y a des affectations qui sont affectés par sanction, des discriminations antisyndicales.

Les gens disent que quand on envoie les étudiants béninois qui bénéficient de bourse de formation, quand ils y vont, ils n’en reviennent plus et l’Etat pense qu’il faut introduire une loi pour leur faire signer désormais un contrat d’engagement citoyen. Est-ce que vous pensez que c’est une solution pour éviter la fuite des cerveaux ?
On peut dire oui. Il y a quand même que si l’Etat envoie des béninois à l’étranger pour faire des études, c’est que il y a des besoins qui ont été exprimés. Et si effectivement les besoins sont exprimés et qu’on dit qu’on a besoin de tel et de tel et qu’on les envoie étudier, ils devraient pouvoir revenir pour servir leur pays parce que leur pays a payé leur formation. Mais est-ce que c’est la solution ? Si on le fait comme ça, ils prennent des engagements, ils vont, il faut assurer les arrières de ceux qui ont eu des bourses et qui ont pris d’engagement, parce que s’ils reviennent et qu’ils ne trouvent pas de boulot, il faut voir les besoins que nous avons et donner les bourses et leur garantir leur job quand ils vont revenir. C’est vrai, c’est bon, si on doit donner de l’argent pour former les gens et qu’ils ne reviennent pas pour servir le pays, il y a problème.

Vous parlez de la convocation par Patrice Talon du corps électoral en perspective des élections municipales et communales. Comment voyez-vous cette convocation et comment éviter ce qui s’est passé pour les élections législatives ?
C’est bien de convoquer le corps électoral. Maintenant, il faut que le pouvoir et les deux partis du chef de l’Etat fassent tout pour nous éviter ce syndrome des élections législatives ; parce que c’est un syndrome. Qu’ils fassent tout pour nous éviter ça. Que ça ne se reproduise plus. Que ce soit fait de façon sincère. Qu’il y ait de la sincérité ; parce que c’est souvent les politiciens qui nous conduisent dans des situations que vous connaissez. Il faut que les élections communales soient une occasion de fête. On a toujours fait des élections comme si c’était la fête dans nos pays. La dernière fois c’était l’exception. Je souhaite que le chef de l’Etat s’implique et que les hommes politiques des différents partis aussi s’impliquent pour qu’il y ait des élections véritablement inclusives. Et que tout le monde fasse de telle sorte que ces élections soient inclusives. Chacun joue sa partition. Qu’on mette l’intérêt du pays au-dessus des intérêts personnels des uns et des autres.

On va faire un tour au Togo, la présidentielle pointe à l’horizon, c’est le mois prochain. Est-ce que vous êtes inquiet pour le Togo ?
On est inquiet pour tous les pays. Pour l’Afrique de l’Ouest. Ce n’est pas le Togo seulement, vous avez la Guinée qui se prépare là-bas. Vous avez la Côte d’Ivoire qui a des élections. C’est une année électorale en Afrique de l’Ouest. Et quand on voit ce qui se passe, ça n’augure rien de bon. On souhaite sincèrement pour les Togolais qui sont nos frères d’à côté, on va croiser les doigts et espérer que les choses vont se passer sans heurts, pour éviter de voir nos frères venir en exil au Bénin. Ça dépend des différentes parties. Et puis l’opposition souhaite venir au pouvoir, mais elle est divisée. Et c’est un peu partout. Les pouvoirs en places font tout pour diviser l’opposition. C’est même aussi chez nous. Et c’est des oppositions vraiment factices. On souhaite au Togo que les élections soient des élections apaisées. Que les choses se passent bien pour qu’il n’y ait pas des regrets.

Votre mot de la fin
Souhaiter à tous les béninois une heureuse année. Souhaiter à nos politiciens de regarder tous du même côté. De mettre au-dessus de leurs partis, les intérêts de la patrie. La patrie au-dessus des intérêts partisans qu’ils ont pour que nous évitions ce que nous avons vu. Nous sommes aussi dans une année électorale. La date est déjà retenue et donc vraiment, il faut que ce soit une fête.
Source : Canal3 Bénin
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