Dans l’affaire qui donne aujourd’hui du tournis au gouvernement de Yayi Boni, tout est en train d’être mis en place pour parachever l’œuvre d’expropriation de la Sodéco de l’homme d’affaires Patrice Talon. Pour ce faire, le Chef de l’Etat joue des pieds et des mains pour arracher le soutien des députés de sa majorité présidentielle afin d’opérer un hold-up économique.
Au cours d’une séance de travail qu’il a eue le lundi 25 novembre 2013 de 19h à 23h au Palais de la République, Yayi Boni a supplié les députés Fcbe de sa majorité présidentielle pour pouvoir bénéficier de leur soutien dans sa tentative de braquage économique qu’il opère actuellement à la Sodéco S.a. en décidant de façon unilatérale de ramener cette société d’économie mixte dans le giron de l’Etat en violation parfaite des règles qui gouvernent en la matière.
Pour convaincre les députés qui soutiennent ses actions au Parlement, le Chef de l’Etat n’est pas allé par quatre chemins pour servir sa vérité à lui. Celle de faire croire à qui veut l’entendre que c’est son ex-ministre Pascal Irénée Koupaki qui a conduit et finalisé tout le dossier de Sodéco puis de Pvi Nouvelle Génération à des moments où lui, Yayi Boni, n’était pas présent aux Conseils des ministres ayant étudié lesdits dossiers. Par conséquent, il déclare n’être pas lié par ces deux dossiers qui agitent actuellement le landerneau politico-économique du Bénin et pourrissent la vie à ses compatriotes.
Il est allé jusqu’à affirmer que les décisions prises en Conseil des ministres en son absence ne l’engagent pas. Quelle lâcheté ! Quelle confiance peut-on donc encore accorder à un Chef d’Etat qui ne reconnait pas les décisions prises par ses collaborateurs au sein d’une grande instance comme le Conseil des ministres, alors que c’est lui-même qui les a nommés en toute conscience conformément à la Constitution.
Devant cette situation, on comprend alors pourquoi la dernière fois, le ministre d’Etat François Abiola a tenu un Conseil des ministres ayant pour seul point à l’ordre du jour l’autorisation de la visite au Bénin du président sénégalais Macky Sall. Qui est fou ? Surtout que ce ministre d’Etat a commencé par se faire des illusions d’un présidentiable pour les élections de mars 2016.
Le grand malaise !
Devant ces propos grotesques du Chef de l’Etat dénués de tout bon sens, le député Cyriaque Domingo n’a pu retenir son indignation en l’interpellant en des termes pareils : « Monsieur le Président, pour le dossier Pvi Nouvelle Génération, vous nous avez dit que vous n’êtes pas au courant. Pour l’affaire Sodéco, vous dites encore aujourd’hui que vous n’êtes pas au courant que c’est votre ministre Koupaki qui l’a conduit. Si c’est vrai tout ce que vous dites alors-là il y un vrai un malaise au sommet de l’Etat ».
C’est alors que le président de l’Assemblée nationale prit la parole pour conseiller au Chef de l’Etat d’aller doucement dans cette affaire de Sodéco qui, dit-il, mérite une sérénité responsable dans son approche.
En tant qu’avocat ayant plusieurs fois défendu des dossiers économiques dans le genre de ce qui oppose aujourd’hui le gouvernement Yayi à la Scp de l’homme d’affaires Patrice Talon, la députée et présidente de la Commission des lois, Me Hélène Aholou Kêke, n’a pu s’empêcher de donner une leçon de droit au Chef de l’Etat. Elle lui a conseillé de saisir la justice en l’occurrence le juge des référés pour connaître de l’affaire.
Mais elle, aussi, n’était pas dans la droite ligne du règlement du contentieux né des agissements du gouvernement de Yayi dans ce dossier. Pour rappel, la Convention de création de la Sodéco S.a stipule bien en ses dispositions qu’en cas de conflit, c’est la Cour commune de justice et d’arbitrage (Ccja) sise à Abidjan, instance judiciaire communautaire de l’Ohada qui est compétente pour trancher le contentieux. A cet effet, la Société commune de participation (Scp) de Patrice Talon à travers ses avocats dont le sémillant Me Joseph Djogbénou, a déjà saisi la Ccja avec l’accord du gouvernement de Yayi Boni.
Puis, au lieu d’attendre le verdict d’Abidjan, Yayi Boni se rue dans les pantalons et jupes des députés de sa majorité présidentielle pour leur demander de lui accorder leur soutien pour pouvoir piétiner les lois de la République. Alors que la députée Aholou Kêkê lui a fait clairement savoir que dans cette affaire de Sodéco, le comportement du gouvernement est illégal.
Elle ajoute que si l’on y prend garde, demain l’Etat béninois serait amené à payer de gros dommages et intérêts à l’homme d’affaires Patrice Talon qui devra être rétabli dans ses droits. Car, le fait d’avoir unilatéralement décidé de suspendre une Convention de création d’une société dans laquelle il est partie, le gouvernement de Yayi Boni se fourvoie et s’embourbe totalement au détriment des caisses de l’Etat qui prendront un coup demain lorsque Patrice Talon fera valoir ses légitimes droits.
Ajavon voleur
Pour finir de convaincre ses interlocuteurs d’un soir, Yayi qui ne se préoccupe pas des énormes manques à gagner que son comportement engendrerait à l’économie nationale est allé jusqu’à comparer Patrice Talon à un autre opérateur économique dont les affaires prospèrent dans la localité de Djeffa qu’il a traité devant ces députés de voleur des taxes et impôts de l’Etat. Il a même confié avoir relevé ou vouloir relever de ses fonctions l’Ambassadeur du Bénin au pays d’accueil des affaires de l’opérateur économique parce que, argumente-t-il, c’est ce diplomate qu’il lui fait les papiers permettant la distraction des fonds de l’Etat béninois.
Alors que le bébé qui vient de sortir ce matin des entrailles de sa mère à l’Homel de Cotonou sait que c’est cet homme d’affaires qui, en l’espace de moins de quatre ans, a payé dans les caisses de l’Etat plus de 40 milliards de taxes et impôts qui servent à assurer les premiers soins dans les hôpitaux du Bénin.
Ce sont également les sous payés dans les caisses de l’Etat par cet homme d’affaires et bien d’autres comme Patrice Talon qui permettent à Yayi et sa bande d’avoir leurs salaires, se tailler de gros frais de mission dans leurs promenades dans le Bénin profond pour une soi-disant tournée de sensibilisation sur l’affaire Sodéco et réquisitionner les usines d’égrenage de coton.
Alors que le Collectif national des égreneurs de coton (Cnac), dirigé par Eustache Kotigan se dit prêt à collaborer, la main dans la main, avec le gouvernement pour la réussite de la campagne cotonnière 2013-2014. Ce collectif a plusieurs fois montré sa bonne foi pour participer à ladite campagne, mais dans sa logique de tête baissée, le gouvernement se refuse à saisir la main tendue des égreneurs et préfère le dilatoire au principal.
Jamais un sans deux
Si face à tous ces errements, les députés que courtisent Yayi Boni se hasardaient à lui accorder leur soutien tel qu’il le demande, on est autorisé à dire que s’en serait fini pour la démocratie béninoise aujourd’hui balbutiant du fait des agissements très peu responsables de nos dirigeants. Car, si les députés venaient à donner des textes de lois taillés sur mesure à Yayi Boni dans l’affaire Sodéco, il ne lui sera plus difficile de les solliciter à nouveau pour commettre un hold-up politique en faisant tripatouiller la Constitution pour s’éterniser au pouvoir.
Sans risque de se tromper, ce qui ce passe aujourd’hui dans le gouvernement de Yayi Boni a tout l’air d’une peur bleue de l’après pouvoir. Yayi Boni se demande à quelle sauce il sera mangé après le 6 avril 2016 ou devant quelle justice, il répondra de ses actes vu tous les tares et avatars dans lesquels il engage l’Etat béninois dont il devrait être en principe le garant du respect des lois que lui-même viole allègrement presque tous les jours. Pour ce faire, il n’est pas superflu de rappeler aux députés que leurs responsabilités sont engagées s’ils s’amusent à donner leur caution à cette nouvelle aventure sans lendemain ou de lendemains amers pour les caisses de l’Etat.
Car, à l’allure où vont les choses, Yayi Boni n’entend plus reculer devant quoi que ce soit. Même rentrer dans le mur, il n’en a cure. Pourvu qu’il parvienne à son résultat : créer une situation de trouble, s’en prévaloir et rester encore après le 6 avril 2016 au pouvoir. Ça, seuls les Béninois apprécieront en son temps.