L’ancien président de la République du Cameroun est mort le 30 novembre 1989 au Sénégal.
Dakar, 30 novembre 1989. Ahmadou Ahidjo, l’ancien chef de l’Etat du Cameroun, s’est levé de bonne heure. Il fait sa toilette, puis se repose longuement en somnolant. 15h. Il prend son petit déjeuner. Contrairement aux jours précédents, il avait un grand appétit. Après son repas, il se couche. Le témoignage est de son épouse, Germaine.
Il a été recueilli par Philippe Gaillard, journaliste et écrivain. Ce jour-là, et comme à l’accoutumée, elle était à côté de son mari. Elle se penche sur Ahmadou Ahidjo et lui dit qu’Adam, son médecin personnel, viendra lui administrer des soins. Après quoi, « on te mettra sur le fauteuil pour te raser ».
Ahidjo ne parle pas, mais acquiesse. Plus tard, Germaine lui demande : « Peut-on te lever ?» Elle attend la réponse en regardant Ahidjo dans les yeux. Il n’y aura aucune réponse. Ahidjo s’est éteint définitivement. A ce moment, il avait 67 ans.
Abdou Diouf, alors président de la République du Sénégal et ami de la famille, est saisi. Il tente d’avoir les consignes de Yaoundé. Elles ne viendront pas. Las d’attendre, il organise les obsèques d’Ahidjo. Aucun diplomate camerounais présent à Dakar ne prend part à la cérémonie, diront plus tard les témoins.
Pour se rendre au cimetière de Yoff où Ahidjo est encore couché, le cortège funèbre passe, selon Philippe Gaillard, devant l’ambassade du Cameroun au Sénégal. Le drapeau, vert, rouge, jaune flotte au vent. Jérôme Mendouga, l’ambassadeur (aujourd’hui incarcéré à Kondengui pour une affaire de détournement de fonds publics), et ses collègues travaillent comme si de rien n’était.
En fait, la santé d’Ahidjo avait commencé à se dégrader depuis fin 1984. Il ne lisait plus les journaux, sa vue ayant baissé. Il écoutait plus la radio. Rfi, notamment. C’est ainsi qu’un jour du mois de janvier 1989, il apprend qu’Abdou Diouf et le général Babangida du Nigeria démarchent pour le réconcilier avec Paul Biya. Il se fâche et tombe dans sa salle de bain.
Philippe Gaillard dans « Ahmadou Ahidjo, patriote et despote, bâtisseur de l’Etat camerounais », écrit : « Il ne perd pas connaissance, mais il ne peut pas se relever.» Il est évacué en France où se trouve sa famille, depuis quelque temps. Ils regagnent tous Dakar, le 9 novembre. Le 24, il sort pour se promener, mais rentre à la hâte, rouge de colère. Il arrête les deux mains de sa femme et crie : « Comment ont-ils pu en arriver là ? » Son chauffeur explique plus tard qu’au cours de la promenade, Ahidjo a écouté Rfi et que « le journaliste a dit que la situation économique du Cameroun était catastrophique ».
« Le patron s’est énervé et j’ai écourté le trajet », dit-il. Il ne sortira pas de sa résidence et mourra six jours plus tard.