Hier, dimanche 29 mars 2020, le chef de l’Etat s’est enfin prononcé sur la pandémie du coronavirus et ses conséquences sur le Bénin. Alors que les Béninois s’attendaient à un discours solennel, porteur de mesures d’accompagnement, Patrice Talon s’est juste contenté de rappeler les dispositions, prises par son gouvernement, pour lutter contre la propagation de ce mal au Bénin. Comme excuse, il soutient que le Bénin n’est pas si fort pour éprouver son économie dans cette lutte, et qu’il faut dores et déjà penser à l’après coronavirus.
Plusieurs fois réclamé par ses compatriotes, Patrice Talon est enfin sorti de son mutisme. Pour une première fois donc, le Chef de l’État à travers cet entretien a fait savoir son opinion personnelle sur cette menace, qui a déjà fait plus de 20.000 morts dans le monde. Annoncé à grande pompe, cette intervention n’a pas finalement convaincu plusieurs Béninois. Et pour cause, elle ne leur a rien apporté de nouveau. Certes, ‘’l’heure est grave ”, comme l’a-t-il signifié. Mais la plupart des Béninois le savaient et tiraient même depuis la sonnette d’alarme, avant que son gouvernement ne commence à s’investir timidement dans cette lutte. L’observance des règles d’hygiène pour éviter que le coronavirus ne se propage, la plupart le savent et c’est d’ailleurs rappelé tous les jours par les médias et des Ongs, à la suite du gouvernement via le Ministère de la santé. Mais ce n’est pas pour autant que Patrice Talon n’a pas surpris malheureusement certains citoyens, sur la vision de son gouvernement d’accompagner les populations à surmonter cette crise. Alors que les Béninois s’attendaient à des mesures sociales pour mieux traverser cette période, le Chef de l’Etat a, contre toute attente, pris le contre-pied parfait de cet espoir. A bien le suivre, il faut faire des sacrifices et par ricochet, ne guère s’attendre à ces facilités parce qu’il n’y a pas de moyens financiers pour cette option. A l’étendre donc, il faut déjà penser à l’après covid-19. En le disant, il s’est tout le temps focalisé sur les ” pays développés ” que le Bénin n’égale pas encore financièrement. « Le Bénin notre pays, à l’instar de la plupart des pays d’Afrique, ne dispose pas d’autant de moyens que les pays riches et si nous ne tenions pas compte de tout cela, nous pourrions dans notre action, déclencher un chaos qui remettrait même en cause le minimum impératif de la lutte. (…). Nous devons donc combattre le mal et le vaincre, mais sans compromettre notre survie après victoire », a-t-il évoqué entre autres, pour appuyer son raisonnement. Face à ce discours du Chef de l’Etat, rien ne doit plus rassurer les populations quant aux mesures sociales, leur permettant de mieux gérer et traverser cette crise qui en plus d’être sanitaire, est devenue économique. Car en clair, pour Patrice Talon, il faut penser à l’après crise. Seulement, en mettant sur tapis l’argument ayant trait à la fragilité et à la notoriété du pays, l’homme semble oublier un détail. Ceci, parce qu’il a, à tort ou à raison, manqué de circonscrire sa comparaison, à ce qui se fait juste à côté du Bénin, c’est-à-dire dans la sous-région Ouest-africaine. C’est le cas par exemple du Niger, un pays pauvre comme le Bénin, mais qui a pris des mesures sociales et encourageantes pour soulager la peine de ses populations, ses entreprises et même de ses détenus, comme la recommande l’Organisation des Nations-unies (Onu). Cela, alors même que ce pays ne compte pour l’heure que 18 cas confirmés et trois décès.
Une raison de plus…
Même si le Bénin n’a pas l’obligation de gérer cette crise sanitaire de la même manière que les autres pays qui ont plus de moyens, il est tout de même impérieux que Patrice Talon soit plus regardant envers la population béninoise, surtout dans cette période où certains devront sacrifier leur gagne-pain. Même si le Bénin n’est pas encore à l’étape du strict confinement, les activités tournent au ralenti depuis le début de cette pandémie. Pis, d’autres seront suspendues carrément dès ce jour, comme celles relatives au transport, aux bars et leurs corollaires. Dans ce cas, il est certain qu’employés et autres acteurs de ces secteurs, en pâtissent. Mais contre toute attente, en plus de ne prévoir aucun soutien compensateur à leur égard, le gouvernement, comme dans la plupart des cas, ne leur a apporté aucun soutien moral. Pas même une adresse à l’endroit de ces pères et mères de familles. Ce manque de compassion qui ne s’observe nulle part dans les pays touchés par cette crise, n’est-il pas ce facteur d’indifférence que reprochent toujours les Béninois à l’exécutif ? Avec cette posture, le gouvernement ne donne-t-il pas raison à ceux qui ne cessent d’affirmer que les besoins réels des populations ne préoccupent pas ceux qui, depuis 2016, ont le pouvoir exécutif ?