Au rouge, les statistiques l’étaient en matière de fourniture d’eau potable malgré une terre arrosée de cours d’eau, gratifiée par une pluviométrie tout sauf ingrate et pourtant 6 Béninois sur dix manquaient encore du liquide vital : l’eau potable. En quatre ans, qu’a-t-on pu faire pour corriger cet état de choses ? Le pari de l’accès à l’eau potable pour tous d’ici 2021 sera-t-il gagné ? Des questions à poser à notre invité, le Ministre Samou Seidou Adambi, Ministre de l’Eau et des Mines. Le ministre nous dira aussi si notre terre dispose vraiment des ressources minières comme nous l’avons appris sur les bancs, à l’école : de l’or, du pétrole, du fer, du marbre et que sais-je encore ? Quelle gestion le gouvernement fait de tout ceci et quelles retombées pour les populations béninoises ?
Monsieur le ministre, nous démarrons par les mines ; Quel état des lieux le gouvernement du Président Patrice Talon a fait du secteur dès que vous avez accédé au pouvoir ?
Merci beaucoup. Je voudrais, avant d’entrer dans le vif du sujet, vous remercier une fois encore pour l’occasion que vous donnez au gouvernement et plus précisément au secteur de l’eau et des mines de faire le point quatre ans donc après la mise en œuvre du PAG que nous appelons « Le Bénin Révélé 2016-2021 »
Je voudrais dire d’entrée que le Bénin est un pays minier et que nous sommes également un pays pétrolier. Il y a une vingtaine d’années, nous étions membre de l’OPEP ; mais de 1998 à nos jours, nous avons complètement arrêté l’exploitation du pétrole parce que ça n’a pas été géré comme il se doit. À l’arrivée du gouvernement de la rupture, il a été décidé d’arrêter tout et de réformer tout le secteur. Depuis tout ce temps, nous avons engagé des experts en la matière qui ont fait leurs preuves dans la sous-région et au-delà de l’Afrique pour nous accompagner afin de mieux asseoir un secteur pétrolier attractif qui puisse permettre aux plus gros de ce secteur tels que Total et autres de s’intéresser à notre pays.
Nous l’avions dit en 2018 lors de l’AN 2 de la rupture, notre pays n’est pas un pays maudit. Le Bénin est un pays béni. Il y a le pétrole et ce pétrole, nous l’avons en mer beaucoup plus ; donc il n’est pas sur le terrain de X ou Y.
Justement. Actualité oblige, il paraît qu’on a eu du pétrole à Banikoara. C’est bien cela ?
Non, ce n’est pas du pétrole, c’est de l’or. En dehors de Banikoara, il y a Malanville, Madécali, Tchoumi-Tchoumi, Perma.
Les recherches se poursuivent dans le secteur minier, de même que la mise en place d’un cadre attractif pour les compagnies parce que l’État ne peut pas investir dans un domaine comme celui-là ; C’est laissé aux compagnies qui savent où trouver les ressources parce que les sommes qu’il faut investir dans ce secteur sont colossales. C’est en termes de centaines de milliards. Donc on met le cadre règlementaire qu’il faut pour attirer les investisseurs. Aujourd’hui, nous pouvons vous dire qu’à Perma, nous avons déjà installé deux (02) compagnies qui ont démarré il y a à peine un (01) mois. Elles vont démarrer bientôt les recrutements. L’exploitation de l’or de Perma était faite par des orpailleurs clandestins, sans contrat. Par le passé, c’est vrai qu’il y a une industrie à laquelle un contrat a été signé mais qui n’est pas allé au bout, compte tenu du cadre qui n’était pas vraiment attrayant. A notre arrivée, on a tout arrêté pour reprendre à zéro. Avec l’accompagnement de l’UEMOA et de l’Union Africaine, nous avons aujourd’hui un code minier qui sera envoyé à l’Assemblée nationale pour étude et validation. Un code attractif qui puisse permettre à n’importe quel minier d’où qu’il vienne de s’intéresser à notre pays. Et déjà, nous avons à notre porte beaucoup de compagnies minières, entre autres canadienne et australienne, pour être au Bénin d’ici quatre (04) mois. La matière existe. Il faut permettre aux compagnies de venir investir pour approfondir les recherches et maintenant évaluer la quantité avant que l’exploitation proprement dite ne démarre.
Nous allons tout mettre en place pour que les générations futures puissent en bénéficier. Tout ce que nous faisons aujourd’hui, c’est pour les générations à venir.
Et le pétrole béninois ?
C’est pareil pour le pétrole. Aujourd’hui, nous avons un code qui vient d’être voté par l’Assemblée nationale, promulgué par le Chef de l’État. Nous sommes dans la phase de l’adoption de décrets d’application qui va être faite courant avril. Nous avons environ vingt-et-une (21) compagnies pétrolières dont les grandes qui s’intéressent à nous.
C’est dire que le sous-sol béninois est gorgé de pétrole ?
Bien sûr, et elles (compagnies) savent mieux que nous-mêmes ce que nous avons comme richesse. Elles ont des données qui balayent toute la côte ouest-africaine dont notre pays. Nous avons onze (11) blocs pétroliers dont deux (02) en offshore c’est-à-dire sur terre ferme et les neuf (09) autres en eau avec six (06) en eau profonde et trois (03) pas en eau profonde. Ces blocs sont convoités par ces compagnies pétrolières qui viendront bientôt et nous allons asseoir quelque chose de potable avec toutes les réformes qui sont opérées.
Un fonds de développement va être créé pour que toutes les ressources qui entrent, puissent être tracées. Chaque franc qui va entrer désormais par le biais du pétrole béninois sera tracé non seulement par l’autorité béninoise mais la banque centrale aussi va être impliquée dans la gestion de ces ressources pour que tout le monde puisse comprendre que ça a été géré comme il se doit, comme l’aime le Chef de l’État, pour que notre pays puisse tirer ce profit que les autres pays qui nous entourent tirent du pétrole.
M. le Ministre, on ne va pas laisser le pétrole mais on va aussi évoquer les autres ressources minières comme le marbre, le fer de Loumbou-Loumbou. Qu’en est-il par rapport à ces ressources minières ; est-ce qu’il n’y en a plus ou il y en a toujours ?
Il y en a toujours. Le marbre existe toujours. Nous en avons à Idadjo, Sio, Bagounohoue et leur exploitation va démarrer bientôt. Nous avons entrepris des démarches vers des pays qui sont en avance sur nous et nous sommes accompagnés actuellement. Les prospections ont été faites sur le terrain. Il va y avoir l’installation bientôt d’une usine à Glo-Djigbé au niveau de la zone économique pour tailler, polir ce que nous avons comme pierres ; et Dieu seul sait que nous en avons ! En termes de granites, nous avons plus de quinze (15) variétés qui jusqu’ici, en dehors du goudron et des bâtiments, ne servent à rien. Si vous allez aujourd’hui aux Champs-Élysées, ce n’est pas du pavé mais de la pierre taillée. On peut polir et mieux tailler nos pierres que ce qui est fait aux Champs-Élysées et, cette expertise, nous l’avons d’un pays africain qui nous accompagne. L’année prochaine, à pareil moment (avril 2021) si on n’a pas fini d’installer cette usine, elle serait presque en phase terminale pour démarrer ses activités. À ce niveau, c’est l’État qui prend le devant. L’État va faire des investissements initiaux et demander maintenant à ce que les opérateurs économiques viennent prendre la relève et, au fur à mesure, vont rembourser tout ce que l’État a eu à investir. Dix (10) ans après, on va commencer par percevoir les taxes et exporter aussi. Nous aussi, nous allons être un consommateur parce que quand nous voyons nos trottoirs, pour la plupart du temps, c’est du pavé fabriqué. On peut découper, tailler et poser. C’est plus durable, plus beau et joli à voir. Dans l’Atacora aujourd’hui, nous avons suffisamment de quartzite ; ce qui est rare dans la sous-région. Quand ces pays qui nous apportent leur expertise débarquent sur le terrain, ils se disent : "comment vous pouvez avoir tout ça et ne pas l’exploiter ?"
La crainte, M. le Ministre, très souvent, cela ne profite qu’aux étrangers et pas aux Béninois
Le cadre réglementaire que nous avons ne permet plus à quelqu’un de venir exploiter quoi que ce soit et partir sans que le Bénin ne prenne ce qui lui revient de droit ; parce qu’avant que l’intéressé ne commence, les règles sont bien définies et il ne peut pas avoir changement de règles en cours de jeu. C’est pour ça que nous avons pris tout ce temps pour nous doter de tout l’arsenal juridique qu’il faut, et que les partenaires ont déjà en mains. Ils savent quelles sont les conditions d’exploitation et d’exercice de leur métier dans notre pays ; les années à venir, quelle est la part du Bénin, de la main-d’œuvre béninoise ? la part qui revient aux communautés riveraines ? Tout ça se définit clairement dans la loi que les parlementaires nous ont accompagnés à valider et promulguée par le chef de l’État, en ce qui concerne le code pétrolier. Pour le code minier, nous allons retourner à l’Assemblée bientôt pour obtenir ce quitus du parlement.
M. le Ministre, on va passer à un autre grand projet : le PIPELINE. Dites-nous comment le Bénin a pu gagner ce projet parce qu’on n’était pas allé seul ?
Lorsqu’un pays rassure tout le monde, les investisseurs y affluent. Aujourd’hui, notre signature rassure, elle a de la valeur à l’international. Cela fait que les gens prennent le risque de venir au Bénin. Lorsqu’une compagnie comme la CNPC, la plus grande compagnie pétrolière de la Chine accepte de venir au Bénin, dites-vous en fait que ce n’est pas parce qu’on s’appelle le Bénin ou on est amis. Ces sociétés n’ont pas d’amis, elles n’ont que des intérêts et les intérêts pour les avoir, il faut aller dans les pays où on respecte l’opérateur économique qui vient investir des milliards de Francs CFA.
Le projet pipeline Niger-Benin, c’est environ 600 milliards de FCFA d’investissements privés où l’État ne met un seul franc. Quelqu’un ne peut pas venir faire ça pour nos beaux yeux, et notre coopération avec la Chine ne date pas d’aujourd’hui. L’assurance pour ces investissements existe aujourd’hui. D’abord la tête et, les textes législatifs et réglementaires qui accompagnent le PAG rassurent n’importe qui. Et c’est ça qui nous a permis de pouvoir faire la compétition, d’égal à égal avec les autres pays à savoir le grand voisin (Nigeria), le Tchad et le Cameroun ; et le résultat est là aujourd’hui. Le pipeline est au Bénin.
Où en sommes-nous par rapport à la réalisation du pipeline ?
Le projet de pipeline a déjà démarré puisque la tuyauterie est déjà là, depuis le 23 février 2020, et stockée au Port Autonome de Cotonou. Le transport a déjà commencé sur tout le pays, dans les zones traversées par le projet. C’est au total 675 km de tuyauterie du Nord Bénin jusqu’à Sèmè-Kpodji où nous allons avoir un quai qui va être construit et où les navires pétroliers viendront transporter le pétrole qui quitte le désert nigérien à Agadem pour Sèmè. Nous avons tout fait pour que le tracé ne vienne pas perturber le quotidien des populations. Aujourd’hui, nous sommes prêts mais l’actualité du Covid-19 a freiné les choses parce que les techniciens et les patrons du projet ne sont pas autorisés à quitter la Chine.
Quelles seront les retombées pour les Béninois que nous sommes ?
Nos opérateurs économiques vont beaucoup travailler. A commencer par les transporteurs qui, eux, ont déjà démarré. C’est environ 700.000 tonnes de matériaux et matériels dont 320.000 tonnes pour le Bénin et le reste en direction du Niger. Nous participons au transport de tout ceci. En ce qui concerne la jeunesse, les ouvriers, les cadres dans le domaine financier, pétrolier, de la géologie, tout ce monde sera sur le projet. Il va y avoir un recrutement d’environ trois mille (3000) personnes dont Cinq-Cents (500) qui vont être de façon permanente pour la gestion du projet qui durera entre 35 et 40 ans minimum. Les projections ont été faites sur la base de la quantité du pétrole disponible au Niger aujourd’hui et les recherches se poursuivent. Ces quantités découvertes au fur et à mesure ne sont pas encore prises en compte dans cette prévision ; c’est pourquoi nous parlons de 40 ans minimum. Nous aussi, nous allons lancer nos grosses campagnes ; pas seulement en mer mais aussi sur terre ferme pour voir si nous n’avons pas du pétrole à Kandi, parce que c’est le même sédiment que le Niger. Donc nous accentuerons les recherches dans la zone de Kandi, Malanville et environs.
Devrait-on s’attendre à des transformations au niveau du visage des communes traversées par le projet du pipeline ?
Lorsque le pipeline va être construit, nous allons avoir trois stations de pompage et la plus grosse de ces stations se trouvera à Sèmè. Elle va occuper une superficie d’environ 40 hectares sur laquelle seront construits des tanks pour stocker le pétrole en attendant que les navires ne viennent chercher. Il y aura beaucoup d’autres choses qui vont être construites et, tout autour, c’est une zone qui naît. Nous avons la zone Franche industrielle qui est là, donc ça entre véritablement dans les prévisions de l’État. Que ça soit au Niger comme au Bénin, l’infrastructure qui sera érigée à Sèmè sera la plus grosse et la plus importante.
Ensemble avec la partie chinoise et celle nigérienne, nous allons décompter chaque goutte de pétrole qui passe par Sèmè parce que nous aurons un droit de transit que nous allons prendre par baril. Nous sommes un couloir de passage mais nous tirons gros. Nous avons un droit de transit et sur 10 ans nous avons exonéré un certain nombre de taxes qui reviendront après la dixième année. C’est des centaines de milliards de francs CFA que nous allons prélever pendant le reste de la période dédiée à l’exploitation.
Le plus important pour nous c’est la main-d’œuvre, l’emploi qui sera créé au profit de nos compatriotes qui, pour la plupart, n’ont pas encore à faire. Pour les opérateurs économiques, il y en a qui vont travailler tout le temps sur le projet. Tout ça va développer une autre industrie au Bénin. Sans avoir commencé la production de notre pétrole, le Bénin devient un pays où on parlera du pétrole régulièrement parce que la CNCP n’est pas n’importe qui. Et à travers leur installation, d’autres grosses compagnies ont frappé à nos portes pour dire qu’elles sont intéressées par notre pétrole. Nous sommes en pourparlers, nous continuons d’échanger. Nous allons lancer notre propre secteur pétrolier qui n’ira pas contre ce qui est là mais qui nous permettra de développer davantage le secteur pétrolier béninois et créer donc autant d’emplois qu’il faut, et aussi permettre à notre pays de souffler économiquement et financièrement.
M. le Ministre, on va aussi aborder l’autre grand pan de votre département ministériel. C’est bien sûr l’EAU. On partira d’abord dans les zones urbaines, sont-elles toutes concernées ?
Aucune commune ne sera laissée pour compte dans le programme « Eau pour tous à l’horizon 2021 ».
Nous avons décidé de commencer par les zones de concentration que sont Cotonou, Sèmè, Porto-Novo, Ouidah, Abomey-Calavi, le plateau d’Abomey, Bohicon, Agbangnizoun, Za-Kpota, Zogbodomey, Djidja, Parakou, Djougou. Dans ces zones, nous sommes à peu près trois millions de personnes impactées. Ce sont aussi des zones qui sont commercialement rentables pour la SONEB. Et le reste, qui est estimé à moins de deux millions d’habitants, verra les travaux démarrer d’ici Mai.
En 2017, au moment où on commençait véritablement, nous étions face à un chiffre de 89% de taux d’accès à l’eau potable en milieu urbain. Mais on a décidé de mieux faire le point et on s’est rendu compte que véritablement on était qu’à 55% de taux d’accès. Les chiffres de départ n’étaient donc pas réalistes. Au lieu de 2,7 millions, on s’est rendu compte qu’il faut donner de l’eau potable à 4 millions de personnes en milieu urbain. Il faut 1,3million en plus pour couvrir l’ensemble du territoire. Nous avons donc commencé le travail par Djougou qui est terminé depuis 2018 et réceptionné. Après Djougou, nous sommes venus à Parakou avec la réception de la première phase du projet. Cette phase a réglé la question de la mobilisation de la ressource et une extension sur environ 300 km. Il y a une seconde phase qui va démarrer pour couvrir l’entièreté de la ville et les environs pour 600km de plus.
Avec les témoignages des populations de Parakou et leur reconnaissance à l’endroit du chef de l’Etat, êtes-vous satisfait du travail ?
Face à la joie de la population de Parakou, on ne dira pas qu’on est encore satisfait parce que quand vous avez une seule personne qui n’a pas d’eau, on ne peut pas clamer victoire. Pour l’instant, nous continuons notre travail. Et je le disais tantôt, en quittant la partie septentrionale, nous venons dans le centre.
Avec le partenaire japonais, nous avons réglé le problème de Glazoué à environ 70% mais pas seulement Glazoué, mais aussi Dassa-Zoumè. Savè avait déjà de l’eau. Aujourd’hui, ces deux communes qui n’en avaient pas du tout sont à l’abri. En dehors de ça, nous avons Savalou où il n’y a pas d’eau. Le barrage qui est exploité par la SONEB jusqu’ici ne donne plus la quantité qu’il faut pour satisfaire la population. Nous avons donc décidé d’aller chercher l’eau souterraine et nous avons eu l’accompagnement du gouvernement qui nous a permis de réaliser un certain nombre de forages pour mobiliser la quantité complémentaire qu’il faut. Aujourd’hui, les installations sont en train de grandir et avec le contrôle du DG/SONEB, d’ici fin Mai 2020, nous allons réceptionner ces ouvrages et du coup régler la question de la ville de Savalou. Parallèlement à tout ça et toujours dans les collines, il a été décidé de construire deux gros barrages. Le premier à Ayédjoko qui est en cours de construction. Ces travaux qui ont déjà démarré permettront de régler de façon définitive la question de l’eau dans les Collines. Le second barrage à Lifo, de 12 millions de m3, toujours dans le même projet, va être construit pour permettre de raccorder Savalou en cas de problème. Au total, nous aurons 14 millions de m3 en permanence.
M. le Ministre quand les travaux de ces deux barrages seront terminés, on sortira le Zou et les collines de la sécheresse hydrique ?
Non, pas les deux départements mais les collines. Quand on quitte les Collines, nous venons dans le Zou que nous appelons le plateau d’Abomey à savoir Abomey, Bohicon, Djidja, Agbangnizoun, Zogbodomey, Za-Kpota. Nous sommes allés chercher l’eau à Zogbodomey pour construire des stations de pompage et de traitement, des châteaux, de bâches à Bohicon et à Abomey qui, aujourd’hui, mobilisent environ 3700 m3 à l’heure ; ce qui dépasse de loin les besoins de ce plateau d’Abomey aujourd’hui. D’ici 50 ans, c’est pour alimenter environ 500.000 personnes en permanence. Tout ce que nous faisons, nous ne le faisons pas pour 10 ans mais pour la postérité. La mobilisation en termes d’eau est complètement réglée. Notre dernière sortie, c’était pour lancer la seconde phase qui va permettre de faire l’extension c’est-à-dire le réseau tertiaire qui pourra permettre aux populations d’avoir de l’eau devant leur portail. Tout ceci est fait pour régler le problème de l’accès à l’eau potable pour tous à l’horizon 2021 en milieu urbain et dans le plateau d’Abomey.
Lorsque nous venons à Calavi, là également, nous avons fini la première phase en termes de mobilisation de la ressource en eau. À Zinvié, la station de pompage et de traitement est achevée. Nous allons faire la réception dans quelques jours. Il nous restait que le branchement de la SBEE parce que tous les tests ont été faits avec les groupes électrogènes. Après la réception, nous lancerons les deux autres phases, toujours pour la commune d’Abomey-Calavi avec des extensions sur 30 km. La deuxième phase de ce projet est financée par les partenaires allemands, la KFW. Les travaux sont déjà en cours avec l’entreprise CGC qui travaille dans les Collines, et la troisième phase va être lancée dès qu’on aura réceptionné celle qui est achevée. Donc on aura fini avec Calavi.
À Porto-Novo, nous avons un souci qui est en cours de règlement. La quantité d’eau dont nous avons besoin dans la capitale n’est pas disponible. La production est inférieure aux besoins aujourd’hui exprimés par les populations. Il faut donc régler la question, et avec la KFW toujours nous avons déjà lancé les travaux pour renforcer la mobilisation de la ressource en eau et les extensions vont suivre. Ce sera pour régler le problème de disponibilité en permanence de l’eau ; pas seulement à Porto-Novo mais jusqu’à Sèmè-Kpodji et Ouidah.
Et Cotonou donc ?
Parlant de Cotonou, même les quartiers raccordés souffrent énormément. Cela s’explique par le fait que depuis plus de 20 ans, on n’a pas fait les investissements qu’il faut pour pouvoir répondre au boom démographique de Cotonou. Aujourd’hui, nous avons une production qui est de 85.000 m3/jour or nous sommes dans un besoin de 110.000 m3 minimum pour ceux qui sont branchés. Quand vous prenez les quartiers périphériques à savoir Akpakpa, Fidjrossè, c’est là où les gens peinent à avoir de l’eau parce que les extensions qui ont été faites, ce n’est pas ça. Ça doit être beaucoup plus fort, plus dense que ça. Il faut les reprendre. Donc aujourd’hui, avec le cabinet Merlin et la Banque Européenne d’Investissement, l’étude technique pour pouvoir réellement maîtriser Cotonou est en cours. Le rapport sera déposé d’ici Novembre 2020 et en Février 2021 nous allons amorcer réellement les travaux dans ces quartiers périphériques. Nous allons construire un château d’eau à Akpakpa pour pouvoir régler la question de la baisse de tension dans cette zone pour qu’en cas même de coupure, la zone puisse être alimentée. Un autre château et une bâche seront construits à Godomey pour permettre également de juguler la question en cas de coupure et de baisse de débit que nous vivons pratiquement dans tout Cotonou. Parallèlement à ça, il va y avoir le renforcement c’est-à-dire l’augmentation de la quantité qu’il faut pour alimenter Cotonou et c’est à Ouèdo que le travail va être fait pour mobiliser la quantité supplémentaire qu’il faut pour dépasser les 110.000 m3 de besoins journaliers. Nous irons au moins à 200.000m3 pour tenir compte des 50 ans de projection.
M. le Ministre, 2021 c’est dans quelque jours ; est-ce que vous êtes sûr de pouvoir tenir ce pari ?
La vision du gouvernement est claire et nous sommes sur ce chemin. C’est d’assurer l’accès à l’eau potable à toutes les populations du Bénin à l’horizon 2021. Notre horizon c’est le 31 décembre 2021 et nous pensons pouvoir tenir le pari.
À Cotonou il va y avoir aussi le renforcement au cœur de la ville pour pouvoir permettre à ceux qui sont à Kindonou et parfois Vèdoko où nous avons les stations d’avoir de l’eau en permanence. Une fois que la quantité dont on aura besoin sera mobilisée, la question d’eau ne se posera plus à Cotonou.
Une chose est d’avoir de l’eau et l’autre est de pouvoir l’acheter. Ne pensez-vous pas qu’il faut revoir les prix ?
Le gouvernement travaille à la mobilisation de la ressource en eau et aussi permettre à toute la population de pouvoir s’abonner. De 120.000 FCFA le branchement, nous sommes descendus à 50.000 FCFA et mieux, au lieu de verser les 50.000 FCFA en un seul trait, nous avons donné la possibilité aux populations de payer 20.000 FCFA à la pose du compteur et étaler les 30.000 FCFA restants sur six (06) mois. Vous allez par exemple à Bohicon aujourd’hui, les demandes sont énormes. La société à qui nous avions confié la mission de brancher les populations est à pied d’œuvre pour aller très vite parce que nous avions pris l’engagement de brancher le consommateur dans les 72 heures après le payement et lorsque la conduite passe devant votre maison. C’est pareil à Parakou.
On vous donne de l’eau et si vous ne payez pas on vous coupe. N’est-ce pas un paradoxe ?
L’eau est subventionnée. Nous ne vendons pas l’eau en milieu urbain à sa vraie valeur parce que l’eau est un bien social. Il faut permettre à tous ceux qui vivent dans nos villes et environs d’avoir accès à ce liquide précieux.
Donner de l’eau potable à tous les Béninois à l’horizon 2021 demeure un engagement du gouvernement et on y est. La preuve, la pression qu’on s’est mise nous-mêmes nous permet d’arriver à bon port d’ici le 31 décembre 2021.
M. le Ministre, parlons maintenant des zones rurales. Vous est-il arrivé de boire de l’eau de marigot ? Qu’est-ce que ça vous fait de voir en plein 21ième siècle les populations boire de l’eau impropre à la consommation ?
Oui, il nous est déjà arrivé de boire de l’eau de marigot. J’ai grandi dedans. On a mal, très mal de voir des populations boire cette eau. C’est la raison d’être de tous ces projets que nous développons. On s’active. On a fait beaucoup en termes de réformes d’abord, convaincre les partenaires, mobiliser les ressources et donner de l’eau potable à tout le monde. Ça n’a pas été chose facile. Il a fallu que le Chef de l’État lui-même prenne le devant pour convaincre les partenaires.
En milieu rural, ce sont des barrages qu’il faut aller construire. Il faut chercher l’eau dans le sous-sol. Pour dimensionner les ouvrages, il faut d’abord trouver la ressource. Donc il y a une large campagne qui a couvert près de la moitié du pays pour mobiliser la ressource. Pour cette première phase achevée, les travaux de génie civil ont démarré et permettront de relier beaucoup de villages avec un seul système qu’on appelle Système d’approvisionnement en eau potable multi-villages au lieu de faire une AEV par commune. Ces AEV qui existaient vont être également réhabilitées et les extensions vont suivre. Ce qui est intéressant ici en milieu rural, c’est que la deuxième phase va couvrir l’entièreté de ce qui reste et ça être lancé bientôt pour permettre de finir avec les campagnes de forage pour la mobilisation de la ressource. C’est beaucoup plus les arrondissements qui seront les plus impactés en milieu rural.
À la fin, on ne va pas confier tout ça aux gestionnaires d’hier. Ils vont intervenir mais sous le couvert des professionnels du secteur dont le recrutement est en cours. Ce sont des privés qui ont fait leurs preuves dans ce domaine à l’extérieur. Ça ne veut pas dire que le coût de l’eau va être plus élevé parce qu’aujourd’hui, nos populations achètent l’eau en milieu rural à plus de 800f CFA le m3 ou 1000f CFA pendant la saison sèche. C’est plus cher qu’en ville et c’est le paradoxe. En milieu urbain c’est au plus à 400f FCFA le m3. Le gouvernement, avec à sa tête le Président Patrice TALON, a décidé de régler le problème de l’eau en cinq (05) ans. Et nous mettons tout en œuvre pour y arriver. Le plus dur, c’est aussi comment maintenir le service pour les populations.
Désormais le prix sera plus bas dans ces localités ?
Il y a des études qui sont en cours pour pouvoir étudier les prix et comment maintenir les ouvrages, ce qui est d’ailleurs le plus dur. Les tout derniers travaux vont être engagés entre Août et Septembre 2020. Ça nous permettra d’avoir le temps de discuter avec les partenaires, les professionnels privés qui vont prendre en charge la gestion de ces ouvrages pour permettre de donner de l’eau pour toujours à nos populations. L’État a ce souci de permettre à chaque citoyen où qu’il se trouve sur le territoire d’avoir accès à l’eau.
Etant dit que ce sont les opérateurs privés qui vont gérer ces ouvrages, quels seront leurs rapports avec les communes ?
Ce qui est clair, l’État jouera le rôle d’arbitre entre ces opérateurs privés et les communes. Il va y avoir des contrats qui seront signés sous le regard de l’État entre ces partenaires et toutes les communes. Aujourd’hui, c’est l’agence qui fait le travail pour le compte du gouvernement. Ce n’était pas l’agence mais les communes qui le faisaient. Mais n’ayant pas ce qu’il faut en termes de compétences, tout ça a été délégué à l’État. Donc, il y a une convention cadre que les communes ont signée avec l’État central pour dire : « OK, faites le travail pour nous et une fois terminé, nous allons nous asseoir pour voir comment gérer ». Quelle est la rétrocession qui sera faite aux communes ? Ce qui est clair, le système qui sera mis en place permettra pendant tout le temps de pouvoir donner de l’eau aux populations. C’est le plus important.
Quelles garanties ont donc les populations quant à la qualité d’eau qu’on leur offre ?
En matière de qualité, nous avons la meilleure qualité de l’eau au Bénin et vous pouvez questionner l’OMS. Il y a des indications qui sont données et que nous respectons scrupuleusement. Mais il peut arriver des situations, des casses ou un problème technique et cela se corrige en 24 voire 48 heures.
Quelle est donc la place de la GIRE en matière de gestion d’eau ?
Aujourd’hui, nous avons environ onze (11) barrages dont les projets ont démarré. Dans le bassin du Niger avec deux projets ; le premier financé par la BOAD qui est le PEDISA avec 04 barrages. Le second financé par la BAD avec 03 barrages nouveaux à construire et 16 autres à réhabiliter pour permettre de contenir le pâturage dans la partie septentrionale afin d’éviter les conflits observés annuellement. En dehors de ça, nous avons 11 autres barrages que nous allons construire sur le fleuve Ouémé pour permettre de mobiliser près de trois milliards de m3 d’eau qui se déversent chaque année sur Cotonou et qui viennent inonder la partie basse de la vallée de l’Ouémé. À terme, il y aura trois barrages hydroélectriques. Le premier à Dogo bis, c’est le plus avancé. Un autre à Vossa dans les collines et le dernier à Bétérou. Tous ces barrages vont permettre de dompter le fleuve Ouémé.
En dehors de tout ça, il y a la réforme au niveau de la Direction Générale de l’Eau. Nous nous apprêtons à mettre en place une autre structure qui va s’occuper de la gestion de l’eau de nos barrages. Le gouvernement a donc mis en place tout le mécanisme qu’il faut pour pouvoir régler la question de l’eau définitivement dans notre pays.
Il y a une question qu’on occulte souvent. C’est la question de l’assainissement. Si vous donnez de l’eau à boire aux populations et qu’elles végètent dans l’insalubrité, elle va toujours boire de l’eau impropre, M. le Ministre ?
L’ODD Numéro 6 ce n’est pas seulement l’accès à l’eau potable à l’horizon 2030, c’est aussi l’assainissement de l’eau et là-dessus, le gouvernement a avancé. Nous avons recruté un expert qui a fini son travail et la présentation sera faite au gouvernement bientôt. Le document est déjà disponible auprès de tous les membres du gouvernement. Nous allons programmer et une fois que le document sera adopté, nous allons passer à la phase de mise en œuvre de tout ce qui aura été retenu comme projets. La Banque mondiale, la BAD sont des partenaires qui nous relancent quotidiennement parce que lorsque vous donnez de l’eau, sachez que ceux qui boivent doivent rejeter. Donc si on donne de l’eau à 100% de nos populations, on doit s’attendre à un autre phénomène si on ne gère pas correctement à savoir les maladies hydriques. Et si on veut éviter ça, il faut régler la question de l’assainissement et le gouvernement s’y attèle.
La station de traitement de boue de vidange a démarré à Sèmè. Il y a une autre qui va démarrer à Calavi avec la KFW, et aussi une station a démarré à Parakou, financée par le gouvernement. En milieu rural, c’est là où les partenaires veulent nous accompagner réellement pour que chaque foyer puisse gérer ce qu’il produit comme eau usée.
Vous avez certainement quelque chose à dire aux populations. Vous avez dit que tout le monde aura l’eau potable d’ici 2021, M. le Ministre
Nous réitérons notre engagement, nous allons réellement régler la question de l’eau au Bénin d’ici 2021. Pour les communes en milieu urbain qui n’ont pas encore vu les machines déblayer le terrain, je dis bien que les travaux vont être lancés bientôt. Le processus de recrutement est terminé et nous-même nous allons nous y rendre pour leur dire que les travaux démarrent et faire le suivi avec les autorités locales et les populations à la fois. Par la grâce de Dieu, nous pensons répondre à la fourniture de l’eau potable en 2021 à tous nos concitoyens où qu’ils se trouvent sur le territoire national.