Pour tout chroniqueur, à tant parler du Covid-19 (Dieu sait qu’on voudrait bien ne plus en souffler mot, tellement ce virus nous prend la tête), autant changer de disque et saisir au bond cette affaire qui défraye la chronique pour ne pas, disons, se rendre coupable de fuite en avant, voire coupable d’avoir battu en retraite, la queue basse, sans l’aborder…Quid de cette affaire grivoise qui prend des allures d’affaire du siècle à cause des réseaux sociaux où il est de règle de guillotiner avant d’avoir jugé, avant même d’avoir connu le fond des choses, le fin mot de l’histoire ? Il est vrai, qu’avec des ‘’si’’, on ferait tous de bons menuisiers !
En ce début du mois de mai 2020, le microcosme des réseaux sociaux est figé : un ange proteste, pour emprunter les mots de Yannick Noah dans sa chanson éponyme ‘’Angela’’. Dit-elle vrai ? Est-elle un ange en rapport au prénom qu’elle porte, ou un diable en robe? Elle tonne et dit que les écrous sont rouillés, décidant de mettre « les pieds dans les plats ». Et que nous dit le monde, si nous l’écoutons à ce propos ? Leçons d’intolérance : « Cette femme est coupable » ! Et soudain son nom résonne dans la ville : Angela Kpeidja, femme de son temps et pas moins fière quand bien même on lui prête un pedigree peu glorieux dans son rapport avec la gent masculine. Mais qu’à cela ne tienne. La voilà, ‘’panthère noire traquée’’ (pour revenir à la chanson de Yannick Noah), monnaie de sa pièce, sur les plateformes digitales.
La ville toute entière, dans un écho retentissant comme pour oublier les galères liées au Covid-19, est absorbée par cette affaire, par ce jeu de dupes qu’affectionnent les garçons qui aiment tirer le moindre chevreuil, les yeux brillants à l’idée de voir sous les jupes des filles, selon les mots d’Alain Souchon, comme si c’est la seule chose qui tourne sur terre. L’infortune à quoi se résumeraient leurs vies ?
Moins prosaïquement, à propos de cette affaire, disons que tant va la cruche à l’eau qu’elle finit par se rompre. Alors que sonne l’hallali contre le harcèlement sexuel, ici et là, et qu’il fait bien de « balancer son porc », cette catégorie de prédateurs doit se tenir pour dit qu’est fini le temps des cerises, et que si les filles ne veulent pas qu’on regarde leurs guiboles, le Non dans ce cas est essentiel, et fixe la ligne de démarcation entre la subtile résistance qui fait le charme des femmes et le rejet catégorique des avances faites, pour une raison ou une autre. Il faut dans ce cas, pour un garçon, savoir s’arrêter et respecter ce non, emmerdeur il est vrai, qui met à rude épreuve la masculinité. Mais qu’importe !
Il est tout à fait permis dans notre civilisation de conter fleurette à l’autre sexe, pour un garçon comme pour une fille, sans que cela ne soit considéré comme une affliction. Et, pour un garçon, se heurter à un refus, de façade soit-il, de coquetterie ou d’hypocrisie, ne doit en rien justifier l’emprunt de manières de goujat pour décider la belle convoitée. Surtout s’il en vient à abuser de sa position face à une subordonnée, arme pour lâche. Dans ce qui doit être considéré comme un jeu d’échecs entre filles et garçons, quoi de plus délectable et viril, pour un garçon, que de venir à bout de toute résistance par sa seule force de persuasion ?
Tous les tombeurs, qu’ils s’appellent Casanova ou Don Juan, ne le savent que trop.