Un milieu non propice, une procédure biaisée ! L’expropriation de terre en vue de la construction d’un marché de gros couve une injustice criarde à Kansounkpa Suite, commune d’Abomey-Calavi. La détresse, le désarroi qui se sont installés dans le rang des acquéreurs de parcelles de Kansounkpa Suite, selon le président de l’Association des acquéreurs, fait déjà des victimes. Et pour cause…
Le 19 mai 2020, le préfet de l’Atlantique a convié les acquéreurs de parcelle de Kansounkpa Suite, zone retenue pour la construction d’un marché de gros, à une séance à la mairie d’Abomey-Calavi. A cette occasion, le préfet, sans autre forme de procédure, leur a fait part des prix retenus par le gouvernement au mètre carré. Lesquels prix varient de 3500 à 8000FCFA. C’est la stupeur totale et alors même que les populations crient leur désarroi et appellent au secours le chef de l’Etat, elles apprennent qu’une procédure d’appel d’offre est déjà lancée et les acquéreurs invités à déposer leurs dossiers à la mairie pour se faire dédommager. Cette situation est à la base d’une psychose au point où des acquéreurs de parcelles retraités sont sur des lits d’hôpitaux et d’autres sont déjà passés de vie à trépas, aux dires de Moïse Amoussou, le président de l’Association des acquéreurs de parcelle de Kansounkpa Suite.
Le domaine concerné, plus de 168 hectares, abrite plus de 5000 habitants, environ 700 bâtiments, une centaine d’immeubles d’une valeur de 70 à 150 millions FCFA. Les prix des parcelles varient entre 6,7 et même 10 000 000 FCFA. C’est pour ces parcelles qu’on envisage de dédommager les gens à 3500-8000 f le mètre carré soit largement en deçà des prix d’acquisition et dans l’ignorance totale du coût de réalisation des bâtiments et ou des clôtures. Or la loi prévoit qu’aucune expropriation ne peut se faire sans une juste et préalable indemnisation. Sommes-nous encore dans un État de droit si, l’Etat lui-même organise une insécurité foncière dans un contexte où beaucoup de ces propriétaires ont des titres fonciers sur ces parcelles? L’Etat ou les gouvernants sont-ils au-dessus de la Constitution et des lois du pays? Une injustice qui amène les populations à se demander si le chef de l’Etat est informé de ce qui se trame, du coup de force que préparent les cadres de l’administration foncière contre la population de Kansounkpa Suite.
Des raisons de croire au complot
Selon le président de l’Association des acquéreurs de parcelle à Kansounkpa Suite, de prime abord, il n’avait jamais été question de construire un marché de gros à Kansounkpa. Le 1er arrêté pris par le préfet stipulait que le marché serait construit dans la zone de Zopah. Mais subitement, un autre arrêté a été pris pour rediriger le projet vers Kansounkpa. Moïse Amoussou se demande si ce n’est pas parce que les autorités se sont rendu compte que leurs propres parcelles sont dans l’emprise du projet, qu’elles ont changé de site ?
Le 02 août 2019, les populations ont été informées de ce que le gouvernement a l’intention d’exproprier leur terre pour construire un marché de gros. Le 05 août déjà, sans aucune rencontre avec les acquéreurs, les enquêtes commodo et incommodo sont lancées. Et alors que les résultats de ces enquêtes n’ont jamais été rendus publics, le gouvernement fixe les prix au mètre carré. Au même moment, les demandes d’audience que l’Association des acquéreurs a envoyées au ministre du Cadre de vie, au préfet de l’Atlantique, au directeur de l’Andf et au maire de la communes d’Abomey-Calavi sont restées lettres mortes. « C’est seulement le Ca qui nous a reçus. Mais il nous a barrés complètement la voie pour atteindre le maire. Il est quasiment impossible de rencontrer le maire », a laissé entendre Moïse Amoussou.
Un site inapproprié
Pour les acquéreurs de parcelle de Kansounkpa, le site ne serait même pas approprié pour un projet de ce genre. Aux dires de Moïse Amoussou, Kansounkpa abrite déjà la prison civile d’Abomey-Calavi, le plus grand cimetière du Bénin sur plus de 10 hectares, la haute tension de 630 kilovolts, l’implantation des chinois qui s’occupent de l’asphaltage. Comment implanter un marché à proximité d’une prison et sous une haute tension ? N’y a-t-il que Kansounkpa dans la commune d’Abomey-Calavi ?, s’est-il demandé. Pour lui, ce choix cache beaucoup de choses dont le chef de l’Etat n’est certainement pas informé. A Kansounkpa, une parcelle est vendue à 5, 6, 7, et même 10 personnes à la fois. Les affaires de litige domanial constituent pour les autorités communales une bombe à retardement. Est-ce pour camoufler ces magouilles qu’elles ont jeté leur dévolu sur Kansounkpa ? Les autorités se disent certainement que leurs problèmes seront réglés une fois que le gouvernement va exproprier la zone, a laissé en National tendre Moïse Amoussou. Pour lui, il n’y a aucun doute que le chef de l’Etat a été mal renseigné par les cadres impliqués dans ce dossier. Car, l’absence d’habitations, raison évoquée pour détourner le projet vers Kansounkpa, est aux antipodes de la réalité sur le terrain. Il sollicite une descente de Patrice Talon à Kansounkpa afin de constater par lui-même combien la zone est déjà viabilisée.