Hermione Dossou-Kohi à propos de la Journée des archives : « …l’information est une ressource stratégique dans tous les secteurs de l’activité humaine »
Ce mardi 9 juin 2020, la Communauté internationale a célébré la journée internationale des archives. Ce fut pour la présidente de l’Association pour le Développement des Activités Documentaires au Bénin (Adadb), Hermione Dossou Kohi, l’occasion de préciser l’importance des archivistes dans la préservation de la mémoire collective. Ceci, à la faveur d’un entretien accordé à votre journal.
Ce mardi 9 juin, la communauté internationale a célébré la journée internationale des archives. Pourquoi célébrer une journée des archives ?
La journée internationale des archives est instaurée pour attirer l’attention des individus, des organisations, des communautés, des nations, sur l’importance des archives. La première célébration remonte en 2008. Aujourd’hui, en raison de l’importance sans cesse croissante des archives, une journée ne suffit plus pour mettre la lumière sur ce patrimoine important et méconnu. Donc depuis 2019, il est organisé une semaine internationale des archives.
Quel est le thème de l’édition de cette année ?
Le thème retenu cette année est « Renforcer les sociétés du savoir ». Ceci, pour interpeller les archivistes sur leur rôle dans le processus de collecte, de traitement, de conservation et surtout de diffusion de l’information à l’ère du numérique. Il faut souligner le fait qu’aujourd’hui, l’information est une ressource stratégique dans tous les secteurs de l’activité humaine. Elle doit donc être maitrisée.
En quoi les archives participent-elles à la préservation de la mémoire ?
Dans un monde en pleines mutations sociologique, politique, économique, scientifique et technologique, chaque groupe humain, chaque peuple, chaque pays, avec son mode de pensée et de fonctionnement, essaie d’apporter à sa manière des réponses aux problèmes de son temps et de son milieu, trace sa voie vers le futur, en un mot, fait son histoire, mais sans forcément l’écrire. Le rôle de l’archiviste est donc de construire le pont pour garantir la transmission de cette mémoire de génération en génération.
Ecrire l’histoire revient à quoi ?
Ecrire l’histoire revient à restituer, transcrire pour la postérité, les faits et les gestes, les pensées et les actions de l’homme afin qu’ils puissent servir de référence. L’écriture de l’histoire ne se fait pas spontanément. Il faut que l’historien, la personne la mieux habilité à écrire l’histoire, puisse questionner les sources de l’histoire. Ces sources de l’histoire, en particulier de l’histoire contemporaine sont les archives, tous supports et toutes typologies confondus. L’exemple récent qui devrait nous interpeler, est la gestion de la crise sanitaire de la Covid-19 par le Bénin, dont la stratégie mise en œuvre a été reconnue et saluée sur des médias internationaux. Cette stratégie devrait être documentée pour qu’à un moment donné on puisse non seulement capitaliser cette expérience mais aussi garder la preuve ‘’du génie béninois’’ pour la transmettre aux générations futures. A cet effet, il faut que les documents, tout support confondu, produits dans le cadre de la gestion de cette crise et qui permettront de retracer de façon chronologique les décisions et les actions du gouvernement, soient collectés, traités et ensuite conservés suivant les normes, principes et outils propres à l’archivage afin de garantir leur transmission fidèle aux générations futures.
La gestion actuelle des archives au Bénin permet-elle de garantir une société du savoir ?
Le savoir d’une société est pluriel, c’est –à-dire qu’elle doit prendre en compte tous les secteurs d’activité. Malheureusement au Bénin, le métier d’archiviste souffre d’une certaine méconnaissance. S’il est vrai que la situation s’est améliorée ces dix dernières années, nous sommes encore loin de l’idéal en matière de collecte, de traitement, de conservation et de communication de la mémoire nationale. Des domaines semblent encore vierges et c’est préoccupant. Les archives qui retracent les anciennes gloires du sport ou de la musique au Bénin sont-elles disponibles ou accessibles ? Les dispositions sont-elles prises pour que les différentes recherches faites dans nos instituts de recherches soient sauvegardées ? Les différents projets du gouvernement sont-ils documentés ? Autant de questions que le spécialiste en moi se pose. Toute structure, toute organisation, qu’elle soit publique ou privée produit des informations, des documents qui doivent être gérés. Ce qui suppose que dans toute organisation, il doit y avoir un archiviste avec les moyens nécessaires pour exercer sa profession, parce que toute mission, nécessite des moyens. Ceci est un préalable à l’avènement d’une société du savoir.
Propos recueillis par Karim Oscar ANONRIN