Depuis la mort tragique du noir américain George Floyd causée par un policier de son pays, les manifestations fusent de toute part dans le monde, pour réclamer justice pour la victime et exiger que cette cruauté policière ne se répète plus jamais. Pour abonder dans le même sens, des citoyens béninois ont eux aussi décidé en soutien aux peuples noirs martyrisés, victimes d’abus policiers et de racisme aux Etats-Unis et partout ailleurs, d’organiser à Cotonou, une marche de protestation. Mais curieusement et contre toute attente, cette marche pacifique prévue pour hier, jeudi 11 juin 2020 et qui devrait partir de l’Etoile rouge pour échouer au Ministère des affaires étrangères, a fait long feu. Pis, déjà au beau matin d’hier, le lieu de départ de la manifestation a été militarisé par les policiers républicains. Une situation qui a ainsi obligé Emmanuel Sèdegan et les siens, à abandonner leur initiative. Pour motiver ce refus, le Préfet du littoral à travers son secrétaire départemental dans une correspondance adressée aux organisateurs, a estimé que l’autorisation de cette marche pourrait déboucher sur un trouble à l’ordre public. Mais comment ? Difficile de l’expliquer. D’autant plus que cette marche pourtant pacifique ne se dressait pas contre les autorités béninoises ni leurs alliés ou partenaires, il est curieux de penser qu’elle porterait si facilement atteinte à l’ordre public. Si ces marches sont organisées partout et même dans les démocraties plus contrôlées que celle béninoise, pourquoi se déroge-t-on à cette règle au Bénin ? Au-delà de la vexation qu’a engendré ce refus fardé dans l’opinion, les Etats-Unis à travers leur ambassade au Bénin, n’ont pas manqué de s’intéresser indirectement à ce comportement excentrique des autorités béninoises. A cet effet, à travers un communiqué de portée générale posté sur la page Facebook de la Représentation, l’Ambassadeur a félicité toutes les initiatives prises par les citoyens béninois et d’autres pays pour manifester leur désarroi face à des tueries du genre, qui deviennent monnaie courante sur le territoire américain. Ainsi, contrairement aux refus répétés de marches de protestations au Bénin comme celle présentement liée à la mort de George Floyd, le communiqué indique que cette pratique est obsolète au pays de l’oncle Sam. « Tout au long de l’histoire américaine, notre peuple s’est réuni pacifiquement pour exiger de nos dirigeants qu’ils rendent des comptes. Les États-Unis et d’autres sociétés libres et ouvertes sont renforcés lorsque des citoyens libres exercent leurs droits à la liberté d’expression et de réunion, et qu’ils demandent des comptes grâce à la liberté de presse et à l’État de droit », conclu le même communiqué. A travers donc ce message douce et banale, les Etats-Unis prennent au nom de la démocratie, le contre-pied parfait des pratiques très souvent observées au Bénin, surtout avec l’avènement du régime de la Rupture où des lois font des béninois, des prisonniers ambulants. Certes, ce message n’interpelle pas directement les autorités béninoises, mais pour qui sait lire entre les lignes, il est évident qu’elles doivent y trouver pour leur compte. Ce qui n’est rien d’autre qu’une leçon de démocratie qui ne devrait pas manquer avec ce nouveau refus de manifester pacifiquement, d’interpeller implicitement le gouvernement béninois.