Il est un secret de polichinelle que la femme, longtemps considérée comme maillon faible de la société pense désormais impacter le monde de par ses actions. Après l’égalité du genre tant clamé, celles-ci s’adonnent à la pratique des professions d’hommes afin de se démarquer et ceci pour plusieurs mobiles.
Dans le giron des hommes, les femmes mettent les pieds et entrent en compétition. « Je suis dans la mécanique il y a plus de 20 ans y compris mon temps d’apprentissage », témoigne Eloïse Agondjihossou, mécanicienne au centre des œuvres universitaires et sociales de l’Université d’Abomey-Calavi en abrégé Cous-Ac. La soudure, la peinture, la mécanique, l’électricité, la maçonnerie, la conduite d’engin...
Voilà parmi tant d’autres, quelques métiers dits d’hommes mais exercés par les femmes. Rencontrée dans son atelier de soudure à Abomey-Calavi en pleine activité, Alida Azonhè avance : « Mon rêve a toujours été d’être pratiquante d’un métier d’homme. » Selon ses dires, c’est en suivant son père pour se rendre dans l’atelier de soudure qu’est né ce vouloir puis elle s’est totalement donnée en abandonnant les classes en cinquième. Pour Béatrice Sessou, électricienne auto, l’objectif est de se démarquer du lot et prouver la capacité de la femme à se mettre sur le même piédestal que l’homme en matière de rapport de travail.
Les raisons
Si des femmes aujourd’hui s’adonnent à l’exercice de certains métiers d’hommes, une pratique parfois mal perçue dans la société, c’est sans doute pour des raisons précises, propres à elles. La femme s’affiche dorénavant dans la société par son engagement à exercer des professions du genre masculin. « Cela renvoie à l’ancienne organisation sociale qui fait rigoureusement la part des activités en fonction des sexes et même du genre dans son ensemble. L’homme aux travaux de force physique et de grands risques. La femme aux travaux artisanaux et domestiques à moindre risque », explique Michel Victor Dangnon, sociologue.
En effet, si pour les unes c’est la passion de faire des professions dits d’hommes, pour d’autres, c’est plutôt l’idée de prouver la capacité de la femme à faire autant que l’homme et à se démarquer dans la vie professionnelle en particulier et dans la société en générale. En outre, l’engagement des femmes dans des métiers masculins se justifie aussi par le bénéfice que cela peut procurer. Selon le sociologue Victor Dangnon, « cette pratique sociétale laisse percevoir la réalité d’une mutation qui s’opère dans l’organisation traditionnelle des sociétés. Les fondements sont à la fois d’ordre social et économique. Ce dernier, avec la monétisation à outrance de la vie et les besoins nouveaux, a influencé les pratiques originelles. ».
« Elle a été performante » !
Si la passion et la démarcation poussent ces femmes à oublier leur genre dans le choix professionnel, dans l’exercice, une kyrielle d’avantages s’offrent à elles. Ce qui les rend sans doute heureuses et les révèle dans la société. « Le premier avantage pour moi a été mon recrutement par l’État au garage des bus du Cous-AC.
Outre cela j’arrive à subvenir à mes propres besoins et mon foyer vit au dépens », déclare Eloïse Agondjihossou, mécanicienne de profession. De même, Béatrice Sessou, la cinquantaine dit avoir acquis une parcelle et beaucoup d’autres biens matériels à partir des revenus de son travail. Mieux, certaines femmes exerçant dans le secteur d’hommes se disent à l’aise retrouvant ainsi la joie en travaillant.
Et avec la volonté et le dévouement de ces femmes, certains clients du genre masculin affirment leur satisfaction à chaque fois qu’ils sont servis par des femmes.
C’est l’exemple de Florent Kehounde, client, qui exprime sa joie après être servi par une femme dans un domaine d’homme. « Elle a été performante. Et son travail est de qualité » a-t-il expliqué. Mais les discriminations ne manquent pas pour autant. La plupart des femmes rencontrées disent une fois avoir vécu la discrimination basée sur le genre. Et pour clarifier, le sociologue démontre qu’un métier du genre masculin suppose une clientèle masculine et vice-versa.
A l’en croire, beaucoup d’hommes restent sceptiques à ce genre de contacts entre leurs partenaires et les clients de sexe opposé. Tout ceci réduit l’épanouissement social de ces femmes peu bien vues dans leur arène sociale. « Le métier de soudeur nécessite la force. L’autre chose ce sont les blessures lors de l’exécution de certaines tâches » fulmine Azonhe Alida, pointant du doigt ses difficultés d’ordre professionnel. A cela s’ajoute l’interposition des parents ou du conjoint à exercer ce métier qui constitue des entraves pour certaines femmes. Quoiqu’on dise, cette pratique contribue à l’évolution non seulement de la gent féminine mais aussi de la société en générale.
Il est alors important de prendre des dispositions pour encourager le dévouement et la bravoure de ces femmes. « Le regard curieux à l’endroit des femmes pratiquantes de métier d’hommes est normal. Aujourd’hui, la dynamique qui s’opère dans nos sociétés exige que d’autres dimensions soient arpentées afin de répondre aux exigences d’une vie beaucoup plus globale. Il convient alors d’encourager toute initiative positive, d’où qu’elle vienne », suggère le sociologue.
Ferdinand DANGBENON (Stag.)