L’Organisation mondial du commerce a poussé un « ouf » de soulagement, le samedi 7 décembre 2013, en ce qui concerne le programme de développement de Doha, douze ans plus tard. Le paquet de Bali prévu pour la 9ème conférence ministérielle a été adopté après d’intenses concertations et grâce à la maestria du Directeur Général de l’Organisation mondial du commerce, M. Roberto Azevêdo.
L’Organisation mondiale du Commerce (Omc) a enfin adopté le paquet de Bali, le samedi 7 décembre 2013, au lendemain de la fin officielle de la 9ème Conférence prévue du 3 au 6 décembre 2013. Il sonnait 11h27 minutes lorsque le Président de la Conférence ministérielle de Bali, le Ministre du Commerce de l’Indonésie, Gita Wirjawan soumet le paquet de Bali à adoption. Suite au tonnerre d’applaudissements qui a suivi, il déclare : « Il en est ainsi décidé ». Tous les délégués se mettent debout pour continuer d’applaudir. L’instant était solennel. L’Omc venait ainsi d’être sauvée d’une situation embarrassante qui pouvait la plonger dans une décrépitude.
Avant cette heure, de la salive a coulé, des sommeils ont été sacrifiés, des hommes ont travaillé de jours comme de nuit. Mais à la tête de tous, un homme, un expérimenté des arcanes de l’Omc, l’actuel Directeur Général de l’Omc qui a pris service en septembre 2013, M. Roberto Azevêdo, de nationalité brésilienne. Il a redouté, et fortement d’ailleurs, un éventuel échec de la Conférence de Bali. Car depuis douze ans que le programme de développement de Doha a été adopté, les membres de l’Omc n’ont jamais pu adopter un accord véritable sur le dossier. Plusieurs conférences ont échoué sur le dossier.
Mais pour quitter cette léthargie qui commence par entacher l’image de l’organisation, des concertations, des travaux ont eu lieu depuis les douze derniers mois à Genève, avait rappelé le Directeur Général, M. Roberto Azevêdo. Et pour avoir été porté à la tête de l’Omc, c’était pour lui un défi de faire adopter le paquet de Bali par les membres.
Négociations éprouvantes
Malgré le fruit des concertations présenté sous le paquet de Bali, la situation n’a pas du tout été facile pour le Directeur général de l’Omc à Bali. Cette grande rencontre a frôlé l’échec. Les différentes déclarations positives de la première journée de la 9ème conférence ont caché certaines divergences qui ont failli inscrire Bali sur la liste rouge des pays qui ont connu l’échec sur le cycle de développement de Doha.
Mais c’est ne pas compter avec l’expérience et la dextérité de M. Roberto Azévèdo qui a mis à œuvre toutes ses qualités de négociateur. Il a donné du temps au temps pour aboutir au résultat qui hisse son mandat sous de bons auspices.
Au lendemain de l’ouverture de la conférence, le 4 décembre 2013, une question de subvention des stocks alimentaires défendue par l’Inde au nom des pays pauvres a été citée comme celle qui pouvait faire échouer la conférence. Le Ministre indien du Commerce, Anand Sharma est allé jusqu’à déclarer qu’ « il vaut mieux pas d’accord à Bali qu’un mauvais accord ». Même tard dans la journée de jeudi 5 décembre, ce sujet était âprement discuté.
Longue nuit et la délivrance
La journée du 6 décembre a été laborieuse et s’est poursuivie sans pause pour plusieurs délégations. La clôture prévue pour 15h n’a pas eu lieu.
Finalement, les membres ont convenu de mettre en place un mécanisme provisoire et de négocier un accord pour une solution permanente concernant la question de la détention de stocks publics à des fins de sécurité alimentaire pour son adoption dans quatre à la onzième conférence de l’Omc.
Mais ce pas franchi, c’était illusoire de penser que l’épreuve de nerfs était terminée. Dans la soirée du 6 décembre, il a été annoncé sur la même question que les pays Alba, une alliance qui comprend le Cuba, la Bolivie et le Venezuela, ont adopté une position plus radicale pour réclamer une souplesse en faveur des pays ayant des programmes de stocks alimentaires. Le refus de donner la parole au Cuba à un moment donné pour exprimer sa position a cristallisé la situation. Jusqu’au vendredi 6 décembre, jour de clôture de la conférence, le bout du tunnel n’était pas trouvé. L’ambiance s’est alourdie. Les délégations allaient et venaient dans tous les sens. Des coalitions se font et se défont. Depuis 11h30, le Chargé de communication de l’Omc, M. Keith Rockwell a réuni les journalistes. Il a précisé que le Directeur Général poursuit les consultations, mais le consensus n’a pas encore été obtenu. Il a ajouté que le directeur général a par ailleurs invité les ministres à poursuivre sans désemparer les consultations pour que Bali soit un succès.
A 20h45, les tableaux d’affichage annoncent : « Le draft de la déclaration de Bali est disponible sur le site ». Les journalistes se ruent sur les ordinateurs dans la salle de presse pour consulter le document de 29 pages. Mais il était difficile de comprendre grand-chose du contenu.
A 21h, les délégations descendent de l’étage. Certains ont le sourire, d’aucuns échangeaient entre eux, pendant que d’autres ne pipaient mots. Dès l’apparition du ministre indien du commerce, tout le monde se rue sur lui estimant que la solution était trouvée. « Avez-vous finalement raccroché ? », il réplique : « avez-vous lu le document ? Allez le lire d’abord et vous comprendrez » Il a poursuivi en déclarant : « Il est bien dit que rien n’est définitif jusqu’à la onzième conférence ». Le Groupe Africain se retrouve dans une salle pour faire le point et proposer des amendements. D’autres groupes se sont aussi retrouvés. A Zéro heure, toutes les délégations sont remontées à l’étage pour les discussions avec les responsables de la Conférence dont le Président de la conférence et le Dg de l’Omc. Quelques minutes après, les délégations descendent. Le Dg est en concertation avec d’autres. La plénière est reportée. Il a été précisé que les délégations seront appelées. A peine les différentes délégations ont rejoint leurs hôtels, le message leur parvient les invitant pour 4h30. A cette aube, la ballade des véhicules dans la ville ressemble à l’activité journalière. A 4h15mn, la plupart des délégations sont revenues sur les lieux. Mais à peine ont-elles franchi la salle de plénière qu’on les renvoie pour la plénière à 10h.
Finalement, le samedi 7 décembre 2013 à 10heures, la plénière a repris. Après les échanges, à 10h50, le Président de la conférence a invité à la parole ceux qui avaient encore quelque chose à ajouter. Tour à tour, la Bolivie, le Nicaragua, l’Equateur, le Vénézuela ont pris la parole pour féliciter la transparence qui a conduit les débats. La Chine a suivi, de même qu’un représentant des organisations de la société civile. C’est alors que le Président de la Conférence, le Ministre indonésien du Commerce a déclaré que la réunion est à présent close. Il a alors donné lecture de la déclaration de Bali pour ensuite inviter les délégués à l’adopter. « Il en est ainsi décidé ». Voilà la délivrance qui est intervenue à 11h27mn, le samedi 7 décembre 2013. Dans son discours final, le Directeur Général de l’Omc, M. Roberto Azevêdo, qui venait de réaliser un exploit, a emprunté une phrase à l’icône africain qui s’est éteint le 5 décembre 2013, Nelson Mandela : « Cela semble toujours impossible jusqu’à ce qu’on l’ait fait ». « Nous avons fait ce que nous devons faire ici ». Il a salué et félicité tout le monde pour cet accouchement certes difficile, mais qui est l’illustration de ce que l’Omc, selon lui, doit être. Mais pour lui, la course n’est pas terminée, car il faut terminer le cycle de Doha. Les délégations se sont retirées à partir de 11h46mn après les salutations d’usage au présidium. Le Conseil général de l’Omc a reçu mandat pour les consultations en vue de choisir le lieu de la 10ème conférence qui aura lieu en 2015.
Guy Constant Ehoumi