Accusés de viol et complicité de viol, trois hommes ont comparu, mercredi 5 août dernier, devant le Tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey-Calavi, statuant en matière criminelle. Au terme du procès, les nommés Clément Fongnikin et Thibaut Makponfa ont été reconnus coupables de viol et ont pris 10 ans de réclusion criminelle. Poursuivi pour complicité de viol, le nommé Omer Aïdohouedo sera finalement acquitté alors qu’il aura déjà passé plus de 3 ans en prison.
Le quinzième dossier au rôle de la session criminelle du Tribunal d’Abomey-Calavi a porté sur une affaire de viol et de complicité de viol qui a fait comparaître les nommés Clément Fongnikin, Thibaut Makponfa et Omer Aïdohouedo. Les deux premiers ont pris 10 ans de prison et le dernier a été innocenté. Pour leur défense, les accusés font savoir qu’ils sont adeptes de Oro et que c’était à l’occasion d’une sortie du fétiche. Comme on le sait, les femmes sont interdites de croiser ce fétiche. La bande avait donc pour rôle de baliser le chemin et au besoin, d’éviter aux femmes cette rencontre qui peut se révéler douloureuse et dangereuse pour elles. Mais finalement, c’est la bande qui s’est avérée dangereuse et nuisible pour la jeune M. H., élève âgée de 22 ans qui a été violée, vers six heures du matin alors qu’elle se rendait au cours. Les enquêtes ont permis d’interpeller des membres de la bande, notamment les sieurs Clément Fongnikin, Thibaut Makponfa et Omer Aïdohouedo. Une enquête a été ouverte et le juge du deuxième cabinet a, à l’issue de l’instruction, ordonné la mise en accusation devant le tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey-Calavi statuant en matière criminelle des nommés Clément Fongnikin et Thibaut Makponfa pour les faits de viol, et de Omer Aïdohouedo pour complicité de viol. A la barre, les deux accusés de viol n’ont pas nié les faits. Clément Fongnikin et Thibaut Makponfa disent n’avoir rien prémédité et avoir commis les faits sous l’influence de l’alcool. Face au tribunal, Omer Aïdohouedo assure n’être pas resté sur les lieux pendant que les autres violaient la fille. Il dit ne pas se reconnaître dans les faits de complicité de viol. Mais au dire de la victime, Omer était bien là. « Il a dit aux autres que ce qu’ils sont en train de faire n’est pas bon… Les autres lui ont dit que s’il n’était pas d’accord, il pouvait partir… Je reconnais que Omer ne m’a pas touchée…», a déclaré la victime. Elle dit avoir surmonté ce traumatisme avec l’aide de son mari et de ses parents même si elle a dû abandonner les cours sur recommandation de son homme. Mais la victime dit ne pas vouloir se constituer partie civile au procès.Tout en respectant ce choix de la victime, l’avocate commise pour les intérêts civils a suggéré au tribunal d’infliger une peine exemplaire aux coupables. Pour elle, les faits sont commis avec des circonstances aggravantes, notamment par une association de délinquants qui sont aussi coupables de coups et blessures. « Vous avez en face de vous des délinquants, de caractère violent, insensibles à la douleur des autres… Ils ont posé des actes d’une froideur déconcertante et d’une atrocité inimaginable… Ils étaient assis et ils prenaient de l’alcool quand ils ont aperçu leur proie, contrairement à ce qu’ils disent sur une quelconque sortie de fétiche… Le fétiche Oro ne prône pas la violence, il prône la paix et la sécurité. Et ce fétiche vénère la femme. Les agresseurs ont simplement abusé de la fille malgré ses supplications. Les éléments au dossier sont clairs.», va laisser entendre l’avocate des intérêts civils.
Clémence !
Prenant ses réquisitions, le ministère public a relevé que les faits de viol sont constants et les personnes mises en accusation ont reconnu les avoir commis. Pour le représentant des intérêts de la société, les faits sont assez odieux et les circonstances évoquées par les agresseurs (consommation d’alcool, sortie de fétiche) n’enlèvent rien à la gravité des actes. C’est pourquoi il a invité le tribunal à reconnaître les nommés Clément Fongnikin et Thibaut Makponfa coupables des faits de viol et à les condamner à 30 ans de réclusion criminelle. Quant au nommé Omer Aïdohouedo, le ministère public dénote qu’il n’est pas resté constant dans ses déclarations et même si la fille abusée reconnait qu’il ne l’a pas touchée, il est évident que le nommé Omer Aïdohouedo n’a pas porté assistance à la victime en danger. Le ministère public a alors suggéré au tribunal de requalifier les faits de complicité de viol en non-assistance à personne en danger et de condamner le nommé Omer Aïdohouedo à deux mois de prison. Sans chercher à rejeter les faits, le conseil du nommé Thibaut Makponfa, accusé de viol, a plaidé pour que le tribunal tienne compte des remords sincères et de la collaboration de son client à toutes les étapes de la procédure. « La victime a dit avoir pardonné, avoir oublié le passé. Quoique les faits soient graves, vous constaterez que l’ordre public est apaisé. Et si l’ordre public s’est calmé, vous trouverez le moyen d’être clément », a déclaré le conseil de l’accusé avant d’entonner un chant de miséricorde. Le conseil de Clément Fongnikin, accusé de viol, ira dans le même sens que son collègue. Il indique que les examens faits sur son client, montrent qu’il était particulièrement un accroc de l’alcool. C’est pourquoi il a plaidé pour que le tribunal tienne compte aussi des circonstances. Relevant et saluant la clémence de la victime, il a invité le tribunal à faire autant.
Quant au conseil du nommé Omer Aïdohouedo, accusé de complicité de viol, il rappelle qu’est complice la personne qui par influence, par ordre, par assistance ou par aide, a contribué à la commission des faits. Il fait savoir que dans le cas d’espèce, il n’y a pas d’actes probants concluant à une complicité de viol. S’agissant de la requalification des faits par le ministère public en non-assistance à personne en danger, le conseil du nommé Omer
Aïdohouedo rappelle que la victime elle-même a soutenu que son client a intercédé pour elle en demandant aux agresseurs d’arrêter ce qu’ils font. Il précise que sur les faits de non-assistance à personne en danger, la loi stipule que c’est quand l’on refuse de porter assistance alors qu’il n’y a pas de risque pour soi-même. « Mon client a fait ce qu’il pouvait, il pouvait faire davantage mais il risquait aussi sa vie», va ajouter le conseil de Omer Aïdohouedo avant de demander au tribunal de reconnaitre que l’infraction de non-assistance n’est pas non plus établie et de relaxer purement et simplement son client. Dans son verdict, le tribunal est allé dans le sens de la défense, faisant preuve de clémence. Après en avoir délibéré, le tribunal a reconnu les nommés Clément Fongnikin et Thibaut Makponfa coupables de viol. Ils ont pris chacun 10 ans de réclusion criminelle. Quant à Omer Aïdohouedo, il a été purement et simplement acquitté. Il recouvre sa liberté après trois ans en prison?
Les faits
Courant janvier 2017, notamment le mardi 10 janvier, aux environs de 6 heures, alors qu’elle rentrait chez elle afin de s’apprêter pour les cours de sept heures, la nommée M. H., élève en âge de 22 ans, a été agressée par un groupe de sept jeunes parmi lesquels figurent les nommés Clément Fongnikin, Thibaut Makponfa et Omer Aïdohouedo. Ceux-ci ont administré des gifles à la fille, couvert son visage avec une étoffe, bâillonné sa bouche avec leurs mains et l’ont menacée de mort au cas où elle ne garderait pas le silence. Ensuite, les agresseurs ont déshabillé la fille de force, l’ont projetée par terre et ont entretenu à tour de rôle des rapports sexuels avec elle. A la fin, ils lui ont arraché son téléphone portable de marque Infinix et son porte-monnaie contenant une somme de 35 000 F Cfa, avant de la laisser rentrer chez elle. Une fois rentrée, elle informa aussitôt sa colocataire des faits et porta plainte contre ses agresseurs. De la bande, seuls les nommés Clément Fongnikin, Thibaut Makponfa et Omer Aïdohouedo ont pu être appréhendés, interpellés et inculpés de viol. Le juge du deuxième cabinet a, à l’issue de l’instruction, ordonné la mise en accusation devant le tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey-Calavi statuant en matière criminelle des nommés Clément Fongnikin et Thibaut Makponfa pour les faits de viol, et de Omer Aïdohouedo pour complicité de viol.
Composition du Tribunal
Président : Essowé Battamoussi
Assesseurs :
Guy Honga,
Médard Gandonou,
Serge Hounnouvi,
Blanche Adonon
Ministère public : Aubert Kodjo
Greffier : Viviane Houssou