11 Août 1995 – 11 Août 2020, un quart de siècle que Yédénou Adjaxwi, le roi du Massègohoun a fait son à Dieu à la scène musicale traditionnelle béninoise. Il est un artiste-compositeur et chanteur en langue gun, originaire d’Avrankou. Il est créateur de plusieurs rythmes et pratiques artistiques diversifiés et atypiques parfois. Découvrez l’artiste et l’origine du nom ‘’Adjaxwi’’.
Né vers 1930 à Avrankou, et issu du quartier Latchè Houèzounmè, Yédénou Adjahoui, de son vrai nom Gbehonnon Medje Kougblénou Akodogbo Yédénou, est le benjamin d’une famille de trois enfants dont Kougblénou Vodounnonga est le père et Monnondé Ahizon, la mère. Le nom “Adjahoui” vient de ‘‘Ajaxwi’’, mot Gun qui désigne le tamis, instrument formé d’un cadre dont le fond est un treillis en tissu ou en métal qui sert à séparer les éléments d’un mélange. Cet outil fabriqué de façon artisanal, fait de tôle perforée de trous très fins est un ustensile de cuisine, utilisé dans la fabrication de l’akassa. Adjahoui fut un enfant beaucoup plus absorbé par le jeu qu’il oublie la nourriture. Très tôt le matin, il quittait la maison pour aller jouer et y consacra presque toute la journée. En tant que bonne mère et dans le souci de nourrir un enfant aussi turbulent, la mère d’Adjahoui utilise «ajaxwi » spécialement pour y conserver sa nourriture avant d’aller vaquer à ses occupations. Celui-ci s’habitue à aller y chercher du retour de jeu, son repas. C’était devenu pour lui un réflexe. Connu de tous que sa nourriture se trouve dans ce petit objet, le nom de cet objet lui est attribué par la famille. D’où le surnom Adjahoui.
La formation et le parcours professionnel de l’artiste
Adjahoui a commencé à manifester sa passion pour la musique traditionnelle, très tôt dès l’âge de 12ans. Il n’est pas le premier à chanter dans la famille. Dranvodoun Amandékpo, du vrai nom Kouglenou Tankpinou, l’aîné de la famille également, régalait déjà le public avec des morceaux très agréables à écouter au rythme de ‘‘jԐgbe’’. On dit de l’ancien gardien du Ceg Avrankou, que c’est lui qui a initié et a laissé la main à son jeune frère Yédénou Adjahoui. En effet, lors de ses sorties musicales, il était accompagné du jeune Adjahoui qui avait une voix extraordinaire. C’est à la faveur de cette voix qu’Adjahoui exécute les chants que Dranvodun lui composait. Il doit en effet son entrée et sa réussite spectaculaire dans le monde musical à son grand père qui participa de près ou de loin à sa formation en lui achetant des castagnettes, gong et quelques instruments musicaux dès la manifestation des prémices de chanteur, à Malanhoui Aglinkomè. Il consacrait alors la plupart de son temps libre à s’exercer aux chants et à la danse sans se fatiguer. De plus, il faut remarquer qu’Adjahoui a été le plus grand danseur de houngan. De par son agilité à exécuter des danses acrobatiques et sa force de démonstration mystique, il était en partenariat avec le groupe de ‘‘Hungangbo’’ de Gouhouè à Ouanho. C’est là qu’il s’initie à la fabrication des meubles ‘‘salon Avocè ’’ ou ‘‘Avocèjan’’. Précurseur du rythme jègbé, masԑ-gohun, il fait également hungangbo, joglisohun, agbalԑ et zinli. Il adopta enfin masԑ akéhun, rythme atypique dont lui seul détient les secrets, pour les prestations en live. Dès 1953, la carrière musicale de Yédénou commença de façon éclatante avec les studios « Albarika store » à Lagos au Nigeria. Adjahoui a connu une ascension remarquable grâce à des morceaux tels « Vodungbo asisɔɛ̀ », « Tégbésu », « Therésa » « gbèmanhouefidé » et autres. Le nom de l’artiste retentit au-delà des frontières nationales. C’est un succès à nulle pareille qui le propulse au sommet de la musique traditionnelle béninoise.
Outre la musique, Adjahoui est un véritable artisan. Il fabrique avec soin, des meubles à base de nervure de raphia, communément appelés « Salon Avocè » ce qu’il a appris à Gouhouè. Cette forme d’art lui valut le nom de ‘‘Jannon’’ dont l’appellent affectueusement les membres de sa famille. Il a également mené l’activité d’extraction du vin de palme de raphia (odԐtan). Aussi, son habileté faisait-il de lui le meilleur grimpeur de palmier quand il travaillait pour le chef canton Kèkè Adjignon. En dehors de tout cela, Adjahoui est un tradi-thérapeute réputé ayant créé une église de “fa” appelé ” Fa Church” toujours animée jusqu’à nos jours. En ce qui concerne sa vie matrimoniale, il est difficile, voire impossible de dénombrer avec exactitude le nombre d’épouses qu’il avait. Selon les estimations, l’artiste aurait épousé officiellement 16 femmes avec 46 progénitures vivantes avant sa mort.