L’Assemblée nationale reste au cœur des différentes mutations politiques connues par le Bénin depuis les indépendances. La légende se poursuit avec de belles pages après 16 législatures de 1960 à ce jour.
Le Bénin est actuellement à sa huitième législature de l’ère du renouveau démocratique mais à sa seizième si l’on remonte à la première expérience parlementaire béninoise après la période coloniale qui a pris fin en 1957.
Les archives de l’Assemblée nationale renseignent qu’avant l’actuel président du parlement, Louis Vlavonou, le Bénin aura vu se succéder au perchoir douze présidents. Justin Ahomadégbé reste le premier président de l’institution parlementaire de la période post-coloniale. En effet, l’ex-Dahomey fera ses premières armes à partir de 1959 avec la Constitution du 28 février 1959. Cette Constitution fait suite à la proclamation le 4 décembre 1958 de la République du Dahomey dans le cadre de la Communauté franco-africaine. Les élections législatives, les premières de la période post-coloniale, ont été organisées le 2 avril 1959 sur la base de cette loi fondamentale. C’était un scrutin majoritaire à un tour. Justin Ahomadégbé sera porté à l’unanimité à la tête de cette Assemblée législative le 23 avril 1959. Il était d’ailleurs le seul candidat au poste de président et fut ainsi le premier président de l’Assemblée nationale au Bénin.
Les 1er et 2e vice-présidents étaient respectivement Salomon Biokou et Arouna Mama. Le poste de questeur était occupé par Benoît Cakpo-Chichi avec Jean-Baptiste Kayossi, Chabi Mama, Edmond Dossou-Yovo et Bertin Borna comme secrétaires. Ce bureau a eu la lourde mission de conduire les destinées du jeune Parlement jusqu’au lendemain de l’indépendance le 1er août 1960. Mais l’histoire renseigne que les rapports conflictuels entre le gouvernement d’alors et l’Assemblée législative vont tôt faire d’écourter la durée de vie de cette première expérience parlementaire. L’Assemblée élective va disparaître à la faveur de l’adoption d’une nouvelle Constitution, celle du 26 novembre 1960. A l’aune de cette loi fondamentale, l’ex-République du Dahomey va opter pour un autre modèle de Parlement dit Assemblée nationale dont les membres portent le titre de député. L’appellation « Député » n’a pas changé jusqu’à aujourd’hui. Les élections législatives ont lieu le 11 décembre 1960. L’Assemblée nationale qui en est issue ouvre solennellement sa première session le 15 décembre 1960. Les députés étaient élus pour un mandat de cinq ans. Cette première législature se caractérise par un monolithisme dû au fait que cette Assemblée est constituée exclusivement des députés du Rdd de Hubert Maga et du Prd de Sourou Migan Apithy, regroupés au sein du Parti démocratique de l’Unité (Pdu), informent les archives du Parlement. Le bureau de cette première législature de la période des indépendances a été mis en place le 17 décembre 1960. Il sera présidé par Valentin Djibodé Akplogan qui succède ainsi à Justin Ahomadégbé. Le député Salomon Biokou garde son fauteuil de premier vice-président. Le poste de 2e vice-président était revenu à Chabi Mama.
Sani Agata et Abdou Somba étaient respectivement questeur et questeur adjoint. Le secrétariat de ce bureau était tenu par Aladji Boni et Gilbert Chodaton.
« Parlement d’exception »
Tout comme l’Assemblée législative, cette deuxième Assemblée nationale de l’histoire politique du Bénin n’ira pas non plus à son terme. Le Parlement va disparaître après 34 mois de fonctionnement. L’affaire dite «affaire Bohiki » qui éclabousse un député va paralyser le Parlement et même les autres institutions du pays. Cette deuxième expérience parlementaire n’a pas pu résister aux tumultes nés de l’affaire «Bohiki ». Le Bénin va enregistrer son premier coup d’Etat qui a vu le colonel Christophe Soglo, alors chef d’état-major, porté au pouvoir. Celui-ci dissout sans autre forme de procès toutes les institutions de la République dont l’Assemblée nationale. La vie parlementaire va connaître une sorte d’hibernation de 1963 à janvier 1964. L’armée assume tous les pouvoirs y compris celui législatif. Les militaires font rédiger une nouvelle Constitution promulguée le 11 janvier 1964, renseignent les archives du Parlement. Laquelle rétablit l’institution parlementaire. Cette loi fondamentale va ouvrir la voie de la troisième expérience législative de 1964-1965. De nouvelles élections législatives seront organisées le 19 janvier 1964. Le bureau de ce Parlement sera formé le 24 janvier 1964 avec comme président le député Taïrou Congakou. Il est aidé dans sa mission par ses collègues Gilbert Kpakpo, Salomon Biokou et Issaka Dango élus respectivement 1er, 2e, et 3e vice-présidents. Prosper Azadji et Roger Lafia occupaient les postes de questeur et de questeur adjoint. Les députés Jean Pliya, Mohamed Batoko et Emmanuel Fanyo assuraient le secrétariat. Cette troisième expérience parlementaire n’ira pas non plus à son terme. Les dissensions entre les hommes politiques amènent l’armée à prendre à nouveau le pouvoir le 22 décembre 1965. Le colonel Chistophe Soglo revient et dissout à nouveau toutes les institutions de la République puis gouverne le pays par ordonnance. Toutes les lois seront prises donc par ordonnance de 1965 jusqu’au 26 octobre 1972, où les militaires géraient le pays selon leur bon vouloir. Le directoire militaire passe le relai en mai 1970 au Conseil présidentiel. Lequel dispose d’un gouvernement, mais pas d’un Parlement. Le 26 octobre 1972, l’armée revient à la charge. Les militaires reprennent le pouvoir avec à leur tête, le commandant Mathieu Kérékou. Ils installent un régime révolutionnaire avec le Conseil national de la Révolution (Cnr). L’essentiel des pouvoirs y compris législatif est exercé par le Cnr présidé par Mathieu Kérékou. Ce dernier dirige ainsi ce « Parlement d’exception » composé de 69 membres. Outre le président de la République, président du Conseil, donc président de cette Assemblée d’exception, ce parlement comprenait également les 33 ministres d’alors, les six préfets de province, les 12 responsables des conseils provinciaux de la Révolution, et 17 cadres civils politiciens et paramilitaires. Une nouvelle assemblée nationale sera mise en place à la faveur de la Constitution votée par le régime révolutionnaire. Cette loi fixe à quatre ans la durée de chaque législature de l’Assemblée nationale révolutionnaire (Anr).
Et de trois pour Romain Vilon Guézo !
Ainsi, la première législature de l’Anr, l’organe suprême du pouvoir d’Etat de l’ex-République populaire du Bénin,sera dirigée par le camarade Ignace Boco Adjo. Elle est composée de 336 commissaires du peuple qui font office de députés. Romain Vilon Guézo, Amidou Baba-Moussa, Valentine Gangbo, Amadou Mama Djougou, Justin Gnidéhou, Nathalie Barboza, Ali Assani, Pierre Osho et Louis Baïmey Dagan occupaient dans l’ordre les neuf postes de vice-présidents. Taofiki Maliki était le secrétaire général. Mais cette législature a été secouée de plein fouet par la mort de son président. En effet, le 17 octobre 1982, Ignace Boco Adjo meurt à la Havane à Cuba. Romain Vilon Guézo assure l’intérim jusqu’à la fin du mandat en 1984 en sa qualité de 1er vice-président. Il sera reconduit au perchoir à la deuxième législature de l’Anr. Le mandat a duré du 27 juillet 1984 au 28 février 1989. Les autres membres du bureau sont Roger Imorou Garba, Joseph Dègla et Pierre Osho respectivement 1er, 2e et 3e vice-présidents. Ousmane Batoko en était le secrétaire général. Romain Vilon Guézo sera réélu le 1er août 1989 président de l’Assemblée nationale révolutionnaire, troisième mandature. Cette législature a été installée le 31 juillet 1989 suite aux législatives pour l’élection des commissaires du peuple organisées le 18 juin de la même année. Roger Imorou Garba et Joseph Dègla étaient les deux autres membres du bureau léger composé de trois personnes. Ils étaient respectivement 1er et 2e vice-présidents. Ces élections législatives se sont déroulées dans une ambiance tendue, signe avant-coureur de la décadence au sein du système révolutionnaire. Ainsi, le peuple et surtout les travailleurs de l’administration publique accentuent la pression sur le régime du président Mathieu Kérékou avec des grèves perlées. La pression de la rue a conduit à la tenue les 6 et 7 décembre 1989 d’une réunion conjointe de tous les organes du Prpb et de l’Etat. Le requiem du régime révolutionnaire et de l’idéologie marxiste-léniniste sera acté. La réunion des barons du Prpb décide, entre autres, de l’organisation de la Conférence nationale des Forces vives pour éviter le chaos au pays et promouvoir la démocratie. Une nouvelle expérience va débuter pour le Parlement, la doyenne des institutions du Bénin. Ainsi, au lendemain de la Conférence nationale de février 1990, il a été mis en place le Haut conseil de la République (Hcr) qui fera à la fois office d’Assemblée nationale de transition et de Cour constitutionnelle. Le Hcr a été présidé par Mgr Isidore de Souza qui d’ailleurs a conduit les travaux de la Conférence nationale. Joseph Adjignon Kèkè en était le vice-président. Le mandat du Hcr a duré du 28 février 1990 au 31 mars 1991. Le Hcr dote le pays d’une loi constitutionnelle transitoire. Il s’agit de la loi n° 90-022 du 13 août 1990.
Vive le Parlement démocratique !
Un projet de Constitution est élaboré sous la direction de Maurice Ahanhanzo-Glèlè. Ce projet est soumis à un référendum. Le dimanche 2 décembre1990, le peuple béninois l’approuve à une grande majorité de « Oui ». La nouvelle Constitution, la sixième du Bénin depuis la période post-coloniale, sera promulguée le 11 décembre 1990. Elle ouvre ainsi la voie à la sixième expérience législative. Cette première législature du renouveau démocratique a été installée le lundi 1er avril 1991, à l’issue des législatives de février 1991. Elle est composée de 64 membres avec un mandat de quatre ans. Me Adrien Houngbédji a été élu pour présider aux destinées de ce Parlement. Bruno Amoussou et Séverin Adjovi étaient respectivement les 1er et 2e vice-présidents. Les postes de 1er questeur et de 2e questeur étaient revenus à Gédéon Dassoundo et Ramatou Baba-Moussa tandis que les fonctions de 1er et 2e secrétaire parlementaires étaient assurées par Ambroise Adanklounon et Jérôme Sacca Kina.
Bruno Amoussou sera ensuite élu président de l’Assemblée nationale, deuxième législature installée après les élections législatives de février 1995. Ces consultations électorales font passer le nombre de députés de 64 à 83 députés. Les postes de 1er et 2e vice-présidents sont revenus à Joseph Marcellin Dégbé et Théophile Nata. Maxime Houédjissin et Ambroise Adanklounon en étaient les deux questeurs avec Djibril Mama Débourou et Alexandre Hountondji respectivement 1er et 2e secrétaires parlementaires.
La deuxième législature va céder place à la troisième dont les députés ont été élus à l’issue des législatives de mars 1999. Cette législature élit son bureau le 29 avril 1999. Lequel bureau consacre le retour au perchoir de Me Adrien Houngbédji avec Sacca Lafia et Aurélien Houessou aux postes de 1er et 2e vice-présidents. Maxime Houedjissin est maintenu à son poste de 1er questeur et Eléazar Nahum est le 2e questeur. Orou Gabé OrouSégo et Codjo Atchodé étaient respectivement les 1er et 2e secrétaires parlementaires.
Poursuivant son petit bonhomme de chemin, l’Assemblée nationale post-conférence nationale verra installée la quatrième législature suite aux élections de mars 2003. Antoine Kolawolé Idji sera porté président succédant ainsi à Me Adrien Houngbédji. Le député du Madep aura comme 1er et 2e vice-présidents Léon Bio Bigou et Eustache Akpovi. Patrice Gangnito et Jean-Claude Hounkponou étaient les deux questeurs. Codjo Atchodé devient le 1er secrétaire parlementaire et André Dassoundo le 2e secrétaire parlementaire.
Les législatures ne se ressemblent pas
C’est sous cette législature qu’a été adopté le Code des personnes et de la famille encore en vigueur. La quatrième législature aura été marquée par la modernisation de l’institution parlementaire à travers la mise en place du réseau informatique avec connexion internet du palais des gouverneurs et du secrétariat général, la construction de la salle polyvalente et le démarrage de la construction du bâtiment abritant actuellement les installations de la radio Hémicycle, renseignent les archives du Parlement. C’est sous cette quatrième législature qu’a eu lieu la première tentative de révision de la Constitution du 11 décembre 1990.
Elle va céder place à la cinquième suite aux législatives de mars 2007. Celle-ci élit son bureau le 3 mai 2007 avec Mathurin Coffi Nago comme président ; André Dassoundo comme 1er vice-président; Antoine Dayori, 2e vice-président, Sacca Fikara, 1er questeur et Djibril Mama Débourou : 2e questeur. Les députés Joachim Dahissiho et Amissétou Affo Djobo occupaient respectivement les postes de 1er et de 2e secrétaires parlementaires.
Mathurin Nago sera reconduit à la tête de la sixième législature installée en avril 2011 à l’issue des élections législatives du même mois. Il était entouré de Justin Sagui Yotto et de Boniface Yèhouétomé aux postes de premier et deuxième secrétaire parlementaire. Djibril Mama Débourou est propulsé 1er questeur avec sa collègue Françoise Assogba comme 2e questeur puis Valentin Houdé qui succède à celle-ci après sa nomination au gouvernement. Claudine Prudencio et André A. Okounlola étaient les 1er et 2e secrétaires parlementaires. Cette sixième législature aura marqué les esprits avec le vote de plus de 120 lois dans tous les domaines de la vie sociopolitique et économique du Bénin.
La septième législature a consacré l’élection au perchoir pour la troisième fois de Me Adrien Houngbédji. Cette législature a été installée le 16 mai 2015 après les législatives d’avril de la même année. Le président du Prd avait en face de lui Komi Koutché, le poulain du pouvoir d’alors. Le score du vote était très serré : 42 voix pour Me Adrien Houngbédji contre 41 pour Komi Koutché. Cette élection sur le fil du rasoir de Me Adrien Houngbédji a relancé l’Opposition d’alors qui reprend du poil de la bête. Cette dynamique politique au Parlement a, dans une certaine mesure,favorisé l’alternance au pouvoir en avril 2016 avec l’élection du président Patrice Talon.
La légende se poursuit actuellement avec la huitième législature installée en mai 2019. Celle-ci écrit de belles pages de son histoire sous le leadership de son président Louis Vlavonou. Cette législature taxée de «monocolore » parce que ne comportant que les députés de la Mouvance présidentielle, a déjà à son actif en moins d’un an et demi d’existence, plusieurs dizaines de lois votées. L’un des exploits qu’elle a réussis reste la révision de la Constitution du 11 décembre 1990 après sept tentatives manquées. La huitième législature poursuit son mandat jusqu’en mai 2023.