Par un décret, le président de la République vient de drastiquement réduire les pouvoirs de la Cour supérieure des comptes. C’est cette institution qui avait établi que tous les gouvernements qui se sont succédé en Haïti entre 2008 et 2016 avait très mal géré et parfois même détourné les près de deux milliards de dollars du fonds Petrocaribe. Jovenel Moïse lui-même avait été indexé par l’audit de la Cour supérieure pour avoir été au cœur d’un « stratagème de détournement de fonds » avant sa prise de fonction.
Les avis que la Cour des comptes aura à rendre sur la gestion des finances publiques ne seront plus contraignants mais seulement consultatifs. Tel en a décidé le président avec ce décret, rendu public seulement samedi soir alors qu’il avait été signé par Jovenel Moïse et ses ministres en date du 9 septembre.
Pourquoi a-t-il fallu deux mois pour que le document soit publié au journal officiel, cela n’est pas expliqué mais la portée du décret, elle, est limpide : les juges de la Cour se voient retirer tout pouvoir quant à l’analyse des dépenses publiques car, par ailleurs, leurs avis, non coercitif donc, devront désormais nécessairement être rendus sous un délai de trois à cinq jours ouvrables.
Le pouvoir exécutif justifie cette décision en considérant que toute « lenteur injustifiée dans la passation des contrats (…) est préjudiciable au développement socio-économique du pays ».
Mais les militants de la société civile considèrent eux que ce musèlement de la cour des comptes est un nouveau coup porté à la lutte contre la corruption. Déjà que le Parlement n’est plus fonctionnel depuis janvier, l’affaiblissement de cette institution judiciaire renforce encore davantage le pouvoir exécutif.