Le conflit qui oppose, depuis début novembre, le gouvernement du premier ministre, Abiy Ahmed, au Front de libération des peuples du Tigré (Tplf), est de plus en plus violent. L’Onu et ses agences humanitaires tirent la sonnette d’alarme face à l’escalade de violence qui inclurait un crime de guerre. Tous craignent devoir gérer un conflit prolongé qui affecterait l’ensemble de la Corne de l’Afrique.
Second pays le plus peuplé d’Afrique avec 110 millions d’habitants, l’Ethiopie connaît une aggravation des tensions, existantes depuis des mois, entre le gouvernement fédéral et la région du Tigré. L’attaque présumée de bases de l’armée éthiopienne au Tigré a provoqué, sur ordre d’Addis-Abeba, l’assaut par l’armée de la province située au nord du pays où l’Erythrée voisine a massé des troupes à la frontière.
Inquiétude des agences humanitaires
Les Nations Unies sont dans l’incapacité de porter assistance à plus de deux millions de gens qui ont besoin d’aide humanitaire dans la région, y compris un demi-million de personnes en situation d’insécurité alimentaire. S’ajoutent 200 000 déplacés internes et plus de 100 000 réfugiés en provenance d’Erythrée, tous basés dans le Tigré. Le Haut-Commissariat chargé des réfugiés (Hcr) est très préoccupé par la situation car 14 500 Ethiopiens, dont 50 %
d’enfants, ont déjà passé la frontière pour se mettre à l’abri au Soudan voisin dont la capacité d’absorption est très limitée. L’Onu est très inquiète que le conflit poursuive son escalade car près de 9 millions de personnes pourraient en subir les conséquences.
Mise en garde
La Haut-Commissaire des droits de l’Homme, Michelle Bachelet, a partagé sa très vive préoccupation au sujet de la détérioration alarmante de la situation dans la région du Tigré. Elle met en garde les autorités éthiopiennes et les responsables du Front de libération des peuples du Tigré (Tplf) au regard de la poursuite des hostilités qui pourraient devenir incontrôlables, provoquer des destructions, entrainer des déplacements massifs à l’intérieur du pays et au-delà de ses frontières.
Possible crime de guerre
Selon l’Ong Amnesty International, des centaines de personnes ont été tuées à coups de couteaux et de machettes dans la nuit du 9 novembre dans la ville de Mai-Kadra, au sud-ouest du Tigré.Des témoins oculaires ont déclaré que les partisans du Tplf étaient responsables du massacre. Actuellement coupée du monde, toutes les informations fournies ne peuvent être valablement confirmées. Michelle Bachelet, chef des droits de l’homme, a déclaré qu’au cas où les faits étaient avérés, ils constitueraient un crime de guerre. Elle appelle à l’établissement d’une enquête indépendante.
Corne de l’Afrique
De nombreux experts craignent qu’une guerre civile embrase le pays, où les 9 différentes régions luttent déjà pour obtenir plus d’autonomie ou menacent de faire sécession.Les États voisins, tels que le Soudan, le Sud Soudan et l’Érythrée voisine de la région concernée sont très nerveux.Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres s’est dit «profondément alarmé par la situation» au Tigré, soulignant que «la stabilité de l’Ethiopie est importante pour l’ensemble de la Corne de l’Afrique».
Catherine Fiankan-Bokonga (Correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève (Suisse)