La geste politique de TYBO, pour être comprise, doit être considérée du point de vue de la psychologie de son héros. La politique a beau être une action à incidence collective, ses acteurs ne laissent pas d’être des individus, qui ont une histoire, une psyché, des motivations, des désirs et des frustrations. Pour comprendre la geste de Hitler depuis sa prise de pouvoir par un coup de force politique en 1933 jusqu’à son suicide en 1945, en passant par la guerre et les horreurs dont la moindre n’est pas le génocide des minorités ethniques ou morales, il faut sans aucun doute prendre en compte l’histoire personnelle de cet Autrichien d’origine devenu par la force des choses et par la force brute le Führer du Troisième Reich. . De même, et toutes proportions gardées, pour comprendre le drame collectif qui se joue au Nimbé depuis 1006 et dont M. TYBO est l’acteur principal, on ne peut sous-estimer la dimension psychologique de l’homme, ni balayer d’un revers de main la somme des idiosyncrasies de ses acteurs.
Telle est la profondeur de la blessure complexuelle de la personnalité de TYBO que, pour en guérir, il est obligé de faire montre d’une volonté de puissance sans commune mesure. Ainsi, le complexe d’infériorité est refoulé sous les actes délirants de violence, d’acharnement contre des ennemis imaginaires ou nécessaires.
Ce complexe s’exprime aussi dans le désir d’être au centre de l’attention ou de l’intérêt collectif en permanence. Il va juste qu’à un désir de déification auquel les délires religieux prêtent un semblant de légitimation sinon par la comparaison avec Dieu du moins par l’auto-proclamation comme messie. Enfin, d’un point de vue purement sociologique, il se traduit par la bonne volonté sociologique du simple docteur en économie qui n’a dégotté ce titre douteux que pour l’exhiber urbi et orbi, en faire un étalage ronflant. Cette ostentation intellectuelle est le propre de ceux qui, ayant eu un doctorat, ne résistent pas au désir idiot de se faire appeler Docteur, désignation expressément réservée aux médecins.
. Face à cet édifice complexuel d’une immensité inénarrable, la solution pour TYBO réside dans la compensation. Compenser le manque social et intellectuel en se faisant appeler « docteur », tout simplement parce qu’on a eu un doctorat ; compensation socioprofessionnelle en devenant Président de la DOAB ; compensation politique en devenant Président de la République. Dans tous les cas, peu importe que la réalité de l’objet de sa magnification soit effective : peu importe que la DOAB soit une banque digne de ce nom ; que les transactions financières de toute l’Afrique soit inférieures à 3% du volume mondial ; peu importe que son doctorat soit écrit par lui-même ou un autre, ou bien sa pertinence ou son originalité ; peu importe enfin que le Nimbé soit une république bananière ou non, peu lui chaut : dans tous les cas, il suffit que TYBO soit appelé « docteur », « président de la DOAB », « président de la république du Nimbé ». Cela suffit à nourrir ses désirs de grandeur.
Qu’on le veuille ou non, et en dépit des proclamations de désintéressement de la part des intéressés, la politique engage toujours une part de narcissisme. Ce n’est pas pour rien que dans l’antiquité elle s’opposait au foyer et était le fait des hommes libres, c’est-à-dire dégagés des nécessités, et qui se reconnaissaient entre eux. Dans le cas de TYBO, nous avons affaire à une recherche maladive de compensation de l’image de soi. Le métier politique n’était pas son souci — loin s’en faut — mais le fait d’être président de la république. Sinon, à l’instar des vrais hommes politiques concernés par la vie de la cité, il se serait fait maire, conseiller ou député. Mais, on n’a jamais entendu son nom ni vu sa présence dans ses lieux et domaines de la vie politique proprement dite. L’homme est passé de la Présidence de la DOAB à la Présidence de la république du Nimbé, dans une telle acrobatie de la volonté de compensation que son seul point d’appui paraît avoir été le mot Président. Et, avant de devenir président, pendant les 10 ans qu’a duré son séjour au GOTO, il a eu largement le temps d’intérioriser les contours de son rêve, d’embobiner le film de son odyssée présidentielle. Il l’a fait au contact du dictateur EYASS dont il a intériorisé les manies, les manières et les manigances les plus infâmes ; il l’a fait en élisant dans le théâtre intérieur de sa psyché des personnages clés, des actes, des parcours et des faits incontournables, des passages obligés élevés à un niveau de paradigme de l’action présidentielle.
Si bien qu’une fois devenu président, M. TYBO n’a de cesse de dérouler la bobine de son film du rêve présidentiel. Passionnément, et avec un entêtement qui n’a d’égal que sa volonté de compensation, il se met en devoir de réaliser ce qu’il avait intériorisé, point par point et dans les moindres détails.
Pourquoi TYBO voyage-t-il sans arrêt au risque de ruiner un petit pays comme le Nimbé ? Eh bien, parce que, 10 ans, 20 ans plus tôt, quand il embobinait son film du président de la république, il avait capté qu’un président c’est un homme dont la grandeur réside dans les voyages officiels ; un homme que d’autres présidents considérables accueillent avec des tapis rouges. Aller au-devant d’autres chefs d’État, saisir la moindre occasion pour leur rendre visite, échanger des poignées de main avec les grands de ce monde au titre du fait qu’on est Président d’une république, que peut rêver de mieux un homme affligé d’une si furieuse volonté de compensation ? C’est pour cela que d’une manière impudique, et au risque de ruiner le pays, TYBO passe le plus clair de son temps à voyager, pour rappeler au monde et à lui-même qu’il est Président de la République, des fois que le monde se piquerait de l’oublier. C’est aussi pour cela que M. TYBO s’est bagarré comme le diable, a vidé les caisses de l’État pour acheter (car le Président de la République reste banquier dans l’âme) toutes sortes de consciences au sommet de l’État afin de se perpétuer par un holdup de triste mémoire qui est aussi un coup de poignard dans le dos de la démocratie.
De même, dans l’intimité profonde de sa geste présidentielle, TYBO a intériorisé qu’un président digne de ce nom doit subir des tentatives d’assassinats, de coup d’état, ou d’élimination auxquelles naturellement par sa force suprême, son intelligence, et ses pouvoirs occultes, il se doit d’échapper. Des militaires haut gradés doivent organiser des complots auxquels il échapperait héroïquement ou qu’il déjouerait de justesse. De même, à l’instar d’EYASS, ce serait bon qu’il sortît indemne d’un "accident d’avion".
C’est ainsi qu’on peut expliquer les coups fumants de soi-disant attaques du cortège présidentiel à Ouèssè, à la veille des élections législatives de 1006. De même au lendemain du hold-up électoral de 1011, sa guerre fratricide avec son mécène et ami cotonnier, M. PAT LONTA, tombé en disgrâce et accusé de tentative d’empoisonnement. Accusations grotesques, absurdes, qui dégradent l’image du Nimbé à l’extérieur mais dont l’originalité est aux yeux de son concepteur un élément d’attrait fantastique pour la qualité d’une geste présidentielle digne de ce nom.
Et, aux dernières nouvelles, il est question d’une tentative de coup d’état militaire cette fois-ci où sont impliqués un commandant de gendarmerie et d’autres civiles dont un expert-comptable qui a le tort d’être un cousin de M. LONTA. Car telle est aussi la mégalomanie compensatoire et tyrannique de M. TYBO que tout le monde dans le pays doit être ou ses amis ou ses ennemis ; et que tout ami de son ennemi est son ennemi.
TYBO a vu que sous Kirikou un Ministre accusé d’adultère avec la femme du président a été tué ; accusations grotesques qui a terni l’image du Nimbé d’alors. Et pourtant les Nimbéois ainsi insultés dans leur intelligence et dans leur honneur ne lui en ont pas voulu.
TYBO a vu que Kirikou est responsable de la mort ou de la torture de dizaines de nos compatriotes qui ne luttaient que pour la démocratie et la liberté dans notre pays ; et aujourd’hui non seulement le pays ne lui en demande pas les comptes mais il se trouve même des gens futés qui poussent le cynisme au point de vouloir ériger un monument à sa gloire.
Dans la fureur compensatoire qui le pousse à agir, sa notoriété, sa reconnaissance, sa satisfaction personnelle priment sur tout. Le désir de reconnaissance de M. TYBO est si fort qu’il ne recule pas devant la tentation de le satisfaire dans l’infamie, l’abjection, les crimes, le désordre et les attentats répétés contre la vie démocratique. Car ce qui obsède M. TYBO c’est l’accomplissement de soi devant l’histoire. L’érection de sa propre statue, l’homologation par l’histoire de la magnificence de sa geste présidentielle. S’il ne peut l’obtenir en réalisant l’émergence du Nimbé promise en 1006, TYBO est tout aussi prêt à l’obtenir par l’immersion du Nimbé dans la boue, l’opprobre, la misère et la ruine du rêve démocratique des Nimbéois.
Que faire ?
Continuer de prier pour le Nimbé !!!!
Bien qu’inspirée en partie de faits réels, les personnages et situation décrits dans cette analyse sont purement fictifs