La Zone économique spéciale de Glo-Djigbé augure d’une transformation profonde du tissu industriel béninois. Sa mise en œuvre devrait mettre sur orbite l’agrobusiness avec l’installation d’un parc moderne de promotion des chaînes de valeur : coton, karité, soja, cajou, ananas, etc.
Faire du Bénin un hub industriel pour assurer la transformation des produits agricoles, notamment le cajou, le coton, le karité, l’ananas, le soja. Tel est l’objectif visé à travers l’initiative des Zones économiques spéciales (Zes) en général et celle de Glo-Djigbé en particulier, afin de capter davantage la plus-value de ces chaînes de valeur.
La remise du site, vendredi 5 février dernier, au groupe Arise IIP qui se chargera, ensemble avec la Société d’investissements et de promotion de l’industrie (Sipi-Bénin), d’aménager, de développer et d’exploiter la Zes, lance le processus devant aboutir à l’industrialisation et au changement de paradigme au niveau de la structure de l’économie nationale.
L’espérance est d’autant forte que la transformation des produits agricoles reste depuis des lustres le talon d’Achille de l’agro-industrie béninoise, pendant que la production et les rendements ne cessent de croître d’année en année.
La situation dans l’industrie textile est symptomatique du faible niveau de transformation, alors que la production de coton a atteint le record de
714 713,5 tonnes lors de la campagne 2019-2020. A l’instar des pays de la sous-région, le Bénin transforme moins de 5 % de sa production, que cela soit de façon artisanale ou industrielle, selon l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa).
Le sous-secteur reste embryonnaire avec des entités telles que la Société des industries textiles du Bénin (Sitex), la Société béninoise de textiles (Sobetex), la Compagnie béninoise des textiles (Cbt) et le Complexe textile du Bénin (Coteb), à l’arrêt pour certaines et tournant au ralenti pour d’autres.
Autres filières, même réalité
Moins de 20 000 tonnes de noix de cajou sont transformées en dérivés sur une production estimée entre 140 000 et 150 000 tonnes de noix de cajou brutes en 2020, soit moins de 15 % de la production, selon les données du projet BeninCajù.
Avec une production avoisinant les 257 000 tonnes pour la campagne 2018-2019, selon le ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche, le soja n’a toujours pas révélé tout son potentiel en termes de transformation qui reste l’apanage de quelques groupements ou d’unités semi-modernes s’adonnant à la fabrication artisanale d’huile, de lait, de fromage.
La fermeture des frontières du Nigeria, premier consommateur de l’ananas frais du Bénin, a révélé la nécessité de transformer et de trouver d’autres débouchés pour les produits, surtout avec l’ambition du gouvernement de passer de 400 000 tonnes environ à 600 000 tonnes de production cette année.
Quant au karité béninois, bien qu’occupant à peine 2 % de la production mondiale, il reste une source non négligeable de devises et un levier de développement de l’agrobusiness du pays, notamment dans l’alimentation et la cosmétique.
La mise en œuvre de la Zes contribuera à inverser la tendance et augmenter les exportations de 5 à 10 milliards de dollars Us et le Pib de 4 à 7 milliards de dollars Us d’ici dix ans, selon les projections de l’Agence pour la promotion des investissements et des exportations (Apiex).
Optimisme
L’effectivité de la Zes sera matérialisée par l’installation de six unités industrielles de transformation de fibre de coton d’une capacité totale de 100 000 tonnes, 29 unités industrielles de confection de vêtements, 14 unités industrielles de transformation de noix de cajou d’une capacité totale de plus de
150 000 tonnes et 10 unités industrielles de tout type, annonce Laurent Gangbès, directeur général de l’Apiex.
Quelque 300 000 à 350 000 emplois seront créés dans cette zone d’ici 2030, notamment 100 000 emplois dans la transformation de noix de cajou et 200 000 à 250 000 emplois dans la filature / tissage du coton et la fabrication de vêtements, ajoute-t-il. Le sous-secteur du bois ne sera pas du reste dans cette transformation de l’agro-industrie du pays qui a contribué à près de 40 % du secteur industriel en 2015 (Données de la direction générale des Affaires économiques – Dgae).
Pour concrétiser les ambitions, il revient de lever les freins qui font que, malgré son fort potentiel, le tissu industriel reste peu performant et dominé par l’informel. Ces contraintes ont pour noms: coût élevé des facteurs de production, faible pouvoir d’investissement des promoteurs, financement inadapté, lourdeur et lenteur administratives, faible niveau de qualification de la main-d’œuvre, les consommateurs enclins aux produits importés au détriment des locaux.