Lundi 15 mars dernier était la Journée internationale du droit des consommateurs. Quelle est la portée de cette Journée? Quel est le champ d’action des associations de défense des consommateurs au Bénin? Ernest Gbaguidi, président de « Bénin santé et survie du consommateur » apporte des réponses à ces préoccupations.
La Nation : Le 15 mars de chaque année marque la Journée internationale du droit des consommateurs. Quel est l’intérêt de cette journée ?
Ernest Gbaguidi : La Journée mondiale des droits des consommateurs permet non seulement de mener des réflexions, mais aussi de mettre l’accent sur le pouvoir des consommateurs et leur droit à un marché équitable, sûr et durable pour tous.
Qu’entend-on par droit des consommateurs et quels sont les droits qui y sont liés ?
La protection des consommateurs peut être perçue comme une question de droits civils ou de droits de l’Homme, le droit pour les consommateurs de s’organiser eux-mêmes, d’avoir accès aux informations, aux services publics (installations sanitaires, électricité, défense…). La protection des consommateurs peut également poursuivre un objectif politique, elle peut être un cadre pour les politiques publiques en faveur du consommateur. D’ailleurs, les lignes directrices des Nations Unies en matière de protection des consommateurs adoptées en 1985 et révisées déjà deux fois, proposent une liste d’objectifs qualifiés de besoins légitimes des consommateurs. On peut évoquer le droit à la défense, à l’information, à la sûreté, à l’éducation du consommateur, le droit de choisir, le droit au recours du consommateur, la liberté de former des groupes de consommateurs, la promotion de types de consommateurs appropriés et de leurs intérêts économiques. Ces différents objectifs ont pour origine, les droits de l’Homme. Le défenseur du consommateur devrait prendre ça en considération et évaluer l’importance de ces objectifs en faveur du consommateur dans son pays.
Les Béninois sont-ils suffisamment informés de votre rôle ou avez-vous le sentiment qu’il reste du chemin à parcourir ?
Au départ, c’était un peu difficile pour le consommateur d’apprécier le rôle que jouent les organisations de défense des consommateurs. Les lignes ont commencé par bouger. Il y a plusieurs secteurs dans lesquels les consommateurs n’hésitent pas à nous solliciter lorsqu’ils sont confrontés à des difficultés. Mais il reste du chemin à faire. Le consommateur même n’a pas conscience de ce que le rôle du défenseur serait encore plus efficace s’il s’y engage aussi, et soutient les associations. Il y a encore à faire au niveau des pouvoirs publics. Les associations de défense des consommateurs continuent d’être perçues comme des syndicalistes alors que nous sommes le prolongement des pouvoirs publics en termes de promotion de la justice économique et sociale. Nous sommes un dispositif d’alerte.
C’est l’Etat qui est garant de la santé et de la sécurité des populations. Lorsqu’il arrive que les populations sont en difficulté, nous alertons les structures régaliennes. Le chemin est encore long. Une mission, des hommes et des moyens, dit-on. L’appui des consommateurs et des pouvoirs publics nous fait défaut. Les gens estiment que l’appui des pouvoirs publics ne nous est pas nécessaire. Les syndicalistes reçoivent les subventions de l’Etat. Ceux-là défendent des catégories d’individus, des groupes professionnels. Mais nous, nous défendons le premier citoyen jusqu’au dernier, dans tous les domaines d’activités, sans aucune subvention. Nous avons observé ces derniers temps notre absence au sein des instances dans lesquelles, nous devons intervenir pour porter la voix des consommateurs. Nous avons l’impression que les pouvoirs publics ne perçoivent pas encore notre rôle. Notre corporation est affiliée à la fédération internationale des consommateurs. Beaucoup de décisions sont prises à ce niveau, qui sont répercutées par nos collègues des autres pays et qui guident certaines propositions à l’échelle nationale. Il nous reste encore du pain sur la planche au Bénin. Le respect de ces directives permet d’accompagner les pouvoirs publics à réduire les questions d’injustice dans les relations contractuelles entre les consommateurs et les opérateurs de services ainsi que les producteurs.
Y a-t-il des plaintes majeures des consommateurs ayant abouti à des acquis suite aux actions de l’association de défense des consommateurs au Bénin ?
Les tarifs n’étaient pas à ce niveau dans le secteur des télécommunications. Nous avons œuvré à l’avènement des tarifs actuels. Nous avons installé avec l’autorité de régulation un mécanisme de règlement des litiges, même s’il demeure encore des points d’achoppement entre les consommateurs et les opérateurs. Beaucoup de décisions ont été prises suite à nos différentes plaintes.
Dans le secteur de l’énergie, un règlement a été pris au niveau de l’Autorité de régulation de l’Electricité (Are), suite à nos plaintes. Je peux vous assurer qu’il n’y aura plus de coupure électrique à la veille d’un week-end. Les coupures d’électricité qui frappent toute une maison parce qu’un colocataire reste devoir à la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee), ne seront non plus en vigueur. Il y a également du mieux dans le raccordement des branchements électriques. Les secteurs de la santé et de l’agroalimentaire sont en train d’être assainis.
Peut-on en déduire que les droits des consommateurs sont de plus en plus respectés et garantis chez nous ?
Tout n’est pas encore rose. C’est un combat permanent. Il faut réviser la loi portant protection des associations des consommateurs avec la prise des décrets d’application. Ce qui permettra à l’Etat de mieux jouer son rôle de régulation des associations de consommateurs. Nous souhaiterions qu’il y ait plusieurs instances de régulation dans différents secteurs. Le Conseil national de l’éducation (Cne) est un pas.