Astérix Goudeagbe, président de l’association des mairies des jeunes du Bénin : « la jeunesse béninoise doit être aujourd’hui une jeunesse de relève et non une jeunesse opportuniste..
L’Association des Mairies des jeunes du Bénin (Amjb) est une association de jeunes dynamiques, soucieux du développement de leur pays le Bénin. Le 06 mars 2021 s’est déroulée l’installation officielle de la seconde mandature des mairies des jeunes du Bénin avec le parrainage du Ministre de la jeunesse, des sports et loisirs Oswald Homeky et Todjinou Deguenon A. Gemma, juriste d’entreprise et professeur certifiée de Droit. A travers cet entretien, Astérix Goudeagbe, président de ladite association nous décline ses ambitions.
Faites-nous une présentation générale de l’Amjb
L’Association des Mairies des Jeunes du Bénin, est une association à caractère social, à but non lucratif et apolitique. Elle a été créée en 2019. C’est une association de jeunes luttant pour le bien de leur communauté sans attendre des retours pécuniaires. L’Amjb est une association école qui forme les jeunes dans les initiatives de prise de décision pour la bonne gouvernance locale à la base et surtout le renforcement des capacités dans le système de la décentralisation en s’appropriant la loi n°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin. Cette association regroupe des jeunes étudiants, fonctionnaires, artisans ou autres dont l’âge est compris entre 18 et 35ans. L’objectif numéro 1 de l’Amjb est d’amener la jeunesse à travailler pour le développement de sa commune. C’est cela qui est à la base de la création des mairies des jeunes dans chaque commune. Ces mairies des jeunes se sont alors regroupées pour former l’Association des Mairies des Jeunes du Bénin(Amjb).
Quel est le fonctionnement de L’Amjb ?
L’Association des Mairies des Jeunes du Bénin(Amjb), comme son nom l’indique est une association qui couvre toutes les communes du Bénin. Nous avons au sein de l’association des représentants de chaque commune dont l’appellation est Maire des Jeunes. Ces représentants forment à leur tour le bureau exécutif de la mairie des jeunes de leurs communes respectives. Il revient maintenant à chaque maire de lancer l’appel à candidature pour la formation des conseillers communaux. Ces conseillers communaux représentent nos élus et les grandes décisions doivent provenir d’eux. Le bureau exécutif de chaque mairie des jeunes doit s’assurer de l’exécution et du pilotage des grandes initiatives. Le bureau national des mairies des jeunes est celui qui est à la tête du système. Il est composé de 17 membres à savoir le président et les vice-présidents, le secrétaire général et le trésorier général ainsi que leurs adjoints respectifs. Et au même moment, nous avons des secrétaires généraux qui sont des représentants de chaque service décentralisé des mairies des jeunes. Par exemple, au sein de la mairie des jeunes de Bohicon, nous avons le chef service de l’environnement. Au sein du bureau national nous avons le secrétaire chargé de l’environnement. Cela voudra dire que tous les chefs services au sein des mairies des jeunes du Bénin se retrouvent dans un creuset et le responsable chargé de piloter les activités concernant le secteur de l’environnement c’est le secrétaire chargé de l’environnement qui est un maire des jeunes. Il est responsabilisé pour discuter des questions de l’environnement au sein du bureau national. L’Amjb suit le même fonctionnement de l’Association Nationale des Communes du Bénin (Ancb) qui est l’organe faîtier des mairies au Bénin. Voilà ce que je peux dire.
C’est-à-dire que L’Amjb est vraiment très organisée avec un système qui travaille à réaliser ses objectifs. Quelles sont les activités que vous menez au sein de L’Amjb ?
Au sein de l’Amjb, nous intervenons dans plusieurs domaines. Nous sommes dans le domaine social, éducatif, dans l’entreprenariat, la participation citoyenne. Pour faire court, nous intervenons sur toutes les plateformes des Odd (Objectifs du Développement Durable) et nous nous appesantissons beaucoup plus sur la formation à la base et le renforcement des capacités dans n’importe quel domaine.
Quelles sont les activités que vous avez menées par le passé ?
Nous avons mené plusieurs activités dans des communes depuis 2018. Principalement, nous avons 53 communes qui sont vraiment impactées par nos activités. Je commence par la commune de Bohicon dont je suis le maire des jeunes. Nous avons organisé plusieurs séances de dépistage d’hépatite. Nous avons formé des jeunes sur les préventions des grossesses en milieu scolaire et sur l’usage des réseaux sociaux pour gagner de l’argent. Nous avons également enseigné aux jeunes comment générer des revenus avec le numérique. Nous avons organisé des formations sur le processus électoral. Nous avons incubé des jeunes dans le domaine de l’entreprenariat à savoir la customisation, la fabrication des perles, des chaussures etc. Nous avons également initié plusieurs activités sportives à travers le projet ‘’La paix sportive’’ que nous avons piloté à Glazoué. C’est un tournoi de football qui a opposé les élus aux jeunes de la commune de Glazoué.
Quel est l’impact de vos activités sur le développement des communes en générale ?
Les jeunes que nous formons sont préparés à prendre la relève. Vous savez que toute nation, toute commune, toute organisation, tout territoire qui n’a pas des jeunes vraiment dévoués à la tâche, des jeunes qui ont la conscience en place, verra les efforts de ses autorités à divers niveaux voués à l’échec. Mais déjà aujourd’hui, ces jeunes prennent des initiatives sans attendre les autorités et travaillent pour le développement de leur commune. A titre d’exemple, la commune d’Adjohoun initie, innove et lance chaque weekend des activités de salubrité. Déjà, le centre de santé d’Akpadahoun la dernière fois, lors de la séance de salubrité a pu tuer deux gros reptiles. Ce qui prouve déjà que, quand nous vivons dans l’insalubrité, cela peut affecter d’une manière ou d’une autre la population. Imaginez que ces reptiles se multiplient. L’impact négatif que cela peut avoir dans cette communauté. Nos jeunes aussi savent qu’il ne faut plus se laisser aux autorités politiques, se faire manipuler à des fins opportunistes. Ils savent aujourd’hui que, d’une manière ou d’une autre, ils peuvent apporter un plus pour le développement de leur communauté. Aujourd’hui, nous voyons les acteurs du projet grand Nokoué qui travaillent pour la propreté de nos différentes maisons. Ces jeunes aujourd’hui sensibilisent des gens pour que le dépôt des produits plastiques soit centralisé dans des poubelles dont nous avons fait don dans plusieurs communes. Voilà un peu ce que ces jeunes peuvent apporter à leurs communes.
Le 06 mars 2021 s’est déroulée à Porto Novo la cérémonie d’installation officielle de la seconde mandature des mairies des jeunes du Bénin. Qu’est- ce que cela symbolise pour vous ?
Cette cérémonie d’installation des maires des jeunes des différentes communes du Bénin est une réussite totale, une satisfaction qui ne dit pas son nom. Cette mandature actuelle est en cours, et il nous faut faire la reconnaissance aux autorités, prouver et montrer réellement à la face du monde que les maires des jeunes existent vraiment dans les communes. Beaucoup n’ont pas l’information de notre existence. Il faut donc qu’on prenne par cette cérémonie d’installation pour qu’ils puissent nous connaître. C’est un sentiment de joie qui nous anime. Cela met en confiance les maires des jeunes qui savent déjà qu’ils doivent s’engager dans les jours à venir pour ne pas décevoir les invités et les autorités.
Quel a été votre parcours pour arriver à ce niveau aujourd’hui ?
Je suis né en 1996. J’ai commencé la vie associative dès la classe de 4ème avec un projet belge qui s’appelle Dba (Défi de la Belgique pour l’Afrique). J’ai été volontaire sur la participation des jeunes pour un milieu éducatif très noble. Ces programmes faisaient venir des volontaires belges et on passait des semaines d’immersion pendant lesquelles nous partagions nos valeurs. De 2008 à 2012, j’ai été sélectionné en tant que responsable formateur pour former des jeunes. De 2012 à 2014 j’ai travaillé avec la Dba. En 2015, j’ai eu mon Bac. J’ai intégré le cercle de réflexion et d’insertion des jeunes de Bohicon où j’ai piloté plusieurs activités. Suite à cela je suis allé à l’université. J’ai quitté Bohicon pour Porto Novo. En première année, j’ai installé l’équipe de football de l’université ; une équipe de football dont j’ai été élu capitaine. Tout cela se passait en 2016. J’ai mis sur pied le club d’art oratoire, ce qui nous a permis de participer au concours Mille Mots Vox 2018. J’étais le vice-champion d’art oratoire. Après cela j’ai été élu président du mouvement Mojeldes Porto Novo. Un mouvement de jeunes qui s’engagent pour le leadership et le développement. Suite à cela, je suis devenu le coordinateur national de l’observatoire des jeunes pour la citoyenneté et la paix. Toujours en 2018, j’ai installé des observateurs et ambassadeurs de paix dans 48 communes du Bénin. La première installation a été faite dans la commune d’Adja-Ouèrè où nous avons installé au moins 100 ambassadeurs de paix. Ils doivent à leur tour former et observer des actions citoyennes dans leurs différentes communes. J’ai été retenu en tant que maire des jeunes de la commune de Bohicon où j’ai commencé cette noble mission. Je profite d’ailleurs pour remercier le Maire de la commune de Bohicon, Rufino D’almeida pour son soutien, son sens de leadership et son accompagnement aux côtés de la jeunesse. Nous avons ensuite pensé à mettre sur pied l’Association des Mairies des Jeunes du Bénin. Un combat qui n’a pas été très facile mais on a su surpasser les obstacles. Et cela grâce au gouvernement des jeunes du Bénin dont j’ai été membre. Le gouvernement des jeunes du Bénin a été pour moi un parcours plein d’expériences. Je remercie le Président Constantin Amoussou pour son leadership et son assistance. De la mairie des jeunes de Bohicon nous avons donc mis sur pied l’Association des Mairies des Jeunes du Bénin(Amjb). Nous organisons plusieurs séminaires des mairies des jeunes du Bénin de Bohicon à Adja-Ouèrè, à Lokossa et cette année ce sera à Parakou. Voilà donc d’une manière restreinte mon parcours. Merci.
En tant que jeune maire de la commune de Bohicon et Président de L’Amjb, quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez dans l’exercice de vos fonctions ?
Notre difficulté majeure c’est qu’il y a la guerre de leadership qui se retrouve parmi les jeunes. Beaucoup de jeunes considèrent que ce titre de maire des jeunes doit leur revenir. Une autre difficulté c’est que plusieurs autorités à divers niveaux nous considèrent comme des menaces. Ils pensent que d’un jour à l’autre on pourrait prendre leur place. Nous avons aussi des difficultés financières. Nous ne sommes pas encore autonomes, il nous faut encore travailler de jour comme de nuit pour pouvoir réellement couvrir nos charges. Car même si c’est une association à caractère social à but non lucratif et apolitique il faut quand même permettre aux membres de couvrir leurs déplacements et leurs besoins primaires pour que l’association puisse prospérer.
Pouvez-vous nous donner une petite idée de vos ambitions pour L’Amjb ?
Mes ambitions n’ont jamais été vouées à l’échec. Quand j’étais plus jeune, je voyais le maire enfant à la télévision. Je me demandais pourquoi pas moi. Mais aujourd’hui je me vois dans une posture où je dépasse encore ce titre. Je remercie Dieu. Mes ambitions sont celles-ci. L’Amjb doit couvrir les 77 communes du Bénin. Amener chaque mairie des jeunes à disposer d’un siège ; mettre chaque maire des jeunes dans une position où il doit être consulté dans les initiatives de prise de décisions. Faire en sorte que les maires des jeunes disposent d’une autonomie financière et que leur indépendance puisse vraiment profiter à la jeunesse de leurs différentes communes. Je pense que nous allons réussir cela d’ici un an. Nous serons l’association Internationale des Mairies des Jeunes. Ce sera encore mon plus grand défi à relever.
Nous constatons que vos ambitions sont très nobles et cela nous motive de savoir qu’il y a des gens qui se battent pour la cause de notre pays. Après tout ceci avez-vous quelques mots à adresser à la jeunesse béninoise ?
La jeunesse béninoise est une jeunesse engagée. La jeunesse béninoise doit s’aligner, pas derrière un homme, mais derrière une vision. La jeunesse béninoise doit être une jeunesse de relève et non une jeunesse opportuniste. On dit toujours qu’on ne peut tisser la nouvelle corde qu’à partir de l’ancienne. L’ancienne corde aujourd’hui est une corde à expérience. Elle doit être crédible. J’exhorte les jeunes à faire preuve de maturité, à faire preuve de conscience. Le combat dans lequel nous nous sommes lancés aujourd’hui a montré à chacun ses limites. C’est à travers ces limites là que nous pouvons constater que nous avons des failles et qu’il faut corriger le tir. J’aimerais les motiver à s’engager à la cause pour laquelle nous sommes là.
Propos recueillis par Anne-Marie B. Amenyito et Ozaldine Agbo