Le Fonds des Nations Unies pour la population (Fnuap) vient de publier un rapport sur le droit des femmes à disposer de leur corps. Dans 57 pays en développement, principalement situés en Afrique subsaharienne, près d’une femme sur deux est privée de décision lorsqu’il s’agit de relations sexuelles, d’accès aux soins de santé ou du recours à la contraception. Les femmes ne disposent que de 75 % des droits légaux des hommes.
Présenté à Genève par la Directrice du bureau suisse du Fnuap, Monica Ferro, le document annuel sur l’état de la population mondiale intitulé: « Mon corps m’appartient », se concentre pour la première fois sur trois questions : les femmes peuvent-elles refuser des relations sexuelles, ont-elles la possibilité de choisir l’utilisation de contraception et ont-elles librement accès aux soins médicaux ?
Bien que l’agence des Nations Unies en charge, entre autres, des questions de santé sexuelle et reproductive, soutient les femmes et les jeunes gens dans plus de 150 pays, le rapport analyse uniquement les données transmises par 57 pays en développement. Ainsi, selon les informations fournies, seules 55 % des femmes, de l’ensemble des Etats étudiés, peuvent décider pleinement dans les trois domaines mentionnés. Dans certains pays, cette proportion ne représente qu’une femme sur 10 environ. Il est aussi frappant de constater que les femmes sont plus nombreuses à pouvoir prendre des décisions concernant l’utilisation de la contraception mais moins nombreuses à pouvoir dire non aux relations sexuelles. Seulement 56 % des pays étudiés disposent de lois et de politiques complètes en matière d’éducation sexuelle.
Alors qu’en Amérique latine, dans les Caraïbes, en Asie de l’Est et du Sud-Est, environ 75 % des femmes ont leur droit à l’autonomie corporelle respecté, en Afrique centrale et occidentale, ce chiffre est inférieur à 40 %. Dans l’ensemble de l’Afrique subsaharienne, moins d’une femme sur deux (48 %) a l’autonomie de prendre ces décisions. Selon l’étude, au Mali, au Niger et au Sénégal, la capacité de prendre des décisions sur leur corps est reconnue par moins de 10 % des femmes. En Angola, 62 % des femmes ont l’autonomie de prendre des décisions sur les trois questions analysées, un chiffre qui tombe à 49 % au Mozambique, à 46 % à São Tomé-et-Príncipe.
Le rapport recense 20 pays qui ont établi des lois permettant à un violeur de se marier avec sa victime afin d’échapper à des poursuites judiciaires et 43 Etats n’ont pas de législation sur les viols entre conjoints. Plus de 30 pays imposent des restrictions aux mouvements des femmes hors de leur domicile.
Lors du Sommet de Nairobi, les gouvernements se sont engagés à accélérer les actions en vue d’atteindre l’objectif des « trois zéros » à l’horizon 2030: zéro mortalité maternelle, zéro besoin non satisfait en matière de contraception et zéro violence sexuelle basée sur le genre, y compris s’agissant des pratiques néfastes. En 2020, si l’utilisation des moyens de contraception modernes avait plus que doublé depuis 1994, 217 millions de femmes dans le monde n’avaient pas accès au contrôle des naissances. En matière de mutilation génitale féminine, le nombre a baissé dans les pays où la pratique est courante mais 4 millions de filles étaient encore victimes de cette pratique. Idem pour le mariage précoce qui recule, pourtant, environ 12 millions de petites filles étaient mariées la même année.
Malgré les garanties constitutionnelles en matière d’égalité des sexes qui existent dans de nombreux pays, en moyenne, les femmes ne disposent que de 75 % des droits légaux des hommes à travers le monde. Les femmes n’ont souvent pas le pouvoir de contester ces disparités en raison de leur faible niveau de participation à la vie politique et aux autres formes de prise de décisions.
Par Catherine Fiankan-Bokonga, Correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève (Suisse)