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Didier Hubert Madafimè, expert en environnement: « La restauration de la terre doit être un principe sacré »

Publié le jeudi 22 avril 2021  |  La Nation
Atelier
© aCotonou.com par DA
Atelier d`échanges des professionnels des médias sur les crises sanitaires avec pour thème : l`exercice des métiers de presse en période de CoviD-19
Cotonou, le 15 octobre 2020, maison des médias ‘’ Thomas MEGNASSAN. A l`initiative de l`Union des Professionnels des médias du Bénin (UPMB) avec pour partenaire l’Union EUropéenne, il est organisé un atelier d`échanges sur la pratique des métiers de la presse (journalisme, graphisme, photojournalisme, réalisation, caricature...) en temps de crises sanitaires notamment de la Covid-19.
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Par Maryse ASSOGBADJO,

Ce 22 avril, le monde entier voue un certain respect à la terre. A défaut d’une célébration discrète et sporadique, les hommes devraient plutôt vénérer cette ressource naturelle à l’instar des dieux, car ils y puisent l’essentiel de leur vie terrestre et y retournent encore à leur mort. C’est le point de vue que défend Didier Hubert Madafimè, expert en environnement, à l’occasion de la Journée mondiale de la terre. Il dénonce les comportements dégradants de l’homme envers la terre et indique des pistes pour sa restauration.


La Nation : La communauté internationale célèbre, ce jeudi 22 avril, la Journée mondiale de la terre. Quelle importance revêt cette journée ?

Didier Hubert Madafimè : De toutes les célébrations, la Journée mondiale de la terre devrait être la plus importante. La terre représente toute notre vie. Sans elle, point d’activité agricole. Tous les écosystèmes reposent sur elle. Nous retournons à la terre après notre passage terrestre. Malheureusement, on observe peu d’intérêt autour de cette ressource naturelle. Lorsque nous tombons malade, nous nous rendons à l’hôpital pour recevoir des soins, par contre quand la terre est malade, personne ne la soigne. Cette journée passe discrètement alors qu’on devrait saisir l’occasion pour sensibiliser les populations à l’utilisation des techniques qui la protègent, comme les plantes fertilisantes.

Comment sait-on que la terre devient malade ?

Les maladies de la terre sautent à l’œil. En temps normal, elle doit répondre à un certain nombre de critères. Elle ne doit pas être dégradée. Dans le cadre des productions agricoles, on doit éviter les produits chimiques qui l’altèrent. On tire l’essentiel de la terre, mais on ne lui accorde aucun respect. Tous les jours, nous devons vénérer la terre.

Voulez-vous dire qu’il faut vénérer la terre comme un dieu ?

La terre est un dieu. L’humanité vit sur la terre. Et toutes nos activités gravitent autour d’elle.

La terre est aujourd’hui menacée, du fait des pressions anthropiques. Au même moment, on la qualifie de ressource nourricière ? Comment peut-on comprendre ce contraste ?

Le contraste est né de la poussée démographique à l’échelle mondiale. Il est question aujourd’hui de nourrir plusieurs bouches. A partir de cet instant, les hommes ont commencé par en faire une utilisation exagérée, car pour augmenter les rendements agricoles, il fallait lui apporter des nutriments. D’où la naissance des problèmes que l’homme a créés à cette ressource naturelle.
A force de couper tous les arbres dans le cadre des plantations, on expose la terre aux aléas climatiques. Or, les changements climatiques sont des facteurs aggravants. On peut produire sur de petits espaces et augmenter le rendement. Lorsque la terre sur laquelle le paysan cultive devient infertile, il quitte cette terre pour occuper un autre espace, laissant sa première ressource de production au gré des aléas.
Du nord au sud, des terres sont à la fois moyennement et fortement dégradées. L’effort qui doit accompagner cette dégradation ne suit pas. Nous ne sommes pas un pays désertique, mais nous avons déjà commencé par ressentir les effets du désert, étant donné que nos terres subissent également des dégradations et que nous sommes à proximité des pays désertiques.
Il y a trop d’exagération de l’homme sur la terre. Au Sommet de Rio en 1992, plusieurs conventions ont été ratifiées sur le changement climatique, la biodiversité et l’environnement. Mais les lignes n’ont pas vraiment bougé. Chaque pays gère la terre comme il l’entend. Il existe des techniques pour sauver la terre, mais qui sont peu expérimentées. Il n’existe pas une politique de sauvegarde ou de restauration de la terre.

La Journée mondiale de la terre est à sa 50e édition cette année. Faudra-t-il encore peut-être 50 ans voire 100 ans avant que l’homme ne prenne conscience des préjudices qu’il fait subir à la terre ?

Si nous ne revoyons pas nos comportements vis-à-vis de la terre, nous risquons de manquer d’espace pour vivre un jour. Chaque pays devrait revoir sa politique de conservation de la terre. Après la ratification des trois conventions que j’ai évoquées plus haut, les pays européens ont refusé de mettre en place la Convention sur la dégradation des terres. Aujourd’hui, les nations investissent beaucoup dans les préoccupations liées au changement climatique, parce qu’elles savent que les effets n’épargnent aucun pays. La biodiversité est préservée ailleurs en vue de mieux faire face aux maladies émergentes. La dégradation des terres concerne notamment l’Afrique et l’Asie. L’Afrique peine à mettre en place les outils pour faire avancer les problèmes liés à la terre.

Doit-on comprendre que les bonnes pratiques tardent à faire école en Afrique ?

Au Burkina Faso par exemple, la technique du ‘’Zaï’’ est privilégiée par les paysans. Il s’agit d’une pratique ancestrale dans ce pays. Les paysans font des poquets dans lesquels ils mettent des déchets de telle sorte que l’intérieur de ces poquets est toujours humide même en saison sèche. Ces paysans allient les pratiques ancestrales et modernes pour en tirer le meilleur de leurs productions agricoles. Cette technique exige beaucoup d’efforts mais elle permet de sauver la terre, en produisant sur un espace réduit et d’avoir un rendement élevé.
Dans notre pays, quelques Ong apprennent aux paysans cette technique. Les paysans préfèrent utiliser les engrais pour rapidement sauver leurs cultures. Or, les engrais qu’ils utilisent, détruisent la terre au bout d’un temps. Ce qui explique le nomadisme des paysans lors des plantations. Si rien n’est fait pour renverser la tendance, l’humanité court à sa perte. Le désert va s’installer partout.

Quelles actions fortes les pays peuvent-ils mettre en place pour redonner vie à la terre ?

La restauration de la terre doit être un principe sacré. Il faut redonner vie à toutes les terres dégradées. A la Cop22 au Maroc, des Ong ont manifesté leur volonté à soutenir le Bénin dans cet élan. Il est possible de sauver les terres dégradées. Il suffit juste d’avoir la volonté.
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