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Invasion des produits étrangers au Bénin : Les boissons togolaises concurrencent les béninoises sur leur marché

Publié le lundi 17 mai 2021  |  24 heures au Bénin
Contrebande
© Autre presse par DR
Contrebande de Bière
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Le constat est amer. Le marché béninois est inondé par les boissons étrangères de toute qualité. Les plus remarquables sont les boissons de la firme ‘’Brasserie du Bénin (BB)’’ du Togo. Les boissons de cette firme, sont prisées par les Béninois au point où on se demande si c’est la qualité de celles produites par la Société Béninoise de Brasserie (SOBEBRA) qui pose problème ou si c’est la douane qui ne fait pas bien son travail en laissant les boissons togolaises traverser les frontières.

Par un soleil de plomb cet après-midi du mercredi 5 mai 2021, des amis et moi-même avions décidé d’aller prendre un pot dans un bar, dont nous taisons le nom, à Comé. Et pendant que nous nous désaltérons avec nos bières ‘’La Béninoise’’, un monsieur entra dans le bar et, visiblement, très assoiffé. ‘’Serveuse, apporte moi un Pils togolais bien frais, je dis bien Pils togolais hein. Ou bien vous n’en avez pas ?’’, lança-t-il à la serveuse qui s’est empressée de lui répondre pas l’affirmatif.

Cette scène anodine a attiré notre attention car ce n’est pas la première fois que nous avons surpris une telle exigence de la part des clients dans un bar. Nous avons alors décidé de cerner tout le contour de ce phénomène qui, à coup sûr, a de répercussion sur l’économie béninoise. Et quand nous nous sommes rapproché de lui pour mieux comprendre, sa réponse a été sans appel. ‘’Les boissons béninoises ne sont pas bien dosées (taux d’alcool). La Béninoise par exemple, c’est comme de l’eau plate. En plus de cela, le Pils qu’on fabrique au Bénin est pratiquement sans alcool. Au-delà de tout ceci, les gens contre-façonnent les boissons de la SOBEBRA. Ce qu’ils n’arrivent pas encore à faire avec les boissons togolaises. Alors, il vaut mieux prendre ce dont on est sûr de la qualité que de prendre de n’importe quoi’’, laisse entendre, André Koffi, un jeune consommateur de 40 ans habitant à Comé.

La réaction de ce consommateur béninois vient corroborer les propos d’un tenancier de bar que nous avons rencontré, plus tard à Aného au Togo. ‘’Vous ne verrez aucune boisson béninoise ici. Mais nos boissons sont prisées par les Béninois. Ils sont nombreux à traverser la frontière juste pour venir boire ici au Togo. Nos boissons sont de meilleure qualité et de plus, nos douaniers ne laisseront jamais les boissons béninoises envahir notre territoire.’’, fait remarquer un gérant de bar à Aného.

Dans les propos de Assion, il faut retenir deux choses : la fierté des Togolais à consommer leurs boissons et le rôle important joué par leur douane pour réguler le marché togolais en matière de traversée des boissons béninoises. Quid du côté béninois ?
Le manque du patriotisme économique des Béninois

Il n’y a pas d’offre si la demande n’existe pas. C’est la loi du commerce. Ainsi donc, si les boissons togolaises envahissent le territoire béninois, c’est que la demande existe et est forte. Et ceci doit faire appel au patriotisme des Béninois. Mais pour se donner une certaine conscience, on se cache sous des raisons à la limite fantaisistes. ‘’C’est parce que toutes les boissons de la SOBEBRA sont contrefaits que moi je préfère les boissons togolaises’’, fait savoir Jean-Claude Dossou, un consommateur résident à Lokossa dans le Mono. Mais pour le directeur départemental de l’industrie et du commerce, Bernard Ehoun, c’est le manque de patriotisme économique qui pousse les béninois à préférer ces boissons aux produits de la SOBEBRA. Il va plus loin pour dire que même ce qui est constaté dans le Mono et le Couffo n’a rien de comparable avec ce qui se passe dans l’Ouémé par exemple avec la consommation de la boisson togolaise ‘’La Racine’’. Ça coule comme de petits pains dira-t-il. En effet, partout au Bénin, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, on trouve des boissons togolaises.

Et en croire le directeur Ehoun, les causes de ce constat sont imputable non seulement aux services de l’Etat, mais aussi aux consommateurs qui doivent à tout prix cultiver le patriotisme économique. Ce qui va amener les Béninois à plus aimer les boissons produites sur leur territoire.

Défaillances au niveau de la douane

Mais au-delà de cet aspect de patriotisme, il se pose un grand problème de contrôle douanier. Et pour cause, comment se fait le contrôle douanier pour que les produits togolais inondent le marché béninois ? Toute la question est là. Et toutes nos démarches vers la direction départementale des douanes du Mono-Couffo pour rencontrer la directrice afin de mieux comprendre la situation ont été vaines. Mais nos recoupements ont permis de découvrir qu’il y a des failles dans le contrôle douanier. Et comme l’a confié un opérateur économique détenant l’agrément dans la distribution des produits de SOBEBRA, qui a requis l’anonymat, les douaniers ne font que le dédouanement et ne se penchent généralement pas sur la qualité de celui qui importe les produits. ‘’Si vous le voulez, vous pouvez faire l’expérience vous-même et aller à Hilla-Condji. On vous prend juste le prix des produits que vous avez et on ne se soucie pas de savoir si vous êtes agréé à importer ces produits ou pas’’, a-t-il déclaré. Ainsi, les produits togolais inondent le marché béninois par n’importe qui. Les boissons togolaises traversent les frontières en toute quiétude. Mais selon le directeur départemental de l’industrie et du Commerce, Bernard Ehoun, il faudra ajouter à cela, la porosité des frontières qui offre aux contrebandiers des possibilités énormes de déjouer tout système de contrôle. ‘’C’est au niveau du cordon douanier que se situe le vrai problème. C’est au niveau des entrées que les boissons devraient être refoulées. Mais il se pose le problème de multiplicité des entrées. Pour le Mono seul, on dénombre une vingtaine d’entrées. Quand on ferme une, les citoyens trouvent la possibilité de passer par une autre’’, déplore le directeur départemental du commerce. Cet état de chose ne facilite pas la tâche aux douaniers non plus. Il importe donc que des solutions soient trouvées pour permettre aux entreprises de brasseries du Bénin de jouir des fruits de leur investissement.

Sauver la SOBEBRA et l’économie béninoise

‘’Nous devons protéger nos entreprises nationales parce que ce sont elles qui donnent de l’emploi à nos populations. Et dans le cadre de la lutte contre les produits frauduleusement importés, notre direction lutte contre ces produits à travers la loi 2016 portant organisation de la concurrence en République du Bénin qui punit de façon globale l’importation frauduleuse’’, a déclaré Bernard Ehoun. Mais cette lutte bute contre de grosses pierres car l’environnement n’est pas totalement favorable. Le directeur départemental du commerce déclare que ‘’nous avons pu mener une lutte implacable contre les boissons nigérianes et cela a porté parce qu’aucune société béninoise n’a eu l’agrément d’importation de ces boissons. Et donc, dès qu’on voit les casiers de boissons du Nigéria, on procède systématiquement à la saisie. Malheureusement, il y a des sociétés qui ont l’agrément d’importation des boissons togolaises. Et cela nous rend la tâche très difficile pour le contrôle.’’
Il va s’en dire que pour préserver l’économie béninoise, l’Etat doit retirer l’agrément d’importation aux sociétés en question et en compensation, leur donner le monopole des produits de la SOBEBRA. Le cas échéant, et avec l’engouement des Béninois eux-mêmes à consommer ces boissons, c’est l’économie béninoise qui prend un grand coup. Evidemment, aucune étude sérieuse n’est encore menée pour mieux situer sur les pertes qu’enregistre le Bénin avec l’envahissement des boissons togolaises sur le territoire béninois.
Toujours est-il qu’entre les défaillances de la douane et les exigences des consommateurs, le Bénin perd énormément de devise et ceci fragilise les sociétés de brasserie implantées au Bénin.

Cokou Romain COKOU
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