Les chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), au cours d’un sommet régional extraordinaire, dimanche 30 mai dernier à Accra, ont décidé de suspendre le Mali des organes de l’institution. Le dernier putsch intervenu dans ce pays et mettant à mal la transition en cours n’est pas apprécié. A cette rencontre, le président de la République du Bénin s’est fait représenter par le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération. C’est d’ailleurs lui, de retour au pays qui a présenté, ce mardi 1er juin, au cours d’une conférence de presse, l’essentiel à retenir de ce conclave de haut niveau sur le Mali.
Les discussions, dimanche dernier au Ghana, entre les chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et leurs représentants se sont tenues dans une approche plus radicale et réaliste. Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Aurélien Agbénonci, qui y représentait le président Patrice Talon a dévoilé au cours d’une conférence de presse à son cabinet, l’essentiel à retenir des échanges, mais aussi la position du chef de l’Etat sur la question malienne. Face au principe de la rigueur et de l’application des sanctions de la Cedeao, les participants à ce sommet extraordinaire imposé par un deuxième renversement au sommet de l’Etat malien, ont opté pour la survie de l’Etat. Le dilemme était manifeste entre le bâton et la carotte et la décision n’a pas été facile à prendre, explique le patron de la diplomatie béninoise. Les chefs d’État et de gouvernement
« condamnent fermement le récent coup d’État (…) et, après de longues discussions (…) décident de suspendre le Mali», indique le communiqué final rendu public à l’issue du sommet.
« Le sommet a délibéré et les chefs d’Etat ainsi que les chefs de gouvernement ont réaffirmé l’importance et la nécessité de restituer la démocratie », a soutenu le ministre Aurélien Agbénonci au cours de sa rencontre avec les médias. Ils ont notamment exigé aux putschistes dont ils ont condamné les actions, la nomination immédiate d’un nouveau Premier ministre civil, la formation d’un gouvernement et réaffirmé la nécessité de respecter la période de transition de 18 mois. Laquelle, de l’avis des dirigeants de la Cedeao, doit être respectée et maintenue.
La position du Bénin face à la situation qui prévaut au Mali a été le principal message porté à la conférence des dirigeants de la Cedeao par le ministre Aurélien Agbénonci. Selon ses explications, le Bénin a voulu que le principe du réalisme soit pris en compte, tout en condamnant ce mode d’accession au pouvoir. Le chef de l’Etat penche pour que les décisions du sommet ne conduisent pas à une impasse mais respectent l’intérêt des populations, a soutenu le ministre. « Ce mode d’accession au pouvoir n’est plus acceptable. L’ère des coups d’Etat est révolue. Il y a des possibilités de créer des espaces de discussions lorsque parfois certaines idées ne se rencontrent pas », a indiqué le ministre au sujet de la lecture que fait le président Patrice Talon de cette crise malienne. Il est particulièrement préoccupé par le sort des populations qu’il voudrait voir à l’abri des mesures à prendre contre les putschistes. Le ministre des Affaires étrangères estime que « les positions du président de la République sont celles qui quasiment ont prévalu à la fin du sommet ». Les embargos rigoureux sont des sanctions contre les populations. « Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain », a plaidé le ministre. C’est pourquoi, le Bénin est resté dans la logique d’une voie médiane qui trace le chemin vers un renversement au profit de la transition pour aboutir à des élections afin que le Mali renoue avec une vie constitutionnelle normale. D’ailleurs, rappelle-t-il, les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao ont exprimé de vives inquiétudes dans le contexte des défis sécuritaires qui s’imposent au Mali avec des conséquences socioéconomiques. Ils ont aussi exigé la libération immédiate de l’ancien président et de son vice-président.
« Tous les coups d’Etat sont mauvais et il faut éviter un cycle de violences préjudiciable aux populations ». Telle est aussi la vision du chef de l’Etat, vision reprise par ses pairs au cours du sommet extraordinaire du dimanche dernier qui illustre bien la volonté de la Cedeao de continuer à soutenir le Mali dans la mise en œuvre de cette transition réussie. Cela justifie, entérine le ministre Aurélien Agbénonci, la sanction de portée morale imposée au pays. Une manière de ne pas mettre le pays en difficultés, et de permettre au représentant spécial, l’ancien président nigérian Jonathan Goodluck, de poursuivre sa mission de médiation.