Des pratiques culturales nuisibles appauvrissent les sols et engendrent une baisse des productivités dans les exploitations agricoles, dont celles cotonnières. Face au désastre, s’impose une transition agroécologique qu’il convient de mettre à grande échelle, après une phase pilote soldée par des résultats probants.
Les itinéraires techniques jusque-là appliqués dans la culture du coton, premier produit d’exportation du Bénin, impactent considérablement l’ensemble du système de culture et ses performances. Les sols font les frais de la pression anthropique à travers la désertification, l’agriculture extensive sur brûlis, l’usage intensif des pesticides, des herbicides et autres produits chimiques, les feux de végétation, etc.
La remise en état et l’amélioration de la fertilisation des terres s’avèrent incontournables pour garantir la survie de l’humanité. C’est le but visé à travers l’initiative du Projet d’appui à la transition agroécologique dans les zones cotonnières (Tazco) financé par l’Agence française de développement (Afd), dans un contexte de baisse tendancielle des productivités dans des exploitations dont celles cotonnières, due à la pauvreté des sols.
La première phase du projet a été mise en œuvre entre 2017 et 2020. Il était question d’améliorer les conditions de travail des exploitants et de renforcer la résilience des exploitations face au changement climatique, à travers des techniques agricoles respectueuses de l’environnement.
A sa mise en œuvre, Tazco 1 a permis de mettre en terre plus de 170 000 plants sur plus de 1500 parcelles dans 10 villages. Un référentiel agronomique est mis en place, décliné en 20 fiches d’itinéraires techniques, 10 fiches de matériels de mécanisation durable, 10 fiches de plantes améliorantes et 4 guides méthodologiques sur la transition agroécologique, indique Léon H. Akpatcho, responsable chargé de suivi et évaluation du projet.
Cinq diagnostics agropastoraux sont réalisés dans 15 villages ainsi que des diagnostics complémentaires thématiques dans le cadre des missions d’appuis multidisciplinaires du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) au profit des exploitants, ajoute-t-il. A cela s’ajoutent des ateliers et séminaires organisés pour la capitalisation des acquis. Dix Sections villageoises de gestion foncière (Svgf) sont dynamisées et 750 exploitants sont désormais formés à la transition agroécologique.
Disséminer les résultats
Le projet a permis d’établir une base de données sur le suivi de la transition agroécologique, une cartographie des terroirs Tazco. De même, des études ont été réalisées sur la perception des acteurs sur les techniques agroécologiques, leurs performances, un état des lieux de la transition agroécologique au Bénin et la faisabilité de la mise à échelle.
En fait, la situation des terres arables reste alarmante dans le Nord-Bénin, notamment dans le Borgou-Alibori, bassin cotonnier et grenier du pays. Elle met en péril les bases alimentaires et les sources de revenus des populations rurales : les paysans et les éleveurs. D’où la nécessité de remédier aux pratiques peu recommandées et d’adopter des techniques efficaces de protection des sols et de réhabilitation des terres dégradées en vue d’une agriculture durable.
Cette ambition est portée par la deuxième phase du projet Tazco qui entre dans la droite ligne de la mise en œuvre du Plan d’actions national sur la gestion durable des terres adopté par le Conseil des ministres en sa session du mercredi 6 février 2019. En l’espace de trente-cinq ans, a relevé le Conseil, le Bénin a perdu environ 48 % de sa forêt dense ; celle-ci ne couvre désormais que 0,29 % du territoire, en dépit des lois, des systèmes de forêts sacrées et classées.
Couvrant la période 2021-2024, la phase 2 de Tazco s’efforcera de diffuser à grande échelle les techniques agroécologiques éprouvées, les référentiels techniques élaborés pendant la phase pilote, au niveau des parcelles et des exploitations et de promouvoir des mécanismes de gestion collective de la biomasse, indique Orou Dèkè Gonroudobou, responsable de la Cellule d’appui et de suivi, coordonnateur du projet.
Quelque 180 000 agriculteurs sont ciblés dans la zone d’intervention qui concentre environ 90 % de la production de coton ainsi qu’une part importante de la production de cultures vivrières. Au total, 22 communes sont concernées : dix-sept à fort potentiel de production : Banikoara, Bembèrèkè, Dassa-Zoumè, Djidja, Djougou, Gogounou, Kandi, Kalalé, Kérou, Kouandé, Malanville, N’dali, Nikki, Pehunco, Savalou, Ségbana et Sinendé et cinq d’extension de la zone cotonnière : Matéri, Cobly, Kétou, Aplahoué et Ouèssè.
Tazco 2 s’articule autour de trois composantes. La première, détaille Léon Akpatcho, est relative à la promotion des pratiques efficaces à grande échelle au niveau des parcelles et des exploitations des zones ciblées. Elle sera mise en œuvre sous l’égide de l’Agence territoriale de développement agricole Pôle 2 (Atda 2). L’accent sera mis sur les mécanismes de gestion collective de la biomasse par les utilisateurs des terroirs villageois et des techniques agroécologiques collectives, souligne-t-il.
La deuxième composante concerne la recherche pour la consolidation des référentiels techniques agroécologiques avec l’Aic comme bras opérationnel. Les acteurs publics et privés seront formés à la transition agroécologique par l’Institut de recherche sur le coton (Irc).
La troisième composante porte sur l’appui institutionnel pour la transition agroécologique et la coordination du projet sous l’égide du ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche.
A terme, le projet Tazco devrait permettre non seulement l’adaptation des référentiels techniques agroécologiques autour de la production de coton à une diversité de milieux, mais aussi l’initiation d’un cercle vertueux de restauration de la fertilité des sols et d’accroissement des rendements.