Des voix s’élèvent pour plaider l’adoption de réformes internes audacieuses et un soutien international efficient pour relancer les économies africaines, à la faveur des assemblées annuelles 2021 de la Banque africaine de développement (Bad) centrées sur la question de la dette.
Le ratio dette/Pib devrait augmenter de 10 à 15 % en passant de 60 % en 2020 à 75 % en 2021 en Afrique. En mai 2021, fait remarquer Dr Akinwumi A. Adesina, président de la Banque africaine de développement (Bad), 17 pays africains sur 38, pour lesquels une analyse de la viabilité était disponible, étaient en situation de surendettement, douze pays faisaient face à un risque modéré de surendettement et six pays étaient déjà en situation de surendettement.
Le tableau de la situation de la dette peint lors des assemblées annuelles 2021 de la Banque africaine de développement (Bad) n’est guère reluisant. Les assises qui se tiennent du 21 au 25 juin sur le thème « De la résolution de la dette à la croissance : la voie à suivre pour l’Afrique », offrent l’opportunité de débattre de cette question omniprésente dans les sujets relatifs à la relance économique post-Covid-19 en Afrique.
La question de la dette taraude les esprits, en ce sens que la pandémie a engendré un recul du Pib du continent : une contraction de 2,1 % en 2020, selon les Perspectives économiques en Afrique 2021. Aussi, quelque 30 millions d’Africains sont-ils tombés dans l’extrême pauvreté et 39 millions d’autres pourraient connaître la pauvreté en 2021.
L’encours total de la dette africaine qui était de 841,9 milliards de dollars en fin 2019 représente aujourd’hui plus de deux fois les recettes annuelles des gouvernements africains. L’Afrique aura besoin d’un financement additionnel de 485 milliards de dollars entre 2021 et 2023, selon les estimations de la Bad. « Il apparaît manifestement que sans restructuration de la dette, bien plus de pays africains feront face à une situation de surendettement », alerte Dr Adesina.
Pour trouver les ressources et réduire le niveau d’endettement, indique Dr Adesina, il est question de mettre rapidement à la disposition des pays africains les 33 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux (Dts) annoncés lors du Sommet sur les économies africaines de Paris ainsi que les 100 milliards de dollars des Dts que les pays industrialisés souhaitent mettre à la disposition des pays africains via la Bad. Cela renforcerait l’Initiative de suspension du service de la dette du G20 et le Cadre commun pour la résolution de la dette du Fonds monétaire international (Fmi), portant sur l’allégement de la dette des pays vulnérables.
La mise en place d’un mécanisme africain de stabilité s’avère important pour aider les économies africaines à se protéger des chocs exogènes, ajoute le président de la Bad.
« Les stratégies de gestion de la dette africaine devraient prendre en compte les chocs extérieurs qui limitent l’espace budgétaire et ont un important impact sur l’endettement », approuve Ngozi Okonjo-Iweala, directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce (Omc). Autrement, avertit-elle, on tomberait dans des cycles de dette, de restructuration et de redressement, toutes choses qui seront nuisibles à la croissance à long terme et aux conditions de vie.
Au-delà des actions conjoncturelles, il faut penser sérieusement à la restructuration des économies. « La meilleure façon de gérer la dette est que les économies se développent », laisse entendre Kristalina Georgieva, directrice générale du Fmi. La crise de Covid-19 est « l’occasion pour opérer des réformes transformatrices et améliorer la fonction publique », poursuit-elle.
Ces réformes permettront de renforcer la mobilisation des ressources domestiques, de gérer les finances publiques et la dette de manière transparente et productive, notamment celle détenue par les entreprises publiques non-membres du Club de Paris et surtout les prêts garantis auprès des créanciers bilatéraux. La lutte contre la corruption et les flux financiers illicites, la discipline budgétaire, l’efficacité des dépenses publiques, seront également de mise. La dématérialisation de l’administration et la numérisation du circuit de la collecte et de la dépense, sont requises pour réduire les déperditions.
Pour sa part, le Fmi compte accompagner notamment les pays africains dans leurs efforts de redressement et de réformes structurelles. L’institution envisageait d’augmenter ses capacités de prêts à taux zéro. Il est souhaité que les pays fassent un meilleur usage de la dette en mettant l’accent sur le financement d’infrastructures sociales et économiques productives.