Un militant, c’est une personne qui lutte, qui combat, qui s’engage dans l’action pour défendre ses opinions, une personne qui milite au sein d’une organisation politique ou syndicale ou d’un mouvement religieux (Abiola, 2019). Lorsqu’on parle de militants, on pense à ceux essentiellement des partis politiques en oubliant les militants de la frange plus large comme celle de la société civile.
La société civile est cet éventail d’organisations qui animent la vie publique et qui défendent les intérêts de ses membres ou autres, en ne considérant que des valeurs d’ordre éthique, culturel, politique, scientifique, religieux ou philanthropique. On y rencontre des groupements communautaires, des organisations non gouvernementales (ONG), des syndicats, des groupements d’obédience religieuse, des associations professionnelles et des fondations privées ». Et chacun de ces groupes a ses militants.
En réalité, aucune société ne peut exister sans militant d’une façon ou d’une autre. En d’autres termes, il n’existe pas de communauté humaine sans organisation, sans règles, sans une répartition des rôles entre des gouvernants et des gouvernés, sans un système de gestion des ressources et sans des acteurs qui s’organisent pour conquérir, exercer et conserver le pouvoir d’administration partielle ou totale de la Cité et sans les autres aussi qui veillent au respect de certaines valeurs dans la même société.
Ainsi la vie politique a ses réalités ; la politique pouvant s’entendre dans une conception générale, comme l’art de gérer les affaires de la cité selon Friedrich Ebert Stiftung (2014). Elle imprègne tous les aspects de la vie au sein d’une société. Elle est aussi vieille que la volonté des êtres humains de coexister dans le cadre d’une communauté. Face aux divers enjeux de développement nationaux et internationaux, la qualité des militants pour l’animation de la vie politique s’avère plus que jamais importante pour avoir des résultats avec efficacité et cohésion.
Le Renouveau démocratique qui est intervenu avec la Conférence des forces vives de la Nation en février 1990 a fait revenir au Bénin le multipartisme dit intégral. Des composantes de notre société l’ont si bien compris même s’il y a eu beaucoup de confusions entre par exemple, les fidèles et les militants. Il a été il faut le souligner, celui qui a consacré la grande montée des religieux dans les affaires politiques du pays. On a ainsi assisté à de nouvelles formes de langage politique avec des discours de religieux. Ainsi sont organisés un peu partout dans le pays, de multiples prières publiques, des meetings et des messes d’action de grâce, donc la présence de religieux dans tous les compartiments de la société pour espérer engranger le moment opportun les dividendes nécessaires dans les urnes.
Avec la réforme du système partisan intervenu en 2018, on a opté pour les regroupements des partis existants dans le but de donner existence à de grands regroupements. Depuis lors, le nombre de partis légaux a été réduit de façon sensible. Les dernières élections politiques (législatives, présidentielles et communales) et les activités vécues, montrent à suffisance qu’il reste encore du chemin pour faire supprimer sinon réduire les tares vécues depuis 1960 pour l’animation de la vie politique au Bénin. Rappelons-le un parti politique, c’est une idéologie et une structuration mais c’est surtout des militants. Encore que pour l’idéologie, on peut toujours interroger l’histoire des ‘’grandes’’ démocraties et analyser ce qu’il en est aujourd’hui de leur idéologie. C’est pourquoi j’ai bien aimé Me Abraham Zinzindohoué (2021) lorsqu’il déclare : « Il faut modérer les idéologies pour l’Afrique. La véritable idéologie en Afrique au Bénin chez nous, c’est le développement de notre pays quel que soit le mécanisme par lequel on y aboutit. Que le béninois vive bien, mange mieux, soit libre de se déplacer, de s’associer. C’est l’idéologie du développement… ».
Un parti politique a effectivement pour but de répondre aux attentes des citoyens. Il lui faut disposer d’une offre politique capable de satisfaire une majorité de citoyens afin d’espérer emporter leurs suffrages pour se faire porter à la tête de l’Etat. Il va donc chercher à politiser les citoyens, c’est-à-dire les amener à développer un intérêt pour la politique et sa politique lui.
Nous le savons, les élections sont des moments d’enjeux politiques importants pour tous ses acteurs : les gagner ou les perdre. Pour atteindre leurs objectifs, les hommes politiques doivent disposer des ressources politiques que Jean-Patrick Lacam (1988) définit comme « tout moyen à la disposition d’un entrepreneur politique dont l’activation élargit son champ des possibles et facilite le développement de ses stratégies ». Pour Robert Dahl (1988) « les ressources politiques comprennent l’argent, l’information, la distribution de nourriture, la menace de la force physique, les emplois, l’amitié, le rang social, le droit de légiférer, les votes et toute une variété d’autres phénomènes ». Les acteurs politiques s’organisent comme ils peuvent, pour disposer de ces ressources avec des militants de qualité fiable et préparés pour aller à l’assaut de l’électorat : affinités identitaires, réseaux de dons, mobilisations festives de toutes sortes, usage du monopole des appareils d’État. L’approche de la mobilisation de ressources considère donc les militants comme des instruments au service du parti, c’est-à- dire qu’ils sont transformés en des exécutants des actions politiques construites et téléguidées par les Responsables politiques. Face aux divers enjeux de développement nationaux et internationaux, la qualité des militants pour l’animation de la vie politique s’avère plus que jamais importante pour avoir des résultats avec efficacité et cohésion.
Qu’avons-nous observé en matière de militantisme ces dernières années ?
Nous pouvons répondre sans hésiter à l’immixtion du pouvoir de l’argent et à la prépondérance des intérêts individuels ou de groupes.
A côté des militants, ceux-là qui s’engagent pour effectivement contribuer à changer quelque chose dans le vivre ensemble des populations, il y a ces autres qui souvent les plus bruyants, ne guettent que des occasions de satisfaire à tout prix leurs intérêts. Oui à tout prix. Et là, les anecdotes sont nombreuses à cet effet : les montages, les diffamations et même les complots. Certains de ces agissements se retrouvent parfois malheureusement devant les tribunaux. C’est vrai que quelques fois c’est du ôtes-toi de là que je m’y mette, mais tous les coups ne peuvent pas passer.
On est parfois obligé, pour garder des militants de chercher à satisfaire leur quotidien et à faire face à certaines situations qu’ils vous présentent. Une ordonnance médicale non payée, des scolarités d’enfants non assurés, des maisons personnelles non rénovées, des moyens de déplacement non octroyés et j’en passe, peuvent les faire vous quitter pour aller chercher ailleurs leur bonheur.
J’ai été très peiné d’entendre quelqu’un venir me dire un jour : si je reste avec vous politiquement et que mes enfants ne peuvent pas être embauchés dans la fonction publique, à quoi vous me servez ? C’est vrai les mercredis, jours des conseils de ministres sont toujours des moments de déceptions ou de renouvellements d’engagements militants. Et pour cause…
On ne peut pas ne pas le dire, des leaders politiques ou considérés comme tels se sont faits entrainer dans des pans de la mauvaise gouvernance en voulant coute que coute garder ceux qu’ils considéraient comme des militants et qui en demandaient chaque jour beaucoup davantage.
Que faire maintenant ?
Personnellement, je salue la réforme du système partisan. C’est un début pour l’assainissement des déviances observées depuis si longtemps avec les partis politiques et pour le développement de notre pays. Il y aura la phase de doute, celle inhérente à toute œuvre de réforme. Mais, c’est la capacité à résister aux manipulations et autres chantages qui feront gagner ce nouveau pari.
Examinez bien les champions des manigances et autres dérives. Vous n’aurez aucun mal à vous dire que le pari sera gagné.
Notre conception parlant de son parti politique (Bio Tchané, 2018) « est celle qui exalte la compétition, l’excellence, et la juste rétribution de l’effort de chacun.
La conception de la Nation, de la société et de l’Etat que nous prônons au sein du Bloc Républicain repose sur des principes clairs.
Adhérer au Bloc Républicain, c’est faire le choix d’un régime politique de démocratie pluraliste respectant l’Etat de droit et les droits de la personne humaine.
Adhérer au Bloc Républicain, c’est opter pour une volonté de paix et de concorde nationale prenant en compte notre histoire et la culture du peuple dans sa diversité.
Adhérer au Bloc Républicain, c’est contribuer à l’avènement d’un système économique de libre entreprise dans lequel l’Etat joue un rôle d’incitateur, de régulateur et de contrôleur. C’est dire que l’Etat doit développer une économie organisée rationnellement, assainie grâce à la lutte contre la corruption et l’impunité, respectueuse de l’environnement et assurant un développement harmonieux et durable !
Adhérer au Bloc Républicain enfin, c’est être déterminé à défendre la Patrie et à vaincre face à tous les défis qui se posent à la Nation ».
Cependant, l’engagement politique est encore perçu avec beaucoup de suspicion et de crainte de part et d’autre (Zogo, 2019). De nombreux militants notamment les jeunes restent convaincus que s’embarquer dans la politique qui est une « affaire » ne fera d’eux que de corrompus et ceci ne peut leur garantir un bel avenir. La politique pour eux doit être réservée aux personnes fortunées et sans morale. Avec l’école des partis qui est en train d’être mise en place par les principaux partis légaux, aucun doute que des militants vont émerger pour animer la vie politique et permettre le développement de notre pays pour le bonheur de nos populations.
Quelques éléments de référence cités
François Adébayo Abiola, la mobilisation des militants pour l’approfondissement du travail d’élargissement de la base du Bloc républicain, rentrée politique du Bloc républicain, Porto-Novo le 16 novembre 2019
Abdoulaye Bio Tchané, Discours d’ouverture du congrès constitutif du parti Bloc républicain, Parakou le 8 décembre 2018
Robert Dahl (1988) : L’Analyse politique contemporaine, Paris, Robert Laffont, 1973
Friedrich Ebert Stiftung (2014) : Les jeunes et l’engagement en politique, manuel d’information et de formation, Yaoundé, https://library.fes.de/pdf-files/bueros/kamerun/10803.pdf consulté le 9 novembre 2019
Jean-Patrick Lacam (1988) : « Le politicien investisseur : un modèle d’interprétation de la gestion des ressources politiques », Revue française de science politique, vol. 38, n° 1, p 27
Abraham Zinzindohoué : l’invité du 22 août 2021 Cotonou ESAE TV https://youtu.be/wbsvj87304M
Hector Zogo (2019) : Entretien personnel sur quelles possibilités pour les jeunes de s’engager en politique ?