En prélude au vote de la loi qui légalise l’avortement en République du Bénin, deux députés se sont illustrés. Le premier, Louis Vlavonou, président de l’Assemblée nationale, a clamé en face du monde son opposition à une telle loi. « L’avortement étant la négation de la vie à un enfant, qui sommes-nous pour décider de la vie de quelqu’un et surtout du “tout petit” ? », avait-il laissé entendre devant ses collègues députés, lors d’un atelier. Son collègue Aké Natondé, quant à lui, a résumé en 7 points les raisons pour lesquelles il compte voter contre un tel projet de loi. Parmi elles, la sacralité de la vie humaine : « …il ne nous revient pas de légaliser une industrie de la destruction en série dans l’espace et dans le temps des âmes innocentes qui constitueront demain la force de travail et de développement du Bénin », avait posté sur son compte Facebook le député Aké Natondé, repris par certains médias. On était à quelques heures de l’adoption ou non en plénière de la loi modifiant et complétant la loi n°2003-04 du 03 mars relative à la santé sexuelle et à la reproduction.
Grande fut donc la surprise des Béninois de constater, au petit matin du jeudi 21 octobre 2021, que la loi légalisant l’avortement en République du Bénin a été votée à l’unanimité des députés présents et représentés. Que s’est-il passé ? Où étaient Louis Vlavonou et Aké Natondé en ce moment-là ? Ces questionnements trouvent leur fondement dans l’engagement qu’ils avaient pris devant le peuple. Mais à l’arrivée, nenni.
C’est alors que le député Aké Natondé affirme n’est pas resté jusqu’au vote de la loi. Lui qui a été pourtant perçu lors des débats a senti le besoin d’aller prendre ses cachets, au moment décisif où il faut passer au vote. Certes, la santé n’a pas de prix. Mais n’aurait-il pas pu, tout au moins, donné procuration à un collègue afin d’exprimer son opposition à l’adoption d’une telle loi ? Le président de l’Assemblée nationale était bien présent mais n’a pas eu d’autre choix que de voter pour la loi. Il était donc légitime que les Béninois se posent des questions sur ce qui s’est réellement passé.
Mais à y voir de près, ce vote à l’unanimité ne devrait étonner personne. Depuis l’installation de la 8e Législature, les lois les plus controversées ont souvent été votées à l’unanimité et nuitamment. L’autre chose, la loi querellée est un projet de loi, c’est-à-dire une initiative du gouvernement, portée par des ministres du gouvernement. Louis Vlavonou et Aké Natondé sont tous membres de l’Union progressiste, parti soutien du gouvernement. Même s’ils disposent d’une liberté de vote au Parlement, on n’a pas souvent l’expression qu’ils aient déjà utilisé cette liberté dans le vote de lois aussi controversées. Alors savaient-ils peut-être pertinemment qu’ils n’ont d’autres choix que de voter la loi querellée, soit s’abstenir ? Le cas échant, l’engagement pris devant le peuple n’était-il pas une farce, une sorte de plaisanterie juste pour amuser la galerie ? On est bien tenté de le croire après la disparition de la salle de Aké Natondé au moment du vote, et le silence dans lequel s’est réfugié Louis Vlavonou 24h après avoir voté pour la loi qui légalise l’avortement en République du Bénin.