Le vote de la loi sur l’avortement reste une couleuvre difficile à avaler pour le président de l’Assemblée nationale. Dans le souci de respecter l’engagement pris par son parti politique d’accompagner les réformes du Chef de l’Etat, lui qui, publiquement, avait pris fait et cause contre une telle loi a fini par voter pour, ceci contre ses convictions religieuses. Depuis, Louis Vlavonou a des remords. Son discours, à l’ouverture de la 2e session ordinaire de 2021 illustre bien le sentiment de frustration qui anime le président de l’Assemblée nationale, après qu’il a voté pour la légalisation de l’avortement au Bénin. Du coup, il se pose des questions et invite ses collègues députés à la réflexion. Face au caractère sacré de la vie, face aux propos de certains responsables de confessions religieuses qui ont, à la limite, jeté l’anathème sur la 8e Législature après le vote de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse, Louis Vlavonou se pose des questions.
« Le plus dur était une vidéo dans laquelle un Imam disait que nous irions en enfer si nous votions cette loi … sans oublier la déclaration de l’Association des femmes catholiques qui nous a envoyé ce message : « Le sang de ces âmes innocentes qui seront assassinées criera vengeance… » sur les députés de la 8è Législature. Face à ces propos, comment respecter la parole donnée ? Sommes-nous en présence de cas de force majeure ? Contrainte morale ? Exercice de la liberté ? Choix entre la légalité et la loyauté ? », se demande le président de l’Assemblée nationale, en même temps qu’ils invitent les députés à la réflexion. Autrement dit, la 8e Législature, dont il est président, va-t-elle continuer à voter unanimement les lois de façon systématique parce qu’elles viennent du gouvernement ? Comment respecter la parole donnée s’il y a des lois qui mettent en balance les convictions religieuses des uns et des autres ? Comment apprécier les cas de force majeur, comment opérer un choix entre la légalité et la loyauté, etc. Le président de l’Assemblée nationale invite ses collègues députés à faire, chacun à son niveau, une introspection.
Quand on sait que depuis 2019 qu’elle est installée, la 8e Législature a toujours voté les lois venant de l’Exécutif, l’invite de Louis Vlavonou a le mérite d’amener les députés à se remettre en cause, à se demander si cette manière de procéder est la meilleure ? N’est-il pas possible de soutenir un pouvoir sans pour autant tout acquiescer ? La meilleure manière de soutenir n’est-elle pas parfois dire « Non » quand on n’est pas d’accord ? Voilà ce à quoi invite les députés le président de l’Assemblée nationale. Dès lors, il se pose la question de savoir si ses collègues vont intégrer, chacun à son niveau, cette manière de voir les choses ? Est-ce que la réflexion de Vlavonou touchera les cœurs de ses collègues députés?
Bien sûr, il y aura des députés pour qui tout ce qui vient de l’Exécutif doit passer comme une lettre à la poste. C’est leur manière à eux de montrer combien ils sont loyaux. Mais il y en aura aussi qui vont oser dire « Non » quand une loi pose un problème moral, religieux ou les met en difficulté par rapport à la volonté exprimée par leurs mandats. Alors seulement, on pourrait espérer une 8e Législature qui ne soit plus une caisse de résonance, une législature où les lois ne seront plus votées toujours de façon unanime par les députés présents et représentés.