Les acteurs de la chaîne des transports se sont pliés aux injonctions du préfet du Littoral, relatives à la mise en place de nouvelles gares routières, et à l’interdiction des chargements et déchargements hors-parc. Un tour sur les deux sites situés à Vodjè et Akpakapa, et l’on constate l’évidence en dépit des couacs qui suscitent des doléances de la part des acteurs.
A Akpakpa au carrefour Abattoir et à Vodjè non loin des rails, c’est presque un marché qui s’anime sur les nouveaux sites de chargements et de déchargements des minibus ou taxis destinés au transport en commun à Cotonou. Des clients dépaysés, des conducteurs mécontents, seul ou en petits groupes, chacun y va de sa compréhension pour approuver ou décrier la mesure du préfet.
Vaille que vaille, la réforme prend corps. Les minibus ou taxis venant de Porto-Novo s’arrêtent désormais à Abattoir, et ceux quittant Abomey-Calavi finissent leurs courses à Vodjè rails. Selon le préfet Alain Orounla, il s’agit de deux sites qui répondent à la rationalisation géographique pour des installations de gares routières, et permettent également d’organiser leur gestion. « Avec l’implication de la Police républicaine, des uns et des autres, tout va bien, les chargements évoluent. On ne s’attendait pas à ce que ça marche dès le premier jour. C’est comme si vous avez un marché ici depuis plus de 5 ans. Ça a été difficile dès les premières heures entre 5 h et 7 h, voire 8 h, où l’arrivée des véhicules était timide, mais maintenant, c’est la grande affluence », confie Myriaque Dakpo, président de la Fédération des travailleurs du transport (Fédération TT) rencontré sur la gare routière de Vodjè.
Mi-figue, mi-raisin
Sur le site d’Akpakpa en direction de Porto-Novo, Dansi Ezéchiel, un conducteur de véhicule, ne cache pas son désarroi à la mi-journée : « Je suis là depuis 8 h, et je n’ai pas encore fait un seul voyage ». L’attente est longue, les véhicules stationnés à perte de vue, et contrairement aux habitudes, point de chargement hors-parc. Si la pertinence de la mesure fait presque l’unanimité, le coût supplémentaire de transport qu’elle induit, et l’état peu enviable des sites ne sont pas du goût des usagers. « C’est une bonne décision parce que cela va réduire les accidents. Quand on veut développer une ville, il faut y mettre de l’ordre. Mais on devrait anticiper, nettoyer d’abord le site, prendre des mesures pour accompagner la décision. Porto-Novo – Cotonou était à 800 F. Maintenant qu’on descend à l’Abattoir, on prend un Zémidjan à 300F pour rejoindre le marché Dantokpa. Qui défend les clients? », s’est interrogé Cyrille Ayédoun, après sa descente d’un minibus venu de Porto-Novo.
Pour dame Justine Nadonné, un autre usager du parc d’Akpakpa, cette décision est source de souffrances pour les femmes qui vont acheter ou vendre au marché Dantokpa. « Nous souffrons beaucoup. J’ai pris Zémidjan (taxi-moto) à 300 F, et le bus à 700 F. Arrivée à SS Pierre et Paul à Porto-Novo, je prendrai encore un Zémidjan à 200 F pour rentrer, et gagner finalement combien sur cette marchandise ? Ayez pitié de nous ! », se plaint-elle. Selon plusieurs usagers, le gouvernement doit fixer les prix, afin d’éviter les abus et qu’en dernier ressort, le consommateur ne se retrouve encore à payer un lourd tribut en cette veille des fêtes de fin d’année.
La mairie, le gros gagnant
« Les clients nous insultent à cause des tarifs mais c’est le début. Nous aurions souhaité que cela soit mis en œuvre après les fêtes. Mais le préfet nous a rassurés que les choses seront corrigées au fur et à mesure. De toute façon, depuis que notre site a été détruit à Tokpa, il y a beaucoup de désordres. On observait un stationnement anarchique des bus, et nous étions traités comme des délinquants alors que nous contribuons à l’économie du pays, » déclare Hounsa Abatcha, un conducteur de minibus. Entre les injures des clients et les frais de tickets auxquels ils sont assujettis, ces conducteurs appellent également l’Etat à l’aide. En effet, les frais de ticket perçus par la mairie de Cotonou comme redevance par chargement s’élèvent à 400 F pour les minibus, 300 F pour les véhicules de 4 ou 6 places, et à 600 F pour les véhicules en partance vers les frontières. Alors qu’elle percevait 100F à minima, la mairie de Cotonou a augmenté ses tarifs, sans susciter pour autant une contestation des acteurs qui sont désormais libérés des 1000 F de taxe imposés par leur syndicat. A juste titre, sur le parc d’Akpakpa, les acteurs ont formulé le vœu le voir la mairie de Porto-Novo baisser les frais de ticket afin qu’au finish, l’usager ne subisse pas le coût élevé du transport. « A Porto-Novo, le ticket de la mairie est à 800 F, et sur le parc privé, nous payons 500 F, soit 1300 F, voire 1500 F par chargement. Nous sommes dépassés par ces frais », a indiqué Wassirou, un conducteur rencontré sur les lieux.
L’assainissement, une urgence
Un cadre sain, c’est un luxe auquel n’ont pas encore droit les usagers des nouvelles gares routières créées dans la ville de Cotonou. Absence de poubelles, d’urinoirs, de lampadaires pour une activité qui se déroule presque de façon ininterrompue. Des odeurs de toutes sortes, aucune indication sur les probables destinations, pas de couloirs de circulation pour les usagers et les véhicules, c’est dans un sauve-qui-peut que chacun s’accroche à un bus. «Roule doucement, tu ne m’as pas vue? », lance une dame qui a évité de peu d’être renversée par un chauffeur qui a démarré en trombe. Ce dernier, d’une main levée, au volant, lui présente ses excuses. « Aujourd’hui, il y a un bon regroupement, et c’est heureux. Par le passé, les parcs se retrouvaient dans toutes les vons. Donc, c’est une bonne décision et nous mettons de l’ordre dans notre secteur. Notre préoccupation, c’est le site qui est en cours d’aménagement », a déclaré Richard Afannou, secrétaire général adjoint de l’Union nationale des conducteurs du Bénin (Unacob), coordonnateur du site de Vodjè.