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Entretien avec Louis Biao, Dg/Anssfd: Bon à savoir sur l’interdiction de la tontine ‘’adôgbè ‘’

Publié le vendredi 15 avril 2022  |  Matin libre
Louis
© Autre presse par DR
Louis Biao, DG de l’Agence Nationale de Surveillance des Systèmes Financiers Décentralisés
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« Fin 2021, rien qu’à Porto-Novo, on a eu 600 plaintes contre des individus… »

« adôgbè : lorsqu’elle se fait dans un cercle fermé où les membres se connaissent, pas besoin d’un agrément »

« C’est réprimandable, des kiosques de Mobile money où on met ‘’tontine’’… »

«Même le tontinier ambulant est sous le coup de loi »



« vous citoyen qui avez connaissance de ça, si vous dénoncez vous participez à assainir le secteur »

4 mars 2022, le ministre d’Etat chargé des Finances et son collègue de la sécurité rendent public un arrêté (publié ci-après) au sujet de l’activité dite « adôgbè » et toutes formes de collecte illégale de l’épargne publique. L’information s’est répandue très vite dans le pays mais avec des spéculations et interprétations diverses. Afin d’éclairer l’opinion sur le contenu de cet arrêté interministériel, votre journal Matin Libre a eu un entretien avec Louis Biao, Directeur général de l’Agence nationale de surveillance des Systèmes financiers décentralisés (Anssfd). Lire l’intégralité de l’entretien, qui apporte des nuances et précisions importantes sur le sujet.

Monsieur le Directeur général, à ce jour la tontine « adôgbè » est-elle interdite au Bénin ?



D’abord, lorsqu’on parle de la tontine, on parle de la collecte de l’épargne, et « adôgbè » est un sous-produit d’un produit d’épargne qu’on appelle la tontine. Donc il y a diverses formes de tontines, « adôgbè » est une forme de tontine. Depuis 1997, l’activité de collecte de l’épargne est réglementée au niveau de notre pays, notamment en ce qui concerne les institutions de micro finance. Il y a quatre acteurs principaux qui peuvent collecter l’épargne du public : il y a les banques, les institutions de micro finance qu’on appelle Systèmes financiers décentralisés, les compagnies d’assurance et la Poste qui est une institution financière avec la Cne : Caisse nationale d’épargne. Quand je prends l’épargne, il y a plusieurs types d’épargne. Il y a ce qu’on appelle épargne à vue (dépôt à vue) opposée au Dat qui sont des dépôts à terme. Il y a également des dépôts qu’on appelle épargne planifiée. Les tontines constituent un type de produit d’épargne. Il y a des tontines-crédit, il y a d’autres formes de tontine et il y a la tontine « adôgbè » qui aujourd’hui s’est suffisamment modernisée. Au départ, c’était une tontine destinée beaucoup plus aux ménages modestes et dont la vocation initiale était de leur permettre de pouvoir faire dans les meilleures conditions les fêtes de fin d’année. Cela consiste aux ménages très modestes de cotiser de façon journalière soit hebdomadairement voire mensuellement pour qu’à la fin de l’année on puisse leur donner des produits comme des vivres ; des boîtes de conserve, les boissons et autres. Quelques temps après, ça s’est amélioré. Dès lors qu’on a 5kilos de riz, un bidon d’huile de 5L, on a des canettes de boisson, la fête est déjà bonne puis on ajoute du poulet ou bien des pagnes. Cette tontine s’est améliorée et on a commencé par donner des ustensiles de cuisine puis des équipements électroménagers. Aujourd’hui, ce type de tontine n’est plus seulement pour les ménages modestes parce que les gens le font désormais pour avoir de parcelle à la fin de l’année, un véhicule, une moto. En 2020 par exemple, on est parvenu à faire tontine Tabaski pour avoir un mouton pour la fête. Et cette tontine s’est répandue sur l’ensemble du territoire partant de la zone méridionale du pays notamment l’Ouémé-Plateau. Aujourd’hui cette activité occupe une place importante au niveau de l’économie nationale. Il faut qu’on puisse recadrer. Ce n’est pas que c’est interdit. Ce qu’on a interdit c’est le fait que ce soit des non agréés qui font l’activité. Donc, l’interdiction vise les promoteurs qui n’ont pas reçu l’agrément et non l’activité elle-même. Cela veut dire que les quatre catégories d’acteurs que j’ai cités : les banques, les Systèmes financiers décentralisés ou les institutions de micro finance, la Poste, les compagnies d’assurance font la collecte de l’épargne ; donc peuvent faire « Adôgbè » qui est un produit d’épargne.

Selon certaines langues, le gouvernement a pris cette décision juste pour favoriser la Poste, lui donner le monopole de faire l’activité de « Adôgbè ». Que répondez-vous à ceux qui pensent ainsi ?



Là, les gens sont passés à côté de la réalité. D’abord, au niveau de l’arrêté, il n’y a même pas la Poste. L’arrêté a indexé les Systèmes financiers décentralisés, c’est-à-dire les institutions de micro finance. Au niveau de l’article 3 de l’arrêté interministériel, on a bien dit que les Systèmes financiers décentralisés régulièrement autorisés ne sont pas concernés. Je ne vois donc pas la relation avec la Poste. La preuve, les Systèmes financiers décentralisés qui sont agréés font l’activité.

Il y a une liste de 111 Sfd agréés que les médias ont relayée il y a quelques jours tout en faisant un lien avec « adôgbè ». Doit-on comprendre que ce sont de nouveaux Systèmes financiers décentralisés autorisés à faire l’activité ?

Non, au cours de cette année il n’y a pas encore d’institution qui soit agréée. C’est une publication que nous faisons annuellement. Il y a simplement une coïncidence. La loi dit au moins une fois l’an, le ministre chargé des Finances doit publier la liste des institutions autorisées pour que les populations puissent savoir avec qui contracter. Donc chaque année, il y a toujours publication de la liste des institutions autorisées. Maintenant, cette publication dont vous parlez coïncide avec la prise de cet arrêté. Donc la liste des 111 institutions, c’est la liste actualisée à date. Vous voyez : les Clcam, ce n’est pas hier qu’on les a agréées. Quand vous allez prendre la liste, on a plus de 30 Clcam qui sont autorisées. Il y a d’autres institutions : le réseau Renaca, les Caveca, l’Unacrep, les Crep qui sont citées, il y a Padme, Vital Finances, etc. Donc c’est un rappel des institutions de micro finance qui sont autorisées et on fait la publication de cette liste. Et dans la publication de cette liste, si je reviens à votre question précédente, on n’a pas cité la Poste, mais les gens disent à tort que c’est pour favoriser la Poste. La Poste est une entité par excellence de collecte de l’épargne. La Cne, ça existait depuis des années. Donc pour adapter ses produits aux besoins de la population, la Poste dit je fais le produit « adögbè ». Je ne vois pas le problème. C’est une autre réglementation qui régit la Poste, qui n’est pas la même réglementation qui régit les banques, les compagnies d’assurance, les Systèmes financiers décentralisés. Chaque acteur a sa réglementation qui lui est propre. Ces quatre acteurs principaux que je viens de citer sont des acteurs qui sont habilitées à faire la collecte de l’épargne.

Tous les Sfd font-ils de l’épargne ou le « adôgbè » ?



Lorsque nous prenons les Systèmes financiers décentralisés, ils ne sont pas obligés ; c’est une faculté qu’on leur donne de collecter de l’épargne. L’activité financière n’est pas que la collecte de l’épargne. Il y a des institutions qui disent la collecte de l’épargne, c’est un métier. Il faut avoir l’art, il faut avoir les moyens, il faut avoir la capacité pour gérer l’épargne collectée, comme je n’ai pas cette expertise je ne collecte pas de l’épargne, je fais du crédit. Donc il y a des institutions de micro finance qui sont des institutions de micro finance de crédits directs, qui refusent de collecter l’épargne et qui ne font que le crédit. Mais d’autres également peuvent collecter l’épargne et faire du crédit. Si vous prenez tout ce qui est coopératives ou mutuelles, elles collectent l’épargne et mettent en place du crédit.

Comment devient-on Sfd ?



C’est très simple. Il faut demander l’agrément. Il y a une liste de pièces à constituer. Vous constituez votre dossier, vous déposez votre dossier au niveau de la structure ministérielle de suivi qui est l’Agence nationale de surveillance des Systèmes financiers décentralisés. Et, cette Agence c’est le bras opérationnel du ministre des finances par rapport au secteur de la micro finance. Dès que vous déposez votre dossier, le dossier est étudié. Je voudrais rappeler que dès que vous déposez le dossier, c’est avec des délais. Si vous avez un dossier bien monté, qui respecte les normes, et on étudie le dossier, au bout de 6 mois vous pouvez avoir l’agrément. Ce n’est pas seulement au niveau de l’Agence qu’on étudie le dossier. Une fois que le dossier est étudié ici, le dossier est transmis à la Banque centrale (Bceao) qui étudie également le dossier qui donne son avis conforme. Tant que l’avis conforme de la Banque centrale n’est pas obtenu, le ministre des Finances ne signe pas l’agrément. Donc c’est le ministre des Finances qui est l’autorité de tutelle du secteur financier. Et vous allez voir que tous les quatre acteurs sont sous la tutelle du ministre des Finances : les Banques, les compagnies d’assurance, la Poste, les Systèmes financiers décentralisés. Je voudrais rappeler qu’il y a trois formes juridiques que peuvent revêtir les Systèmes financiers décentralisés : on peut être une coopérative ou une mutuelle ; ça c’est la première forme. La deuxième forme, c’est soit une association ou une Ong. La troisième forme, c’est la forme de société de capitaux, soit vous êtes une société à responsabilité limitée ou bien vous êtes une société anonyme. Il y a des pièces spécifiques qui sont liées à votre forme juridique plus des pièces qui sont des pièces communes. Dès lors que vous avez l’agrément, vous allez pouvoir exercer. Et à ce niveau, je voudrais rappeler ceci qui est très important et qui fait partie de votre appui à éclairer la lanterne de nos populations. En effet, l’article 7 de la loi 2012-14 du 21 mars 2012 stipule ceci : l’agrément est préalable à l’exercice. Vous devez d’abord avoir l’agrément avant d’ouvrir les portes. Est-ce que si on n’a pas l’agrément on peut ouvrir une banque ? Si on n’a pas l’agrément est-ce qu’on peut ouvrir une officine de pharmacie ? C’est exactement la même chose. Il ne faut pas commencer par exercer et demander l’agrément. On a fait ça dans ce pays, on a essayé de voir, on a régularisé. On l’a fait mais on ne peut pas le faire ad vitam aeternam.

Et pour ça d’ailleurs, en 2018 le ministre des Finances a pris un arrêté

Exactement ! Le 31 décembre 2018. Vous devez d’abord avoir l’agrément. Et c’est juste un rappel. Depuis 1997, c’est-à-dire la première loi sur les institutions de micro finance ; la loi 97, vous ne devez pas être en train d’exercer puis chercher à avoir l’agrément. Vous devez avoir l’agrément avant d’exercer. Mais comme on sait qu’il y avait des situations antérieures, il y a eu une ‘’tolérance’’. On a essayé d’accompagner même des acteurs et ces acteurs aujourd’hui se sont mis au pas. Et quand ces acteurs se sont mis au pas, ils ont constaté que c’était pour leur bien. Aujourd’hui c’est des acteurs qui se développent de façon plus harmonieuse. En 2018, le ministre des Finances a dit nous avons assez accompagné autant que se faire. Ceux qui voudraient exercer, il n’est pas interdit d’exercer l’activité, mais il faut avoir l’agrément avant d’exercer.

Est-ce que le récent arrêté interministériel vise les personnes physiques ? Autrement, est-ce qu’une femme ou un homme, malgré l’arrêté, peut continuer à collecter la tontine ou faire ‘’adôgbè’’ ?

Déjà ce dont il s’agit, c’est une question de collecte de l’épargne du public. Je puis vous dire que quelle que soit votre capacité financière, la collecte de l’épargne du public ne peut pas reposer sur une seule personne. Le législateur est clair là-dessus. Imaginez que vous êtes milliardaire et vous collectez l’épargne du public. Lorsque quelque chose vous arrive, qu’est-ce qu’on fait ? Alors que vous avez collecté l’épargne de toute une population, des millions de personnes. Dans le secteur de la micro finance, nous sommes environ 3 millions de personnes qui bénéficient des services financiers, rien que le secteur de la micro finance ; le secteur bancaire est là ; le secteur des assurances ; le secteur de la Poste. Regardez depuis que la Poste existe, si elle était défaillante et que les gens n’ont pas leur épargne, vous pensez que ça pourra exister ? Regardez la Fécécam, regardez les institutions de micro finance ; elles sont là. Le fait qu’elles sont autorisées, c’est un gage de sécurité pour les épargnants parce que c’est l’Etat qui les autorise. Lorsque l’affaire Icc s’est produite ici, vous vous rappelez ; on a trouvé que c’est l’Etat qui n’a pas joué son rôle alors qu’avant que l’affaire ne s’éclate, l’Etat a tiré la sonnette d’alarme, mais les gens ont dit non, comment l’Etat peut nous refuser des gens qui veulent nous aider. Est-ce que nous allons permettre à ce que les gens qui n’ont pas de profil puissent faire l’activité ? C’est exactement comme si vous demandez qu’on ait une tolérance à des gens qui ne sont pas des médecins d’ouvrir des cliniques ; à des gens qui ne sont pas des pharmaciens d’ouvrir des officines de pharmacie. Vous voyez le danger que ça peut porter ? Cela veut dire que quelqu’un qui n’a pas la qualité d’un pharmacien qui ouvre sans avoir l’agrément, il peut amener des produits qui peuvent tuer la population. C’est la même chose versus lorsque des gens qui n’ont pas la qualité de collecter l’épargne du public font la collecte de l’épargne du public et disparaissent. Là, vous voyez des populations en détresse. Ce qui fait le plus mal, c’est que c’est l’épargne des ménages modestes. Est-ce que vous savez que dans « adôgbè » les gens font 25 F par jour ? Donc une personne qui donne 100 F par jour, vous voyez comment il s’est privé ? 100 F, ça peut ne rien dire pour vous mais il y a des ménages où 100 F c’est important. Et la personne fait ça dans l’espoir de passer de bonnes périodes de fêtes de fin d’année : avoir 2 Kg de riz, avoir des boîtes de conserve, avoir un poulet, avoir demi carton de sucrerie, demi carton de bière pour bien fêter. Donc une personne physique ne peut pas avoir l’agrément pour collecter l’épargne publique.

A partir de quel seuil alors on parle d’épargne publique ? Est-ce que moi, chef tontinier parce qu’on se réunit dans mon quartier, ou entre collègues de service, ou parce qu’on a un groupe de sport en commun et on fait « adôgbè » ou bien on fait tontine ordinaire, je suis sous le coup de la loi ?



Ça c’est une très belle question. Et je crois que c’est une question qui va nous permettre également d’éclairer et de rassurer. La tontine de façon générale, même la tontine « adôgbè » lorsqu’elle se fait dans ce qu’on appelle un cercle fermé où l’ensemble des membres de cette tontine se connaissent, on n’a pas besoin d’un agrément. Je dis bien, il y a deux critères. Et vous avez trouvé des exemples. Nous sommes dans un même service et les agents, nous sommes une trentaine et la trentaine décide de faire de la tontine même si c’est « adôgbè ». Les 30 se connaissent, le cercle est fermé ; c’est-à-dire que même si vous avez la volonté, quand vous n’êtes pas dans ce cercle, vous n’y entrez pas. Mieux, tous se connaissent. A partir de là, il n’y a pas de problème. Mais ce qu’on appelle la collecte de l’épargne du public, ou bien vous faites appel public à l’épargne, c’est lorsque vous ouvrez une baraque, un bureau et vous mettez ‘’tontine’’. Cela veut dire que n’importe qui passe peut venir faire la tontine chez vous. Vous êtes peut-être le seul alors à connaître ceux qui viennent déposer de l’argent. Là, vous faites appel à l’épargne publique. Et en ce moment-là, c’est réglementé ; il faut avoir l’agrément. Même, c’est par abus et c’est réprimandable qu’on voit des kiosques de Mobile money où on met Mobile money, après sur l’affiche ou la banderole on met ‘’tontine’’. C’est de l’appel à l’épargne publique. Ceux qui viendront faire tontine là, ceux-là ne se connaissent pas. Tous ne peuvent pas se connaître. La même chose avec le tontiner ambulant qui passe auprès des bonnes dames. Est-ce que toutes les bonnes dames du quartier, même de votre quartier, se connaissent ? Donc le tontinier du quartier est sous le coup de loi parce que toutes les personnes chez qui il collecte la tontine ne se connaissent pas. Et il peut disparaître du jour au lendemain. Mais la même chose, les institutions de micro finance le font. Elles ont des tontiniers ambulants également mais c’est des agents assermentés qui ont le badge de leur institution, qui font la même chose, qui passent d’étalage en étalage, de bonne dame en bonne dame, de ménage en ménage pour faire la même chose. Mais ces institutions de micro finance sont autorisées. Est-ce qu’une institution peut disparaître comme des individus le font ? A la fin de l’année 2021, rien qu’à Porto-Novo seul, et ça c’est ceux qui ont le courage, on a eu 600 plaintes contre des individus qui ont collecté l’épargne, de la tontine « adôgbè » et qui ont disparu. Est-ce que vous savez que des tontiniers ont près de 3000, 5000, 10.000 épargnants ? Et ils n’ont pas l’agrément.

Monsieur le Directeur général, aujourd’hui avec les réseaux sociaux, on peut créer un groupe whatsApp de tontine et on demande aux gens de l’intégrer et ces membres qui ne se connaissent pas envoient leur mise sur le numéro de téléphone du chef tontinier. Comment votre structure peut arriver à démanteler tout ça ?



Je dirai simplement que c’est une transposition de l’autre question. Même sur whatsApp, on peut faire un groupe où ce sont des gens qui se connaissent. Si sur ce groupe whatsApp nous faisons la tontine, le cercle est fermé. Maintenant, les autres groupes qui sont ouverts, vous savez l’Etat ne peut mettre un policier derrière chaque individu. Donc c’est un travail, en réalité, de tout le monde. C’est une veille permanente, une veille citoyenne ; c’est-à-dire que lorsque nous ne démasquons pas, on n’est pas les seuls. Nous, nous sommes une entité. Il y a par exemple l’Association professionnelle des Sfd, il y a l’Association professionnelle des Banques, il y a l’Association professionnelle des compagnies d’assurance qui peuvent dénoncer. Mais, vous citoyen qui avez connaissance de ça, si vous dénoncez vous participez à assainir le secteur afin de rassurer nos populations parce que ce que nous faisons c’est pour que nos populations aient confiance aux Systèmes financiers ; et donc ne gardent pas par devers elles leurs ressources, leur épargne pour que soit on les vole, soit un incendie vienne brûler toute l’économie. Et puis quand vous faites la tontine par les réseaux sociaux on peut retracer tout ça. La veille, ce n’est donc pas seulement l’Anssfd. Ce serait utopique de penser qu’une seule structure peut assurer cette veille. Si vous voyez par exemple le Comité de stabilité financière et d’assainissement du secteur de la micro finance, qui est un comité qui assure cette veille permanente, nous on n’est qu’un bras opérationnel ; on est beaucoup plus sur le terrain. Mais c’est divers acteurs qui sont membres de ce comité. Au-delà de cela, nous faisons de la sensibilisation. Tous nos commissariats d’arrondissement ont connaissance de cela. Mais les autorités au niveau local, les autorités au niveau déconcentré : les préfets sont informés de ce travail là. La preuve, dans le Zou avant la fin de l’année, le préfet du Zou a agi, parce qu’on fait un travail où c’est tout le monde qui est concerné. Ce n’est pas une affaire du ministre d’Etat chargé des Finances. La preuve, l’arrêté pris récemment est un arrêté interministériel ; c’est le ministre d’Etat chargé des Finances avec le ministre de la sécurité. Donc la police républicaine est informée. Dès lors que les commissariats sont informés, dès lors que les maires sont informés, cela veut dire que les chefs d’arrondissement peuvent être informés, cela veut dire que les délégués peuvent être informés. L’information c’est pour tout le monde. Mieux, nous faisons les sensibilisations à travers les médias. Et ce travail que vous faites, cette interview participe à assainir, à informer, à éduquer nos populations.

Vous l’avez dit : le travail que vous faites c’est pour que la population ait confiance aux institutions financières. Mais n’est-ce pas la pénibilité des formalités pour accéder à ces institutions qui fait que l’épargnant ou le client préfère l’informel ?



C’est une très bonne question mais je dirai qu’on a dépassé ça aujourd’hui. Les institutions de micro finance sont par excellence les institutions de proximité de nos populations. Il n’y a aucune pénibilité aujourd’hui. Les institutions de micro finance utilisent des outils dont la technologie. Aujourd’hui on collecte l’épargne à partir du numérique. C’est sécurisant, ça rassure la bonne dame, elle n’est pas obligée de se lever pour aller faire un rang au niveau d’une institution financière. On vient chez elle à la maison avec les Tpe (Terminaux de paiement électroniques) ou directement ; dès lors qu’elle donne 10.000 F, elle reçoit le reçu donc ça la rassure. Non seulement elle reçoit le reçu, mais elle a le montant qu’elle a versé sur son téléphone et elle connaît le solde de son compte auprès de l’institution où elle a ouvert un compte. Donc les institutions de micro finance ont fait quand même aujourd’hui des efforts très remarquables pour être suffisamment proches de nos populations. A titre illustratif, rien que les institutions de micro finance, c’est toutes les communes du Bénin qui sont couverte. Il n’y a pas une commune du Bénin où il n’y a pas une institution de micro finance. Je vais au-delà, nous avons plus de 900 points de service sur l’étendue du territoire. Ça veut dire que tout au moins, quand on va prendre un arrondissement, on a au moins une présence physique d’institution de micro finance. Encore que nous sommes au 21ème siècle. On n’a pas besoin de point de service physique. Grâce à cet outil dont je viens de parler, ce sont les agents des institutions qui vont dans les villages, dans les hameaux pour rendre ces services parce qu’on a quitté l’étape de la micro finance et on est dans l’inclusion financière. On veut faire un maillage de telle sorte que toutes les populations les plus démunies, les populations rurales, les populations vulnérables aient accès aux services financiers. Mais quand on parle d’inclusion financière, il y a des critères : c’est l’accès pour tous mais un accès sécurisé, ce n’est pas des informels qui peuvent disparaître, mais à moindre coût et que ce soit responsable. Aujourd’hui, les institutions de micro finance ont investi dans les outils pour pouvoir aller collecter directement l’épargne auprès des populations sans que ces populations ne viennent vers elles pour faire un rang. Même quand vous voulez prendre des crédits, une fois que vous avez rempli les formalités, vous n’avez plus besoin de venir pour prendre l’argent physique et retournez chez vous. On charge votre compte.

A ce jour, combien de Sfd avons-nous sur toute l’étendue du territoire national. Et combien de structures illégales avez-vous épinglées en 2021 par exemple ?



Je dois dire que pour une population de 12 millions d’habitants et avec cette superficie que nous avons, autour de 112000 Km2, nous avons 111 institutions qui sont régulièrement autorisées. Et ça, c’est une liste actualisée qui peut augmenter comme elle peut diminuer. C’est une liste dynamique. Si une institution a des problèmes et quelle constitue une menace, nous retirons l’agrément. Au dernier trimestre de 2021, on a retiré trois agréments. Sinon on était à 114 institutions de micro finance. Egalement, lorsque les gens déposent leur dossier et leur dossier est bon, on donne des agréments. Donc on peut actualiser la liste. Aujourd’hui nous avons 111 institutions qui sont des Sfd régulièrement autorisés et qui couvrent l’étendue du territoire. En termes de points de service, c’est près de 900 points de service que les 111 institutions ont déployés sur l’ensemble du territoire. Je peux vous dire avec certitude qu’il n’y a aucune commune du Bénin où il n’y a pas un point de service physique.

Les structures illégales, c’est une lutte permanente, c’est une veille permanente que nous faisons. En 2021, si j’ai bonne souvenance, nous avons fermé plus d’une trentaine. Lorsque nous avons connaissance, le dossier est porté en même temps au niveau de la Bef (Brigade économique et financière) et les individus sont traduits devant la justice parce que c’est une activité suffisamment réglementée, et ne peut l’exercer que ceux qui ont l’agrément pour le faire.

Nous sommes au terme de cet entretien. Votre mot de la fin



Je voudrais vous remercier pour cette opportunité que vous nous offrez. Je dois dire que nous avons encore du travail. Et le gros lot du travail, c’est de continuer l’éducation financière de nos populations et les institutions de micro finance doivent assurer cela comme il le faut pour que nos populations puissent avoir des services sécurisés. C’est un appel que je lance d’abord à nos populations. Les différentes mesures qui sont prises dans le cadre de cet arrêté ne constituent que des rappels pour protéger les populations des hors-la-loi. Donc l’appel que je leur fais c’est de ne contracter qu’auprès des institutions autorisées. Pour faire leur épargne, il y a une kyrielle d’institutions financières aujourd’hui. En tout état de cause, avant de contracter avec une institution, s’assurer que cette institution est autorisée. C’est important. Egalement, inviter tout le monde à la dénonciation pure et simple des institutions qui ne sont pas autorisées. Les dénonciations sont sous anonymat, on n’a même pas besoin de voir les gens. Il faut dénoncer auprès des institutions locales simplement. Vous êtes dans un quartier, quelqu’un ouvre un kiosque et met Tontine-Epargne-Crédit. Dénoncez ça au Délégué du quartier, qui va remonter ça au commissariat le plus proche. Et on limite les dégâts. Si on laisse faire, on va retomber dans Icc bis. Mais au-delà de tout, les autorités à divers niveaux joueront leur partition pour protéger nos populations. Donc la veille sera renforcée.

Propos recueillis et transcrits par Jacques BOCO
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