Le sujet a refait surface en tout début d’année, après l’annonce de l’échéance électorale de 2023. À l’heure des dernières emplettes pour les législatives, tous les partis politiques, exceptés le Bloc Républicain et l’Union Progressiste, sont restés alerte pour rappeler la nécessité de réviser certaines dispositions du Code électoral. Face à l’offensive engagée sans succès et après le bal des présidents d’institutions au palais, ce fut le tour des anciens présidents de la République d’y mettre des leurs. D’abord Nicéphore Soglo, ensuite Boni Yayi. Ainsi, ce qui paraissait jusqu’alors comme une revendication faite à personne non identifiée est devenu une doléance adressée au Chef de l’exécutif. Doléances parce que le temps joue et le délai semble impossible à tenir s’il faut revoir la caution et la dose du pourcentage pour la proportionnelle.
Trois semaines encore et Patrice Talon ne pourra plus faire aucune manœuvre électoraliste sans tomber sous le risque d’une tentative de tripatouillage. Le protocole de la CEDEAO sur la démocratie interdit en effet de modifier substantiellement les règles électorales dans le semestre qui précède les élections. En juillet 2022, il sera donc trop tard pour les législatives de 2023. Autant dire qu’il y a urgence. Pourtant, une porte de sortie s’offre. Consensus oblige. Avec le consentement d’une large majorité des acteurs politiques, Patrice Talon peut bien s’en remettre aux députés même après l’échéance des trois semaines. L’article 88 de la Constitution le lui permet. Un consensus parlementaire est-il possible ? Pour le moment, la 8è législature ne déborde pas de volonté pour prendre des initiatives dans ce sens. Néanmoins, s’il y a unanimité, il ne leur sera pas vraiment possible de se soustraire à la révision de la loi électorale.
Mais la question essentielle reste celle du timing. Et c’est d’ailleurs ce que masquent les différents déplacements qui se sont produits ces derniers jours vers le palais de la Marina. Après les législatives de 2019, le mode de scrutin proportionnel à un tour avec un seuil de 10% des suffrages exprimés s’est révélé être un obstacle difficile à franchir pour les candidats des petits partis. D’aucuns estiment que le scrutin, tel qu’il est conçu, minimise les petits partis et sur-avantage les grands en leur donnant la totalité des sièges du parlement. L’expérience de 2019 est éloquent à ce sujet. Les deux partis phares de la majorité présidentielle pourraient encore se faire la part belle au détriment des autres partis au regard de ce que ces derniers sont censés peser dans l’opinion. De fait, le jeu de la représentativité s’en trouve faussé et pour les électeurs non représentés, l’Assemblée nationale ne serait pas légitime.
La planche de salut des partis politiques pourrait se résumer à l’adoption d’une loi dérogatoire ou la révision des dispositions du Code électoral si d’aventure le président Talon faisait usage de l’article 88 de la Constitution. Pour rappel, il a déjà renoncé par le passé. Mais aujourd’hui, les enjeux ne sont pas les mêmes et tout pourrait arriver. Pour l’heure, il est difficile de cerner la position de Talon. Et même si le président Talon y est favorable, l’Assemblée nationale aura le dernier mot.