Les formations politiques se réclamant de l’opposition pourront-elles faire front commun à l’instar du grand bouleversement qui s’observe du côté des partis au pouvoir au point de n’avoir, in fine, qu’un ou deux blocs mastodontes ? La question est souvent agitée à chaque veille d’une compétition électorale depuis la mise en œuvre de la réforme du système partisan au Bénin. Et c’est à juste titre puisque l’une des implications de cette réforme, c’est que seuls les partis politiques forts, c’est -à-dire ayant une assise vraiment nationale peuvent prétendre enlever des sièges dans les Communes et au Parlement, passage obligatoire avant de prétendre prendre part à une présidentielle. Avec l’actualité du projet de mise ensemble de l’Union progressiste (Up) et du Parti du renouveau démocratique (Prd) qui continue d’occuper les médias, le débat sur une telle possibilité de regroupement pour les partis politiques se réclamant du camp adverse refait surface. Occasion pour le premier responsable du parti Restaurer la confiance (Rlc), Josias Iréné Agossa d’affirmer que lui, il est prêt à fondre sa formation politique dans un grand ensemble mais fondé sur une vision et des choix idéologiques clairs. Avant Iréné Agossa, il faut dire que courant 2021, celui qui a été consacré chef de file de l’opposition par les textes, notamment Paul Hounkpè avait déjà souhaité que les formations politiques d’opposition s’alignent pour en faire une. Selon lui, une opposition reste une opposition même si à l’intérieur on peut avoir quelques divergences. « Si quelqu’un ne veut pas s’aligner et rester dans la file, c’est qu’il n’est pas de l’opposition », avait déclaré Paul Hounkpè à une télévision en ligne. La préoccupation était même au cœur d’un échange que le président de Rlc a eu avec le chef de file de l’opposition à la faveur d’une audience que ce dernier lui a accordée. Mais jusque-là, rien de concret.
Impossible mise ensemble !
Dans l’opinion, certains Béninois nostalgiques continuent d’appeler de tout leur vœu cette fusion des partis politiques se réclamant de l’opposition. Ils n’hésitent pas à comparer le fruit de cette fusion à l’ancienne formation politique d’opposition Union fait la Nation (Un) des années 2010-2015 au Bénin. Certains observateurs pensent même que cette mise ensemble de l’opposition pourrait amener à avoir des législatives de janvier 2023 comme celles connues par les Sénégalais il y a quelques jours où les partis d’opposition sont légèrement en avance au Parlement. Mais qu’on ne se leurre point ! Le contexte qui a prévalu à l’époque de la défunte » Un » n’est plus le même que celui imposé depuis peu par la réforme du système partisan. Mieux, le contexte au Sénégal favorable aux jeux d’alliance avec tout ce qui va avec est loin d’être celui actuel au pays de Patrice Talon.
Est-il besoin de rappeler qu’au commencement était la Résistance face au pouvoir de la Rupture? Mais après les législatives de 2019 où des partis politiques avaient tout mis en œuvre pour y participer mais en vain, les suspicions se sont accentuées. Des acteurs politiques considérés comme des taupes ont été donc mis en isolement, et la Résistance a ainsi volé en éclats. Candide Azannai, ancien ministre de la Défense nationale du président Patrice Talon s’est ainsi retrouvé dans son coin avec son parti Restaurer l’espoir (Re ). Entre temps, l’ancien parti fort au pouvoir (2006-2016), les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) dont l’ancien chef de l’État Yayi Boni en était le président d’honneur a connu aussi sa crise. Des anciens collaborateurs et ministres de Yayi Boni dont Paul Hounkpè, Alassane Soumanou, Théophile Yarou et consorts en sont devenus, contre toute attente, les hommes forts. L’ancien chef de l’État et d’autres qui lui sont restés fidèles se sont donc retirés pour mettre en place plus tard le parti Les Démocrates. Sans oublier qu’aux premières heures de la réforme du système partisan, l’ancien ministre de Yayi Boni, le professeur Soumanou Toleba avait déjà mis en place un parti Fcdb dont le logo et les couleurs ont semé la confusion dans l’opinion par rapport aux Fcbe. Aussi, Irené Agossa, ancien Directeur général sous Yayi Boni, alors membre du parti Les Démocrates, a, lui aussi, claqué la porte à la lisière de la présidentielle de 2021 pour se porter candidat à cette joute électorale puis après, il a mis en place sa formation politique, Rlc. Donc autant de petits coups, autant de chamboulements qui ont laissé des impacts chez l’une ou l’autre des parties qui étaient toutes ensemble hier. Ces pages truffées de rebondissements spectaculaires à couper le souffle peuvent-elles être tournées aussi facilement pour une fusion des partis se réclamant de l’opposition ? Si en politique rien n’est impossible, dans un contexte où l’on soupçonne tel acteur politique ou tel parti se réclamant de l’opposition comme une fabrication du pouvoir de la Rupture, on peut se hasarder à dire, sans risque de se tromper, qu’il sera difficile voire impossible, de voir Éric Houndété, Candide Azannai, Paul Hounkpè, Soumanou Toleba, Irené Agossa, Expérience Tèbè du parti au symbole du balai (Mpl) et bien d’autres se mettre autour d’une même table pour, au finish, créer un géant parti de l’opposition béninoise dans la perspective de 2023 et 2026. Le contraire relèverait tout simplement de la thaumaturgie !