Dans cet entretien, Lionel Yétongnon, médecin généraliste a mis en exergue les manifestations, les modes de transmission , les prises en charge et les préventions des hépatites.
L’hépatite est connue comme une maladie qui tue de façon silencieuse. Comment peut-on mieux l’expliquer à ceux qui l’ignorent encore ?
L’hépatite est une inflammation du foie causée par des substances toxiques ou par des virus. Une inflammation étant un processus par lequel l’organisme réagit face à une agression extérieure.
Cette maladie, semble t-il, existe sous plusieurs formes. Pouvez-vous donner plus de détails sur ces différents types ?
Oui, il existe plusieurs types d’hépatites. Nous avons les hépatites infectieuses. Parmis celles-ci, on dénombre les hépatites virales (les plus fréquentes), les hépatites bactériennes, les hépatites parasitaires et les hépatites mycosiques. Ensuite, il y a les hepatites alcooliques et toxiques. Enfin, on a les hépatites médicamenteuses. A travers les types, on retrouve en même temps les causes de ces diverses hépatites. Vous remarquerez que l’accent est mis sur les hépatites virales car elles sont très fréquentes et peuvent devenir chroniques. Par ailleurs, les hépatites peuvent être classées selon le mode d’installation en hépatite aiguë, hépatite fulminante et hépatite chronique.On parle d’hépatite aiguë lorsque l’évolution de la maladie est inférieure à 3 mois, par exemple l’hépatite A. On parle d’hépatite fulminante lorsque la durée d’évolution est très brève de l’ordre de quelques jours à quelques semaines. Ce type d’hépatite est mortelle et même si elle ne tue pas, elle laisse des séquelles lourdes. C’est le cas des hépatites médicamenteuses. Les hépatites chroniques ont une durée d’évolution supérieure ou égale à 3 mois.
Les hépatites virales sont apparemment les plus fréquentes. Comment se manifestent-elles alors ?
Parmi les hépatites virales, on distingue selon le classement, les hépatites virales A, B, C, D et E et elles sont contagieuses. L’hépatite A s’attrape dans l’enfance et est définie comme une maladie du péril hydrofécal (contamination par les selles ou les mains souillées). Les hépatites B et C sont chroniques. L’hépatite B peut s’attraper par les sécrétions (salive, sueur, sécrétions vaginales et spermatiques lors des rapports sexuels, transmission verticale mère-enfant)
L’hépatite C se transmet par le sang, les rapports sexuels avec la possibilité de transmission de la mère à l’enfant par le contact sanguin, souvent retrouvée chez les agents de santé. Le type D ou Delta s’associe au type B, donc mêmes modes de transmission. Le type E plus rare se transmet par les selles contaminées. Les signes des hépatites sont variables. On distingue les formes symptomatiques pour les hépatites virales aiguës et les formes asymptomatiques pour les hépatites virales chroniques. Pour les formes symptomatiques, on rencontre une phase pré-ictérique caractérisée par une asthénie qui est fréquente et des troubles digestifs variables. Après, on a une phase ictérique avec la présence d’ictère, cest-à-dire avec une coloration jaune des teguments et des muqueuses, puis une autre phase anictérique avec asthénie (fatigues générales). Contrairement aux formes symptomatiques, les formes asymptomatiques sont caractérisées par l’absence de signes.
De toutes ces formes d’hépatites virales (A,B,C,D Et E), laquelle rencontrez vous souvent dans les centres de santé ?
L’hépatite B et C sont les plus rencontrées. Elles sont très chroniques et nuisent la santé.
Ces deux formes d’hépatites virales sont - elles mortelles ?
Bien sûr que oui. Les hépatites chroniques (B, C) aboutissent malheureusement dans quelques cas à une destruction du foie (cirrhose...) à l’origine d’une insuffisance hépatique entraînant la mort. L’hépatite B et l’hépatite C étaient responsables en 2019 de 1,4 millions de décès dans le monde avec une prévalence (nouveaux cas) de 6,1% pour l’Afrique.
Quels sont les traitements destinés à l’hépatite ?
Toutes les hépatites ne se traitent pas, certaines guérissent spontanément. Seules celles de types virales B et C qui sont chroniques. C’est pourquoi un bilan initial est nécessaire afin d’apprécier l’évolution de la maladie. Ce n’est seulement qu’après cela qu’un traitement est décidé. Les thérapies font souvent appel à des antiviraux (à base d’anticorps monoclonaux...). Mais, il faut noter que ces thérapies coûtent chères (même s’il existe un programme national de lutte contre les hépatites qui participe activement à la prise en charge des malades). Et les rechutes restent possibles malgré des traitements bien conduits. Notons qu’il y a des traitements qui ne marchent pas toujours.
Quelles dispositions peut-on conseiller pour le prévenir chez quelq’un qui n’en souffre pas ?
Pour ceux qui ne souffrent pas d’hépatite, la vaccination reste la meilleure et principale prévention.
Sous le zèle de l’amour, des partenaires s’embrassent sans se soucier de cette maladie . Qu’en dites vous ?
Ah ! Il serait bon qu’ils pensent à faire leur test de sérologie de l’hépatite B car cette dernière se transmet par la salive ! Par conséquent si l’un des partenaires est infecté, il y a de grands risques que l’autre le soit aussi.
Votre mot de la fin ?
Les hépatites entraînent de nombreux cas de décès dans le monde et surtout en Afrique. Leur symptomatologie extrêmement variée est souvent quasi absente. Ce qui retarde le diagnostic et mène le patient vers des complications irréversibles voire vers la mort au stade final. C’est pourquoi il faut axer la lutte contre les hépatites sur la prévention à travers la vaccination.
Propos recueillis par Irène Dotché (Stag)