Le dossier relatif aux difficultés que rencontrent les populations béninoises en matière de fourniture d’énergie électrique était hier en débat à l’hémicycle. Il a été abordé à travers quatre questions des députés au gouvernement. Les explications de l’Exécutif ont été fournies par le ministre en charge des Travaux publics, Aké Natondé, en lieu et place de son collègue chargé de l’Energie.
Par Thibaud C. NAGNONHOU
Quelles sont les ressources mises à la disposition du Bénin par le gouvernement de la Turquie pour la construction du barrage hydroélectrique sur le fleuve Ouémé à Kétou ?
Quel est l’état de fonctionnement de la ligne électrique mise à la disposition des communes de Sakété, d’Ifangni, de Bonou et d’Avrankou par la Communauté électrique du Bénin (CEB/NEPA) ?
Comment avance le programme d’extension des réseaux électriques dans toutes les communes, ainsi que les projets d’électrification rurale au Bénin ? Quels sont les désagréments causés par les coupures intempestives du courant électrique dans nos villes et les mesures prises par le gouvernement pour y mettre fin ? Ce sont les quatre questions avec débats que les députés ont posées au gouvernement dans le cadre de leur mission de contrôle de l’action gouvernementale.
Le nombre de ces questions montre combien de fois les députés, toutes tendances politiques confondues, sont préoccupés par la crise énergétique au Bénin.
Les explications du gouvernement
Le ministre des Travaux publics et des Transports, Aké Natondé, représentant son collègue en charge de l’Energie, a fourni des explications aux députés sur chacune de ces questions. De ses réponses, il ressort que les différentes coupures observées émanent des délestages opérés par la CEB suite au déficit énergétique actuel.
Le gouvernement du Bénin a pris des dispositions pour démarrer la Centrale électrique de Maria Gléta dans la commune d’Abomey-Calavi aux heures de pointe pour pallier ce déficit. Des négociations, assure-t-il, sont en cours avec d’autres producteurs indépendants pour augmenter la capacité de la production nationale.
C’est d’ailleurs dans ce cadre que le chef de l’Etat, Boni Yayi lors de son voyage en Turquie en mars 2013, est entré en contact avec un opérateur économique turc de la société MAPA constructions. Celui-ci a décidé de construire clé en main un barrage électrique de 128 MW sur le fleuve Ouémé à Kétou pour un montant de 150 milliards de dollars.
Les travaux de l’ouvrage ont été lancés en mars 2013 à Kétou en présence de l’opérateur privé turc et du chef de l’Etat. Lors de sa dernière visite en Turquie à l’occasion des Journées économiques turques en décembre 2013, le chef de l’Etat a relancé les négociations avec la société MAPA constructions pour la signature du contrat. Mais ces négociations n’ont pu aboutir comme cela se doit, révèle Aké Natondé. L’opérateur privé turc a renoncé à l’option du projet clé en main. Il souhaite construire désormais le projet en BOT (construire, gérer et transférer au bout d’un certain temps).
Le gouvernement est en train d’examiner la proposition du partenaire privé turc. Les négociations sont en cours pour finaliser cet accord pour que le projet entre dans sa phase active au cours de cette année 2014.
En attendant, le gouvernement poursuit le renforcement de la capacité énergétique de son réseau électrique. Ce qui l’amène à diversifier ses sources d’approvisionnement en énergie électrique. Comme c’est le cas du partenariat entre la CEB et le Nigeria via Sakété.
Le ministre a expliqué qu’un projet de la Banque mondiale est en cours pour renforcer la ligne électrique des communes de Sakété, d’Ifangni, de Bonou et d’Avrankou par la Communauté électrique du Bénin (CEB/NEPA).
Ce qui permettra de juguler un tant soit peu les difficultés de ces populations en matière énergétique.
Par rapport au projet d’électrification rurale, le gouvernement a expliqué que le projet d’électrification de 58 localités est achevé. C’est celui concernant les 67 localités qui vient d’être lancé par le gouvernement, a souligné Aké Natondé. Il a assuré que le chef de l’Etat continue de rechercher les partenaires pour rendre le Bénin autosuffisant en matière énergétique. L’objectif est d’atteindre 1500 MW d’ici à 2015, a annoncé le représentant du ministre en charge de l’Energie.
Dogo bis, du vent ?
Lors du débat, certains députés ont trouvé que le gouvernement fait d’énormes efforts pour rendre le Bénin autonome en matière énergétique. Selon eux, si les présidents de la République avaient, depuis 1960, la vision de diversifier les sources de production de l’énergie, le Bénin ne serait plus à ce stade. Seulement, ils recommandent que le gouvernement se dote d’un tableau de bord pour faire le point par projet, par bailleurs de fonds et par localité pour un développement équitable du pays.
Mais à côté de ces députés, d’autres pour la plupart de l’Opposition ont dénoncé le projet. Pour eux, il y a trop de propagande politique et de manipulation autour de l’initiative. Plus pessimiste, le député Antoine Kolawolé Idji natif de Kétou fait remarquer qu’il n’y aura pas de barrage hydroélectrique. « Je me demande par quel miracle le barrage hydroélectrique sera réalisé d’autant qu’il n’y a pas de fleuve ni de ruisseau à Dogo, le hameau de Kétou devant abriter le projet », souligne-t-il.
Il doute par ailleurs de la sincérité et de la capacité financière de l’opérateur économique turc à construire l’ouvrage. Une réserve que partage son collègue Eric Houndété qui réclame l’urgence pour l’Assemblée nationale de voter la loi sur le BOT pour mettre en place un cadre légal sur ce mode de partenariat public-privé....