Kwami Da Costa est un artiste plasticien togolais. Né à Lomé, capitale du Togo, il a préféré les arts plastiques à sa formation de base, la menuiserie. Dès lors, il considère désormais sa carrière artistique comme une vocation. C’est aussi pour lui un moyen d’en savoir plus sur certaines réalités de ses origines, Agouè Digo, une localité du Bénin. Dans cet entretien il donne plus de détail sur son parcours.
Dites-nous comment vous avez croisé les arts plastiques sur votre chemin ?
Je peux dire que c’est une vocation. J’ai reçu l’appel des arts en 2001 quand j’étais menuisier. Ce qui m’a conduit vers l’atelier de Sambiani Kassan, artiste plasticien togolais que j’appelle mon mentor.
Quel est votre parcours dans cette aventure ?
Je dirai que c’est un parcours très riche et plein d’expériences. En effet, j’ai fait la menuiserie pendant cinq ans. Un jour, Sambiani Kassan est venu commander des cadres dans mon atelier. Il n’est pas loin de chez moi. Alors je l’ai suivi et arrivé chez lui, j’ai découvert ses œuvres. J’ai été séduit par son métier. Il n’a pas hésité à m’ouvrir les portes de son atelier. Bien qu’il soit une personne vivant avec un handicap, il a la facilité d’apporter sa touche de créativité dans tout ce que je faisais dans son atelier. Jusqu’aujourd’hui, cette vocation demeure, et l’aventure se poursuit.
En terme d’expositions solo ou collective, combien à peu près en avez-vous déjà à votre actif ?
Il faut signaler que j’ai commencé à exposer à Lomé dès mes débuts. J’ai continué dans la même lancée et en 2003, j’ai eu le prix de ONUSIDA. C’est un concours organisé par les Nations-Unies. En 2022, j’ai eu la bourse Campus France pour une formation de deux mois à l’école des ‘’Beaux-arts’’ de Paris. C’est dans cette même dynamique que j’ai participé à plusieurs expositions collectives aussi bien ici qu’ailleurs.
Vous avez aussi eu des opportunités d’exposer ailleurs que dans votre pays. Comment arrivez-vous à avoir ces occasions ?
Je peux dire que j’ai plus exposé ailleurs que dans mon pays. C’est surtout ma curiosité à chercher à aller voir ce qui se passe chez les autres dans le domaine des arts plastiques. Un artiste doit s’ouvrir aux autres. Il doit pouvoir être connecté aux autres. C’est ainsi que j’ai eu l’occasion de participer à de grands événements du secteur comme : la 4ème édition de ‘’Dig Where You Stand’’ à la Fondation Zinsou à Ouidah au Bénin. Cette exposition qui a connu le soutien du gouvernement béninois prendra fin en décembre prochain. En 2023, j’ai également participé à la 3ème édition de ‘’Dig Where You Stand’’ au Palais de Lomé. Il y a aussi l’exposition collective à laquelle j’ai participé cette année à ‘’Arts Vagabonds’’ à Cotonou au Bénin sans oublier la résidence de recherche à Villa Karo à Grand-Popo au Bénin et l’exposition duo dont le thème est ‘’la dualité’’ au Centre Culturel ATEBAI à Lomé au Togo. J’ai pris part à l’exposition collective à ‘’Alexis galerie’’ au Nigeria en 2015. J’ai été sélectionné pour la Biennale de Kampala en 2014. En 2015, la résidence artistique au Congo Brazzaville organisée par ‘’Atelier Sahm’’, la Biennale de Dakar OFF (Tant que les arbres s’enracineront dans la terre) à la résidence de France en 2022, la résidence Artmessiamé à Bandjoun Station créée par Barthélemy Toguo au Cameroun en 2023, pour ne citer ceux-là.
Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui dans les arts plastiques ?
Je dirai que c’est la liberté d’expression qu’on y trouve.
D’après vous, comment se portent les arts plastiques du Togo ?
Actuellement, tout se passe bien dans le secteur des arts togolais. Une attention particulière est donnée à l’art togolais et d’ici peu, les choses seront davantage mises sur les rails.
Quelles sont les thématiques que vous abordez dans vos concepts ?
Je dois souligner que je suis un artiste qui travaille pour comprendre de façon approfondie mon identité. Cela m’amène à aborder plusieurs thématiques notamment celles relatives à la mort, à la réincarnation communément appelé ‘’Djoto’’ en langue Ewé et à l’enterrement du placenta dans notre tradition. Je creuse dans les rites qui entourent l’enterrement du placenta, comment il faut d’abord consulter l’oracle, l’utilisation d’hysope communément appelé ‘’Kpatiman’’ en Ewé et bien d’autres. C’est dans cette même optique que je suis en résidence à la Villa Karo, un endroit très calme pour un artiste. C’est un travail de recherche sur la richesse endogène dans la tradition africaine que j’effectue là. Grâce à cette recherche, j’ai aussi découvert mon village natal. J’y ai appris beaucoup de choses. Ce travail de recherche est effectué avec les élèves et m’a permis de découvrir l’utilité de cette valeur ancrée dans les élèves et les étudiants du milieu dès le bas âge.
Qui sont ceux qui vous inspirent plus dans ce domaine ?
D’abord mon mentor Sambiani Kassan. Il y a aussi d’autres artistes de renom comme Clémént GBEGNO AYIKOUE, Ras Sankara Agboka, Kokou Ferdinand Makouvia et plein d’autres d’ici et d’ailleurs.
Pensez-vous qu’aujourd’hui, les arts plastiques peuvent nourrir son homme ?
Bien sûr que l’art plastique peut nourrir son homme. Moi, je vis de mon art. Je dirai que je respire l’art tous les jours lorsque Dieu me donne la chance de me réveiller. Tout ce que j’ai réalisé, je l’ai fait grâce à l’art.
Que faites-vous d’autre à part les arts plastiques ?
Rien.
Parlez-nous des moments forts qui ont marqué votre parcours dans cette aventure
Je me rappelle que je dormais sur des cartons au cours de certains voyages en oubliant mon confort. Les moments où je voulais coûte-coûte réussir. Aujourd’hui, je peux participer à des expositions de grandes envergures avec des artistes de renommée internationale. Ce sont pour moi des moments forts. Je peux aussi citer par exemple : le off de la Biennale de Dakar sur le thème ‘’FAIRE LIEU : L’ART EN ESPACE’’ organisé par Barthémy Toguo , ‘’Dig Where You Stand’’ 3ème et 4ème éditions dont la curatrice est la Togolaise vivant aux USA Délali Ayivi et le directeur fondateur, Azu Nugboagu du Nigéria.
Quels sont vos projets ?
J’ai des projets en cours que je ne veux pas dévoiler pour le moment. Par ailleurs, il faut rappeler que, sur le plan national, des projets sont en vue comme ‘’Carrefour Des Arts Plastiques du Togo’’. C’est un évènement qui doit rassembler les artistes nationaux et internationaux. Ils vont parcourir la ville de Lomé. Je suis le président fondateur de l’association qui porte ce projet. Il y a le projet Emomé Art (L’art de la rue) qui rassemble tous les performeurs nationaux et internationaux. Le président de ce projet est Ras Sankara Agboka. Il y a aussi le projet Artmessiamé qui réunit les artistes nationaux et certains étudiants diplômés des Beaux-Arts de Paris créé par Kokou Ferdinand Makouvia. Il faut signaler qu’un ami artiste, Clémént Gbègno Ayikoué joue un rôle très important dans la réalisation de ces projets. Il porte son regard de collectionneur sur la scène artistique togolaise en général. Avec lui des choses se font en coulisses.
Un message pour clore cet entretien
Je vous remercie de l’opportunité que vous avez offerte. L’art plastique est une aventure qui n’est pas du tout facile. C’est pourquoi, chez moi, on dit souvent que l’art appartient aux durs. Il faut y croire.