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Bénin: le mythique marché de Dantokpa vit ses derniers instants

Publié le jeudi 31 octobre 2024  |  AFP
Circulation
© Autre presse par DR
Circulation difficille dans la zone du marché de Dantokpa
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Odette Adigbe, commerçante de 56 ans, n'est pas la seule à appréhender la délocalisation de
l'énorme marché de Dantokpa, l'un des plus grands d'Afrique de l'ouest, situé au coeur de
Cotonou, la capitale économique du Bénin.
"Notre peur avec les nouveaux sites que l’on nous propose, c’est que si nous bougeons nous
allons perdre la clientèle", explique-t-elle derrière son étalage d’huile et de légumes.
Le gouvernement béninois a décidé de la destruction de ce marché qui s'étend sur 19
hectares pour cause d'insalubrité et prévoit d'installer d'ici 2026 ses commerçants dans 35
nouveaux marchés en cours de construction dans Cotonou et sa périphérie.
Aucune date n'a encore été annoncée, mais les commerçants savent que l'échéance
approche.
Au cours des dernières années, le marché de Dantokpa a connu des incendies répétitifs qui
ont souvent mis en dificulté les pompiers qui peinaient à accéder aux lieux des départ de
feux.
Ces incendies, ajoutés également à l’insalubrité du marché traversé par des égouts et des
caniveaux putrides, ont convaincu les autorités béninoises de lancer ce grand projet de
rénovation.
"La question de l’insalubrité est un faux problème. Le marché était déjà dans cet état quand
j'ai démarré mes activités il y a 20 ans", abonde de son côté Odette Adigbe.
"Si c’est un problème de salubrité, on peut prendre des mesures d’assainissement au lieu de
nous déloger de force", ajoute-elle.
- Divinité protectrice -
Face aux craintes, Mahougnon Aguèmon Amzat, chef du quartier qui abrite le marché, tente
de rassurer les commerçants.

"Je ne plaide pas pour la délocalisation, je plaide pour l'épanouissement des clients et
vendeuses du marché", défend-il.
Autour de lui, il vante les mérites des nouveaux sites disposant de plus d’espace et des
infrastructures adéquates, selon lui.
"Personne n’est venu nous voir. Nous n’avons aucune information. Nous savons qu’ils ont
construit un marché à Akassato et nous entendons sur les ondes que des gens doivent
rejoindre le site. Mais qui et dans quelles conditions, personne n’en sait rien", déplore Edith
Agassin, la cinquantaine.
"Ici, nous avons déjà du mal à faire des ventes, donc imaginez qu’on soit obligé d’aller sur le
nouveau site", poursuit Brigitte Akloué Mahoutin, 60 ans, une vendeuse de volailles installée
à Dantokpa depuis plus de 40 ans.
Les commerçants, souvent adeptes de la religion vaudou, redoutent particulièrement de
perdre les faveurs de la divinité protectrice du marché, appelée Dan et représentée sous la
forme d'un serpent, qui leur apporte la clientèle.
Le vaudou, basé sur les forces de la nature et le lien avec les ancêtres dont les représentations
peuvent être des objets ou des éléments naturels, est né dans le royaume du Dahomey, qui
couvrait le Bénin et le Togo actuels.
"Nous ne pouvons pas laisser la divinité protectrice du marché et tout ce qui est déjà sur ce
site pour faciliter les activités commerciales et courir nous installer sur un autre", prévient
Nafissatou Abayomi.
Aïnadou Abôhangbé Kanaï, grande prêtresse de Dan, se veut rassurante. "Les vendeurs n'ont
rien à craindre", il sufit de "consulter l'oracle" pour déterminer sous la protection de quelle
divinité placer les nouveaux marchés.
- Bénéfique écologique -
"Sur les 20 marchés qui sont déjà construits, environ 30.000 places sont déjà disponibles
pour être allouées aux marchands", assure Eunice Loisel Kinifo, la directrice de l’Agence
nationale de gestion des marchés (Anagem).
Pour certains experts économiques, comme Côme Gangbè, ce marché est un vivier pour
l'économie nationale mais la trop grande concentration des commerces a besoin d'être
modifiée.
Selon lui, cette transformation ne sera pas sans conséquences.
"Il faut que la mayonnaise ait le temps de prendre. Il y aura un moment de flottement... Ces
femmes-là savent qu'elles doivent se préparer à ça", prévoit-il.
La délocalisation du marché de Dantokpa sera également bénéfique pour l’environnement,
selon Didier Hubert Madafimè, expert en gestion des risques et catastrophes.

"Si on arrive à déplacer le marché, cela va être bien pour la lagune", explique M.Madafimè.
Le marché est responsable de la pollution de la lagune, ce qui constitue actuellement "un
danger pour la ville de Cotonou" et ses 1.2 million d'habitants.
jm/ks/fvl/cpy
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