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Le Matinal N° 4276 du 28/1/2014

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Réactions des praticiens du Droit : Jacques Migan, Avocat à la Cour, Ancien Bâtonnier - « Je lui dirai de ramener la balle à terre »
Publié le mercredi 29 janvier 2014   |  Le Matinal


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© Autre presse par DR
« Si le RAMU est réalisable, la Caisse Nationale de Sécurité Sociale l’aurait réalisé » dixit Me Jacques Migan


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Quelles sont vos premières impressions après avoir écouté lundi dernier le Chef de l’Etat face aux jeunes ?

Je crois que ce qui s’est passé est regrettable parce que mon pays n’a pas besoin aujourd’hui de telle déclaration du Chef de l’Etat. Je voudrais rappeler ce qui s’était passé le 1er août 2012 où pendant plusieurs heures, le Chef de l’Etat avait dit des choses inadmissibles. Avec recul, je me suis dit que le Chef de l’Etat, à travers cette déclaration aux jeunes, est dans l’impasse. Il était dépassé, traqué. Il ne sait plus où donner de la tête. Tout s’écroule devant lui.

C’était une occasion pour lui de dire tout ce qu’il avait sur le cœur, puisqu’il refuse le dialogue. Ce qu’il a dit sur les travailleurs, les syndicalistes n’avait rien à voir avec la jeunesse. A leur sortie d’audience certains jeunes étaient venus me voir. Ils étaient tristes, frustrés parce qu’ils attendaient des choses crédibles.

Il leur a quand même parlé de l’auto emploi et de la Fonction publique qui est aujourd’hui saturée ?

Ce n’est pas la Fonction publique qui crée l’emploi. Ce n’est pas ce que les jeunes sont allés dire ou veulent dire au Chef de l’Etat. Ils ne lui demandent pas cela puisqu’ils savent qu’ils n’ont aucune chance d’entrer dans la Fonction publique dans la mesure où il y a la tricherie. Pour rester dans la Fonction publique aujourd’hui, il faut être du pouvoir. Ils le savent déjà et ce n’était pas leur préoccupation. Ce qu’ils voulaient dire au Chef de l’Etat c’est d’accepter que ceux qui créent l’emploi, qu’on leur laisse la main.

Pour vous, le cadre était mal choisi ?

Les jeunes font 60% de la population. Et sur les 60%, il y a 80% qui sont au chômage. Ils sont partis dire au Chef de l’Etat comment faire pour qu’il y ait création d’emploi. Comment faire pour que les jeunes créent l’emploi.

Mais c’est une façon de leur dire oui je suis en train de vous créer les conditions, mais je n’ai pas les coudées franches. Il a dit que la fronde sociale est politique.

Ce que le Chef de l’Etat a oublié de dire est que quand les syndicalistes ont voulu marcher un 27 décembre 2013, c’est justement pour dire que ca ne va pas. Mais, ils ne voulaient pas utiliser la violence.

Mais le Chef de l’Etat a dit qu’il ne doit rien aux travailleurs et que son gouvernement a apuré toutes les dettes ?

Si tel est le cas, quand vous prenez un travailleur aujourd’hui qui est au Smig, 33.000FCfa arrondissons. Qu’est-ce qu’il peut faire lorsque son loyer est à 12.000FCfa. Qu’est-ce qu’il peut faire lorsque ses enfants sont dans les mêmes écoles que ceux qui sont au pouvoir qu’il ne peut même pas payer la scolarité. Que peut-il faire s’il n’a pas d’argent pour nourrir ses enfants. Les conditions de vie et de travail sont complètement détériorées. C’est ce qu’ils ont voulu dire en alertant l’opinion nationale. Les travailleurs ne sont pas fous. Ils ne se sont pas levés pour aller en grève. La grève est partie d’où ? C’est parce qu’on les a blessés.
Pour le Chef de l’Etat, c’est de l’encre rouge

L’encre rouge à l’hôpital ? Puisqu’on les avait montrés à l’hôpital. Si tel est le cas, pourquoi les avoir empêché de faire ce qu’ils voulaient faire. C’est pourquoi je dis que nous sommes d’avis pour qu’il y ait dialogue parce que le Chef de l’Etat comme je vous l’ai dit est acculé.

Il a également accusé les magistrats car pour lui, quand le Conseil supérieur de la magistrature parle, l’Unamab doit se taire.

Le Chef de l’Etat ne constitue pas toutes les Institutions. Il est une institution comme l’Assemblée, la Cour constitutionnelle. Il est élu comme les députés. Chacun est dans son rôle et le Président Nago le lui rappelle de plus en plus.
Ce que demandent les magistrats est fondé. Ils disent ceci : Les nominations il faut qu’on les fasse bien, qu’on respecte la hiérarchie, le justiciable. Comment aller dans certaines juridictions et ne pas trouver de magistrats. Des juridictions où les gens ne sont pas nommés, ou bien on nomme des gens qui viennent de commencer ou qui ont commencé il n’y a pas longtemps en lieu et place de leurs ainés. Pourquoi fait-on la promotion des uns et on oublie les autres ? Les magistrats demandent des choses faisables. Ils ne veulent pas que la politique s’immisce dans le judiciaire. Il ne revient pas à l’Exécutif de mettre en péril le pouvoir judiciaire. Si par malheur, tel que les choses se passent, on ne donne pas satisfaction aux magistrats, c’est le béninois lambda qui sera perdant.

S’il vous était donné de conseiller le Chef de l’Etat

Si j’ai l’occasion de rencontrer le Chef de l’Etat, je lui dirai de ramener la balle à terre, de créer des conditions d’une rencontre avec toutes les forces de ce pays. Il faut qu’on aille aux assises. Je veux que ces assises soient inclusives et que le pouvoir aussi y participe comme Kérékou a accepté cette conférence qui a donné cette démocratie qu’on a aujourd’hui. Je dirai au Chef de l’Etat de pardonner, de finir ses deux années qui lui restent en beauté. Je dirai au Chef de l’Etat de comprendre que tout a une fin. Je lui dirai de se rappeler de ce qui s’est passé au cours de son premier mandat où il avait une majorité mais les groupes G13, G4 et autres ont commencé par se constituer. Je lui dirai de ne pas faire ce qui n’est pas prévu par la Constitution. Je lui dirai de respecter les normes. Je lui dirai que je suis prêt à l’accompagner mais à condition qu’il respecte les normes, la Constitution. Qu’il joue franc jeu, qu’il soit un homme crédible. Le camouflet qu’il a eu avec les députés malgré sa majorité, les décisions qu’il y a eues ici et en France devraient lui servir de leçon. Je lui dirai : nous sommes dans un contexte d’échec total. Echec au niveau de la jeunesse, de la santé, de la sécurité, des infrastructures. Mais est-ce qu’on peut sortir de ce marasme dans lequel nous nous retrouvons par la faute du Chef de l’Etat ? Je dis oui. Il faut associer tout le monde. Tous ceux qui sont à l’extérieur. Tous ceux qui se sont exilés, les dignes fils de ce pays. Pourquoi le Chef de l’Etat ne peut pas pardonner Talon ? Si Talon lui dis aujourd’hui je laisse tout. Si Yayi est vraiment patriote, qu’il crée les conditions pour que les fils de ce pays, les opérateurs comme Talon, Ajavon, Rodriguez, Fagbohoun et bien d’autres en fuite investissent dans leur pays. Les étrangers ne viendront pas investir au Bénin. Mais c’est le contraire qu’on constate. Les employés de Pvi sont où aujourd’hui ? Au Chômage. C’est ce que les jeunes veulent dire au Chef de l’Etat, ne les a pas écoutés. Ils ont dit nous sommes allés le voir pour qu’il nous aide à résoudre nos problèmes et le Chef de l‘Etat s’est mis à insulter nos parents. Ils ont bien dit nos parents. Ces responsables syndicaux, ces travailleurs ce sont leurs parents. Et le Chef de l’Etat les a insultés devant eux. Cela a été un monologue.

+Photo Adjaka
Le Magistrat Michel Adjaka, président de l’Unamab
« Il faut rapidement retourner les salaires défalqués, sinon … »
Que vous voulez faire du pays ? C’est le Président de la République qui vous a posé cette question. Surtout que vous avez décidé de durcir le ton en passant de trois à cinq jours de grève à partir de la semaine prochaine ?

Je ne réponds pas du pays. Je réponds au nom de l’Union nationale des magistrats du Bénin. Nous sommes en grève pour des raisons que vous savez. Donc, tant que nos revendications ne seront pas satisfaites, nous allons continuer à les revendiquer. Il n’y a pas de soucis à se faire. Dans un pays où les lois ne sont pas respectées, dans un pays où force est au bras de fer et à la confrontation, ce n’est pas au président de l’Unamab qu’il faut demander ce que l’on veut faire du pays.

Le chef de l’Etat a décidé par le biais du Conseil supérieur de la magistrature de corriger les nominations. Il a suffisamment parlé de vous hier. Si vous décidez de durcir le mouvement, ce serait un véritable bras de fer. Est-ce qu’il ne faudra pas ramener la balle à terre ?

Nous sommes en grève depuis plus de sept semaines pour exiger du gouvernement la correction des nominations irrégulières prononcées en conseil des ministres du 28 mai 2013. Face à cette irrégularité reconnue et acceptée, on vient nous accueillir avec une autre irrégularité, avec une autre violation des textes, à savoir les défalcations sur salaires. Si tant est qu’on veut discuter avec nous, on n’aurait pas opté pour la politique de la provocation, du mépris, du bras de fer permanent. Nous ne sommes pas contre le dialogue. Mais avant que ce dialogue ne s’instaure, il faut rapidement retourner les salaires défalqués, sinon je ne vois pas comment nous pouvons faire le déplacement pour aller à cette table de négociation.

Mais, on dit que : « qui n’a pas travaillé, n’a pas droit au salaire ».

Voilà l’amalgame. Nous sommes dans un pays d’amalgames. En 2012, les magistrats ont été défalqués. Mais, est-ce que vous avez entendu un magistrat réclamer les défalcations faites sur les salaires ? Pourquoi cette fois-ci les magistrats demandent au gouvernement d’annuler les défalcations illégales ? C’est parce que lorsqu’on va en grève pour revendiquer un droit acquis, le respect des libertés fondamentales ou les droits syndicaux, on ne fait pas l’objet de défalcations. Sur notre plate-forme revendicative, le premier point qui s’y trouve inscrit est la sécurité de tous les magistrats. Le droit à la sécurité est un droit fondamental. Lorsqu’on va en grève pour un tel motif, on ne défalque pas. Lorsqu’on le fait, on fait l’option de bras de fer, de la violation flagrante des textes. C’est de ça qu’il s’agit.

Selon le Chef de l’Etat, les magistrats sont manipulés. Les valises circulent. Votre réaction ?

C’est la solution de facilité. C’est une solution de facilité qui ne peut pas prospérer en l’état. Dans un Etat où vous violez les textes à l’égard de ceux qui sont chargés de les faire respecter, qu’est-ce que vous voulez d’autre qu’on fasse ? C’est quelqu’un qui trouve que chaque action objective qu’on mène dans ce pays est forcément dans cette logique. Moi, je ne suis pas dans cette logique-là. Je n’ai pas été éduqué avec de l’argent gagné facilement. Il revient à ceux qui ont été éduqués avec de l’argent gagné facilement de penser que tout le monde est manipulé.

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