Les autorités béninoises ont fait l’option de lutter contre l’entrée illégale de l’essence de contrebande en provenance du Nigéria sur leur territoire. Mais aussi paradoxal que cela puisse paraître, on ne comprend pas pourquoi ces mêmes autorités courent aujourd’hui après le courant électrique que produit le même Nigeria dont l’essence est taxée de Kpayo.
Qu’on le veuille ou non, le Bénin reste et demeure, malgré sa souveraineté dont le 52è anniversaire a été célébré le 1er août 2012, le 37è Etat du Nigeria fédéral. Ce n’est pas de gaité de cœur qu’on le dit. Mais les réalités sont là. Il a suffi d’une défaillance technique au niveau de la Nepa, la grande compagnie nationale de production d’énergie électrique de ce géant voisin de l’Est, pour que toute la ville de Cotonou et une bonne partie du Bénin soient plongées dans le noir dans la nuit du mardi 19 au mercredi 20 mars 2013. Et ironie du sort, beaucoup de ménages ont eu recours à l’essence frelatée venue du Nigeria pour alimenter les groupes électrogènes qu’ils ont achetés encore sur le marché nigérian. Pour le moins qu’on puisse dire, le délestage qu’a vécu notre pays du mardi 19 au mercredi 20 mars 2013 doit ramener nos autorités à voir la réalité en face. Et ceci, par rapport à certaines options qu’elles font. Dans l’opinion publique, les commentaires vont en tout cas bon train. « Si le gouvernement est incapable de nous fournir à plein temps l’énergie électrique, qu’il nous permette tout au moins d’avoir accès à l’essence bon marché en provenance du Nigeria pour faire démarrer nos générateurs électriques », estime un conducteur de taxi-moto, apparemment agacé par les coupures intempestives de courant. « Ils nous ont tout promis. On n’a rien eu. Ce n’est pas un problème. Mais de grâce ! Qu’ils nous laissent, surtout qu’ils ont compris que tout ce qui vient du Nigeria n’est pas Kpayo », a renchéri un soudeur rencontré au quartier Gbèdégbé (13è arrondissement de Cotonou) hier. Tous ces commentaires posent en effet la question de l’opportunité de la lutte que mène le gouvernement contre l’essence Kpayo. Car, au même moment où on combat le Kpayo, on ne peut pas accepter l’énergie électrique venue du Nigeria si ce n’est pas de l’hypocrisie.
C’est bien triste !
Dans un entretien accordé à nos confrères accrédités au Palais de la Marina après une audience que le Chef de l’Etat lui a accordée, le ministre Barthélémy Kassa en charge de l’énergie a déclaré que le Bénin ne produit que 10 % de ses besoins en énergie électrique. Pour le reste (90 %), il doit tendre la main à l’extérieur, notamment au Ghana, à la Côte d’Ivoire et au Nigeria. Cela est bien triste qu’après 52 ans d’indépendance, le Bénin n’ait pas une politique énergétique soutenue. C’est en tout cas le moment de s’interroger sur les fonds qui ont été engloutis dans la construction de la centrale électrique de Maria-gléta annoncée pour fournir une puissance électrique de 80 mégawatts à partir d’une batterie de turbines à gaz.
Affissou Anonrin
