Les mouvements de grève devenus persistants au Bénin méritent une résorption rapide et de choc. Le gouvernement se dit prêt et ouvert au dialogue. Le même langage est malheureusement tenu par les syndicalistes en grève. Et le dialogue est ouvert qui connait déjà deux rounds infructueux. Pourquoi cela ? La difficulté ne résiderait-elle pas dans les choix opérés pour faire baisser la tension ?
Ce qui crispe davantage les positions et jette le désarroi dans la population est l’apparente incapacité des deux parties à faire asseoir un dialogue franc et sincère. Les actes et les propos sont divergents, au point où on se demande si réellement, la volonté de trouver une issue à la crise est affichée et effective.
Ce qui à l’analyse bloque le dialogue, c’est mieux les choix faits pour parvenir à une entente, qui ne permettent pas au processus de se poursuivre jusqu’à terme. Ces choix sont liés à la démarche parfois peu sérieuse du gouvernement qui d’un côté appelle à l’apaisement et qui, de l’autre côté, attise le feu en envoyant chaque week-end, ses chantres se déblatérer sur la personne des acteurs du monde syndical.
Premier mauvais choix
Ce qui alarme les partenaires sociaux, c’est d’abord le profil de leurs interlocuteurs qui n’inspireraient pas confiance. Les premières personnalités en point de mire sont le président du Conseil économique et social (CES), Nicolas Adagbè, le président de la haute Autorité de la gouvernance concertée, Moïse Mensah et le Médiateur de la République, celui-là même par qui le K.O. présidentiel est arrivé.
Si le premier n’a véritablement pas la pigne pour discuter avec les syndicalistes parce que taciturne, le second est quant à lui ruiné par le poids de l’âge, et donc incapable de tenir longtemps des réflexions très poussées. Les revendications exigibles et incompressibles des travailleurs en mouvement ne s’éliminent pas devant de propos de sage que pourrait incarner Moïse Mensah. Ces revendications sont à satisfaire.
Ce qu’il y a lieu à faire plutôt, c’est d’abord de commencer par éliminer les préalables qui ouvrent de vrais débats de négociations. Et c’est là que peut intervenir la présence d’un sage de la trempe du haut commissaire de la gouvernance concertée. C’est aussi là que les appels d’apaisement de Nicolas Adagbè pourraient être entendus.
Le médiateur toujours considéré comme sorti de la cuisse du Jupiter, ne paraîtrait pas crédible pour de sérieuses discussions avec le monde syndical. Il est vrai, ce sont des hommes de qualité exceptionnelle avérée mais leur intervention dans le débat à l’étape actuelle où en sont les choses est, semble-t-il, un peu précipitée. Ces des personnes de recours, de dernier ressort quand l’appareil est totalement bloqué.
Le faux semblant du gouvernement
Le gouvernement chauffe le chaud et le froid. Il joue sur deux bords. Ce qui ne l’arrange guère. Pendant qu’il appelle au dialogue pour lequel il se dit ouvert, en même temps, il sort tous les week-ends, pour tenter d’expliquer les dessous de la crise qu’il place malheureusement, sous la griffe de Patrice Talon.
Cet autre concitoyen dont la proximité est « interdite » par les autorités béninoises. Tous les week-ends en effet, les syndicalistes reçoivent la dose maximale d’injures et de considérations abjectes de la part du gouvernement. On ne peut pas vouloir s’entendre avec quelqu’un alors que déjà, on craint son rapprochement. Le débat dans ce cas ne sera pas franc.
Une autre preuve du manque de volonté politique est la recherche par le gouvernement d’un autre cadre de dialogue alors que les acteurs de la grève ne l’ont pas exigé ou n’ignorent pas l’existence de la fameuse commission qui est plus étendue et qui ne porterait pas les germes d’une solution efficace.
C’est une autre manière de vouloir noyer tout dans un flou artistique, de jouer au dilatoire et de se disculper devant la nation. Il faut déjà, à partir du moment où les interlocuteurs directs auteurs de la présente crise sont disponibles, commencer à saisir cette occurrence qui offre l’avantage d’aller à l’essentiel et avec célérité.
Hier, lorsqu’on a tenté de déplacer le cadre du dialogue, cela a achoppé et ce pendant deux heurs d’horloge, sur de l’impossibilité à engager les discussions. Ceci devait en principe constituer aussi le préalable du gouvernement mais vite levé pour permettre que les choses sérieuses démarrent. Le cadre d’hier en est l’idéal pour conduire les débats entre parties au « conflit » en toute sérénité.
Le gouvernement doit encore prouver sa bonne foi et son ouverture d’esprit à juguler la crise dont les conséquences néfastes vont s’accroissant.