Le président de l’Ong Alcrer est rentre au Bénin le 14 février de Paris après un séjour en France suite à une tentative d’assassinat dont il a fait l’objet, le 09 décembre 2013.
Votre journal publie ici la transcription de l’interview qu’il a accordée à une radio de la place.
Nous nous rappelons que le 09 décembre dernier, vous avez été victime d’une attentive d’assassinat. Est-ce que vous pouvez nous rappeler comment les choses se sont déroulées ?
Effectivement, le 09 décembre 2013, la Banque mondiale a eu à organiser un atelier sur l’évaluation de l’aide qu’elle apporte au Bénin. Et, j’ai été invité en tant que personnalité de la Société civile. Toute la journée, j’étais à cette rencontre là à l’hôtel Orisha. Quand on a fini, je suis allé chez un ami, mon premier conseiller, monsieur Nestor Loko. Vers 21 heures moins, je l’ai quitté. Je rentrais chez moi comme d’habitude sans inquiétudes. Arrivé, à cinq cent mètres de mon domicile à Ouèdo, mon chauffeur a constaté qu’il y avait deux personnes sur une moto qui étaient derrière nous.Ces deux personnes voulaient passer par la droite. Elles lui réclamaient la droite. Mais, lui n’avait pas cédé à leur réclamation. Il a serré plutôt la droite. Donc, les deux personnes étaient obligées de se retrouver derrière nous. On évoluait. Quand tout d’un coup, mon chauffeur a commencé par entendre des crépitements de balles alors qu’en ce moment j’avais le téléphone à l’oreille, ma tête en biais, je parlais avec quelqu’un que je devrais retourner dans la journée du 09 décembre-là. La personne ne m’a appelé et moi non plus. A cette heure-là précise, moi-même qui n’aime pas qu’on appelle la nuit, la chose m’a dit : appelle le monsieur. C’est ça qui a été mon salut. C’est ça qui m’a sauvé parce que j’avais la tête en biais quand je parlais avec la personne.
Autrement, quand les crépitements ont commencé, j’aurais pu avoir tous les plombs dans ma nuque, d’où mon cerveau doit être directement atteint. J’ai reçu huit impacts de balles. Mais, c’est seulement deux qui ont pu être logés dans mon corps. Il y a une balle qui a été logé dans son cou à côté des veines, une deuxième dans entre le crâne et la peau.
Donc, mon chauffeur disait : président, président, ils sont en train de nous fusiller. Pendant qu’il disait ça, je ne comprenais rien. Il paraît qu’on vous envoie des balles pour vous assassiner, si vous êtes atteint, vous n’entendez plus les crépitements de balles.
Quand il disait : président, président, ils sont en train de fusiller, instinctivement, je me suis plongé dans le véhicule. Et je me suis touché par terre. Et mes assaillants ont cru que j’étais atteint et mort. Quelques minutes après, j’ai une sueur froide.
Quelle était la sueur ?
C’était le sang qui coulait abondamment. Quelques minutes après, mon chauffeur cria : président, tu es mort ? Je ne pouvais plus parler. Après, j’ai dit : Zinsou, Zinsou, puisqu’il s’appelle Zinsou. Il me dit : est-ce que je dois t’amener à l’hôpital ? Je dis : non. Continue à la maison. Donc, comme on n’était pas loin de la maison, on y est allé. C’est comme ça que mon épouse, mon chauffeur et moi avions commencé par alerter ceux qu’on doit alerter.
Tout le village s’est réveillé. Des gens sont venus témoigner qu’ils ont
eux-mêmes entendu des crépitements de balles. Je me suis retrouvé à l’hôpital de zone d’Abomey-Calavi sur moto presque parce que ma femme a sollicité les services d’un voisin pour prendre dans sa voiture. Quand la personne ne venait pas, tel que le sang coulait, on avait peur d’une hémorragie. J’ai accepté de monter sur la moto du chef village. La population m’a escorté jusqu’à l’hôpital.
A l’hôpital de zone de Calavi, est-ce que vous avez été bien accueilli ? Est-ce que vous étiez encore conscient ?
A l’hôpital de zone de Calavi, j’ai été très bien accueilli parce que les coups de file de ma femme ont été répercutés sur d’autres personnes jusqu’aux docteurs de l’hôpital. Je dois profiter de cette occasion pour remercier tous ceux qui étaient de garde. Je dois remercier aussi le
docteur Ayémonna qui a immédiatement quitté la maison après être appelé par maître Joseph Djogbénou. Vous savez que le docteur Ayémonna est du centre Afrika Obota. On avait beaucoup travaillé ensemble. On avait ces rapports de la Société civile. Quand on lui a passé l’information, il s’est déplacé sur l’hôpital pour se mettre avec ceux qui étaient de garde qui s’occupaient de moi.
Est-ce que vous avez la sollicitude du gouvernement ?
De toutes les manières, il faut que je sois juste et clair comme d’habitude. Trente minutes après qu’on m’a fait la première radiographie, le ministre Djènontin était à mes côtés accompagné du maire de Calavi. J’étais même étonné de ce qu’il soit venu aussi promptement. Ils m’ont dit que le Chef de l’Etat voulait me parler. C’est comme ça que le ministre Djènontin a composé le numéro du Chef de l’Etat qui était en Afrique du Sud et il m’a passé le Chef
de l’Etat qui m’a présenté ses compassions. Il me disait que : rien ne
m’arrivera et ils feront tout possible pour que ces voyous-là soient retrouvés et que ce n’est pas eux qui m’ont donné la vie pour pouvoir me la ôter et qu’il souhaite rapidement que les gens voient la situation et que je sois évacué. Si possible, on peut m’envoyer un avion médicalisé. Il m’a dit que je peux choisir entre l’Afrique du Sud et la France. Il aurait souhaité que je puisse gérer la situation correctement avec lui. Il a aussi parlé et calmé mon épouse. Il lui a dit que rien ne se passera de grave. Que Dieu va veiller sur son mari que je suis. Le lendemain, le ministre Djènontin est revenu. La ministre de la Santé
était également là. Ils ont dit qu’ils doivent me transférer de l’hôpital de zone de Calavi sur le Cnhu. C’est là où on avait eu beaucoup d’hésitations.
Mais, enfin de compte, j’ai dit à mes enfants et à son épouse de ne pas avoir peur, j’irai là-bas. Nous allons faire la veille pour que tout se passe au mieux là-bas, parce que vous savez, il y a eu d’autres cas, mais pas comme le mien. Des docteurs ont témoigné que des trafiquants de stupéfiants, lorsqu’on les prend, leurs acolytes peuvent venir les achever dans les hôpitaux. Même à Paris, on m’a dit la même chose. Comme j’ai discuté avec le Chef de l’Etat, j’ai eu des assurances sur ma sécurité. C’est comme ça que j’ai été évacué sur
Paris.
Comment s’est passé le traitement à Paris ?
J’étais attendu aux pieds de l’avion avec une chaise roulante parce que j’étais véritablement fatigué. J’avais mal au cou. Mon cou me pesait.
Une dame était venue me prendre de la chaise roulante. C’est comme ça que nous sommes montés accompagnés du docteur Oloritogbé pendant que ma femme est allée chercher les bagages. Mon jeune frère était venu avec mon beau-fils pour m’accueillir à l’aéroport et nous sommes allés directement à l’hôpital. J’ai été pris en urgence. Les docteurs sont venus. On était parti d’ici avec les films de la première radiographie qu’on m’a faite à l’hôpital de zone. On avait fait le scanner à la clinique ‘’Les Grâces’’ à Cotonou. J’avais tous ces documents-là qu’on a menés à Paris.
Quand les docteurs ont regardé tous ces documents, ils m’ont pris en
observation. Je suis resté en observation toute une journée. Après, ils m’ont dit de rentrer et de revenir en me prescrivant un certain nombre de produits que je serai en train de prendre. Quand je suis revenu, ils m’ont dit : monsieur, vous êtes atteint à des endroits très sensibles. Si nous cherchons à vous opérer, vos quatre membres seront paralysés. Le corps repoussant toujours les éléments étrangers à lui, nous allons vous donner les soins qu’il faut pour que ces éléments soient rejetés d’eux-mêmes. Mais, il faudrait que vous reveniez d’ici six mois pour un nouveau contrôle.
Voilà ce qui s’est passé. Je suis allé plus de six fois à l’hôpital parce qu’ils ont profité pour me faire un bilan général. La veille de mon retour sur Cotonou, j’étais encore à l’hôpital chez l’ophtalmologue qui s’est occupé de mes yeux.
Maintenant, quand j’étais évacué, je n’ai pas eu les frais d’accompagnement. Si je n’avais pas ma fille et son mari, mon fils et sa femme, mon jeune frère avec sa femme, si ceux-là n’étaient pas à Paris, je dormirais dans la rue parce que quand on évacue quelqu’un, il faut lui donner les frais de survivance. Je ne pouvais pas passer tout le temps à l’hôpital. Ça va revenir trop cher à l’Etat. Donc, je n’ai pas reçu un franc de frais d’accompagnement.
Quand vous étiez à Paris, il n’y a eu aucun contact entre vous et l’exécutif béninois ?
L’ambassadeur du Bénin en France a tout fait pour venir me
voir. Nous nous sommes rencontrés au moins deux fois, avant que je ne revienne sur le Bénin. Et, il a dit que c’était sur instruction du Chef de l’Etat. Il est venu une fois au domicile de ma fille et de son époux, une deuxième fois je lui ai rendu visite à l’ambassade pendant que j’avais déjà choisi ma date de retour. Il faut que je vous informe que mon billet que l’Etat m’avait pris, j’étais parti le 13 décembre pour revenir le 13 janvier. Or, j’avais des rendez-vous jusqu’au 13 février. J’étais obligé de prendre de l’argent chez mes parents qui étaient là-bas pour aller changer le billet avant de pouvoir revenir.
Vous n’avez pas posé le problème d’accompagnement que l’Etat devrait vous faire avec l’ambassadeur ?
Je n’ai pas discuté de la question avec lui parce qu’il paraît que c’est le consul qui devrait régler ce problème. Monsieur Moloqué qui est un administrateur financier de l’hôpital ‘’Salles Pétrières’’ m’a remis un document. Ce document, je vais le présenter ici. Je dois vous dire qu’avant cela, des ministres du gouvernement étaient venus à mon chevet à l’hôpital. Ces ministres ont appelé mon épouse à qui ils ont remis 10 millions pour lui dire que c’est pour mes soins.
C’était au Bénin ou à Paris ?
Au Bénin. Je n’étais pas encore évacué. J’ai dit à mon épouse que ces millions, je ne vais pas y toucher, car je ne sais pas pourquoi, on me
les avait envoyés. On m’a dit que je dois être accompagné par le trésor. Mais, ça ne s’est plus passé ainsi. Donc, on n’a pas encore touché à un franc de cet argent.
Vous parliez d’un document qu’on vous a remis à Paris. De quoi parle-t-il ?
Le document a parlé des frais de mon accompagnement. Mais, je
n’ai pas eu ces frais d’accompagnement là à Paris. Les gens m’ont dit que les 10 millions sont pour mon accompagnement. Il faut que j’y vois clair d’abord, avant de pouvoir y toucher.
Vous allez retourner à Paris. Quand ?
Je dois retourner à Paris dans six mois ou au plus dans un an
pour contrôle. Je ne sais pas comment ça va se passer. Il faudrait que je commence par prendre mes précautions financièrement parce que je ne sais pas si le gouvernement va accéder à cette dépense-là. Je me prépare psychologiquement pour que cela se passe par moi-même avec le concours de mes amis et de mes parents.
Est-ce que vous avez déjà une idée des gens qui en veulent avec votre personne ?
Sincèrement, en tant que victime, mais n’ayant pas vu mes assaillants, je ne saurais dire qui a fait ça et je ne saurai dire les commanditaires. Mais, ce qui est sûr, tout le peuple béninois sait, tous les docteurs savent, que j’ai été l’objet d’une tentative d’assassinat parce que j’ai appris par la suite que le procureur a donné un point de presse pour dire qu’il a été retrouvé 32 balles dans mon véhicule. C’est pourquoi, ne pouvant indexer personne, j’ai dit à mes avocats que très bientôt, je vais porter plainte contre X parce que le dossier ne sera pas vidé de la sorte.
Il paraît que c’est suite à une affaire domaniale que vous aviez été agressé. Qu’est-ce que vous en pensez ?