Le spectre de l’année blanche perturbe les élèves et écoliers de Cotonou. C’est le moins qu’on puisse dire après la géante manifestation organisée par ces derniers ce lundi matin.
Partis du Collège d’enseignement général Akpakpa-centre, ils ont amené dans leur mouvement les élèves du Ceg Sègbèya. Cris et slogans étaient scandés en direction du gouvernement, qui selon les jeunes manifestants, ne dit rien face à la situation. Une heure et demie plus tard, le cortège s’est retrouvé devant le Ceg Suru-léré. Ici la « manif » a carrément pris une autre tournure. Les jeunes manifestants de Sègbèya et Akpakpa-centre dans leur précipitation, n’ont pas averti leurs camarades de leur venue. Face aux portails fermés, ils n’ont pas pu contenir plus longtemps leur colère. Ils auraient voulu embarquer les élèves de Suru-Léré, et continuer leur périple sur le Littoral et Dantokpa. L’objectif étant d’attirer l’attention de tout le monde sur une situation qui se dégrade petit à petit. « Le gouvernement doit arrêter la grève. Nous voulons reprendre les cours », déclare l’un des jeunes manifestants. Entre-temps, les autorités de Suru-Léré n’ont pu rien faire face à la marée de jeunes qui les ont envahies. « Ce n’est pas gai ce qui se passe. Cela ternit l’image de notre pays à l’extérieur », confie un professeur certifié d’anglais. Dans ce vacarme qui a supplanté la voie pavée de Suru-Léré, la circulation s’est arrêtée. Motocyclistes et conducteurs de véhicules sont devenus spectateurs de ce qui aurait pu se transformer en affrontement avec les forces de l’ordre. Visiblement paniqués, sans méthode et sans expérience, les policiers détachés sur les lieux, ont longtemps hésité. Certes, ils ne savaient par quel bout prendre. Ils ont été obligés d’utiliser des gourdins, contre les adolescents de 15 à 18ans. Trente minutes après, la foule s’est agrandie, et les parents d’élèves, surtout les mères ont commencé par se lamenter. Le groupuscule de flics a été obligé de convaincre les leaders du mouvement, pour qu’ils persuadent leurs camarades de faire demi-tour. Mais, beaucoup de temps a été déjà perdu. On a aussi visiblement évité le pire.
Pour le Directeur du Collège d’enseignement général de Suru léré Maxime Awouèkoun, la horde d’élèves en mouvement a déferlé des collèges environnants pour envahir son établissement. Ayant très tôt eu l’information, il a demandé à ce qu’on boque le portail. « C’est ce qui m’a sauvé », a-t-il confié. La horde s’est vue heurtée à la fermeture de l’entrée principale du collège et a réagi vigoureusement. « Des slogans hostiles, des jets de pierres dans le collège, l’ambiance était surexcitée. A l’aide de pierres, ils frappaient le portail et demandaient à ce qu’on l’ouvre », a-t-il déclaré. Le bruit était assourdissant. Le Directeur selon ses explications, a été obligé de faire appel à la Police pour les dissuader.
Des élèves en boule, nécessité d’une solution urgente
Ce n’est plus un cas isolé. La série de manifestations des élèves oblige désormais qu’on s’y attarde. Après l’Ouémé et le Mono, les mouvements de mécontentement des jeunes apprenants des collèges du Bénin essaiment à Cotonou. Loin de simples actes de jeunes vandales en perte d’inspiration, c’est carrément des mouvements d’ensemble qu’on constate. Le niveau de mobilisation de cette jeunesse fait réfléchir. Si rien n’est fait, la suite peut être difficile à gérer. Dans la plupart des cas, les directeurs de collèges arrivent comme ils peuvent à maîtriser la situation en faisant intervenir les forces de l’ordre. Mais hier, ceux de Sègbèya et d’Akpakpa-Centre ont été bien pris au dépourvu par les élèves. Donc au fonds, il ne s’agit plus de simples mouvements qu’on peut maîtriser. Et, le pire peut arriver. Une fois encore, la responsabilité des gouvernants est en cause. Il ne suffit pas juste de lancer un communiqué pour dire aux élèves d’aller à l’école. Il faut résoudre la crise et ils iront à l’école. Toutefois, les élèves aussi ne sont pas à dédouaner. C’est un exercice dangereux de bomber le torse devant les forces de l’ordre. Pour rien au monde, ils ne peuvent se livrer au vandalisme. En ces temps de crise, il ne faudra surtout pas en rajouter aux peines des parents. Le retour à la paix demeure désormais un impératif non négociable.