Courant la semaine dernière, le Parti du Renouveau Démocratique par le biais de son groupe parlementaire, a déposé deux propositions de loi.
Celle relative à la fin du mandat des élus locaux et communaux et à une solution alternative à la Lépi, a été le plus mis en exergue. Mais l’autre proposition de loi moins médiatisée, porte sur les textes actuels régissant la justice au Bénin. Au regard des détentions arbitraires dont font l’objet certaines personnes, Me Adrien Houngbédji au cours du meeting que son parti politique a organisé ce samedi 22 février 2014 à Ifangni dans le département du Plateau, a expliqué tout le bien fondé de cette 2ème proposition de loi.
C’est par des exemples tirés de l’histoire politique du Bénin qu’il a fait appel à Boni Yayi et sa famille politique pour la modification du Code de procédures pénales actuellement en vigueur. Lire ci-dessous sa déclaration et le texte de la proposition de loi.
Francis Z. OKOYA www.visages-du-benin.com Toute l’actualité du Bénin et d’ailleurs ! Restez connecté avec nous, restez informé!
« …Nous avons déposé une proposition de loi qui fait moins de bruit que les autres mais qui est aussi importante parce que dans l’état actuel de nos textes, si le président Boni Yayi décide aujourd’hui que quelqu’un va passer 10 ans en prison ; qu’il soit innocent ou qu’il soit coupable, cette personne passera 10 ans en prison. Il suffit qu’il arrête la personne, qu’il le défère devant le Procureur de la République et qu’il dise au Procureur : »Gardez-le ».
Le Procureur de la République l’envoie devant le Juge d’instruction et le Juge d’instruction dit : »Non, il est innocent ! Libérez-le ! ». Yayi Boni dit au Procureur général de faire appel. Il est obligé de faire appel. Il fait appel et on va devant la Chambre d’accusation ; c’est-à-dire la Cour d’appel des Juges d’instruction et la Cour d’appel des Juges d’instruction dit »Celui là n’a rien fait. Libérez-le ! ».
Yayi Boni dit : »Non ! Procureur Général, chercher pourvoir en cassation. ». Et c’est fini. On peu pourvoir en cassation et la personne peut rester là cinq. La personne peut rester là 10 ans. Nous n’avons pas fait la Conférence nationale pour ça. Je voudrais rappeler ici au plus jeune d’entre nous ce qui se passait avant la Conférence nationale. Le président Hubert Maga a fait de bonnes choses hein ! Mais il n’a pas fait que de bonnes choses.
En février 1961, le président Hubert Maga a pris un décret et avec cette loi, quand on dit que quelqu’un a pris quelque chose, on le prend, on le met en résidence surveillée et il ne sort plus. Quand Hubert Maga est tombé en 1963, c’est avec la même loi qu’on l’a mis en résidence surveillée. Ceux qui l’ont renversé sont arrivés et au lieu de supprimer la loi, ils l’ont gardé jusqu’à ce que le président Emile Derlin Zinsou arrive. Il a vu la loi et a dit :
»Voilà une bonne loi ». Au contraire, il l’a encore corsée. Le jour où on a renversé le président Emile Derlin Zinsou, c’est avec la même loi qu’on l’a mis en résidence surveillée plusieurs mois au Nord du pays. Cette même loi est restée en place jusqu’à ce que le président Mathieu Kérékou arrive. Mathieu Kérékou a dit : »Mais voilà une bonne loi ! ».
Il prend Hubert Maga ; il prend Sourou Migan Apithy ; il prend Justin Ahomadégbé avec la la même loi et il les garde pendant 10 ans. Et s’il y avait pas eu la Conférence nationale, on lui aurait appliqué la même loi et il aurait été en résidence surveillée.
Au Prd, nous disons que nous ne voulons pas ça. Nous voulons qu’on respecte la justice. Nous voulons que quand quelqu’un est innocent, qu’on le libère. C’est le Juge qui si quelqu’un est innocent ou qu’il ne l’est pas. Si nous ne faisons pas ça, je peux vous garantir aux Fcbe et à Yayi Boni que c’est la loi actuellement en vigueur leur sera appliquée avec la même rigueur par leurs ennemis d’aujourd’hui.
C’est donc un appel que je fais en réalité. Je fais appel à toutes les forces politiques de ce pays y compris les Fcbe et Yayi Boni lui-même pour dire : »Pendant que vous êtes là, ce qui ne va pas, enlevons-là ».
Nous avons déposé une proposition de loi au Parlement pour qu’on puisse revoir le Code de procédure pénale sur le plan pour que lorsque la Cour d’appel, la Chambre d’accusation dit qu’il y a non lieu, qu’on libère les gens.
Nous ne sommes pas nombreux comme députés Prd à l’Assemblée nationale. Notre nombre ne permet pas à nous seuls de faire passer cette proposition de loi. Mais j’espère que notre classe politique, toutes les forces politiques épris de démocratie et de liberté le feront et nous aurons un Code de procédure pénale qui respecte la liberté individuelle dans le pays…. »
LIRE LA PROPOSITION DE LOI PORTANT MODIFICATION DE L’ARTICLE 581 DU CODE DE PROCEDURE PENALE
PROPOSITION DE LOI PORTANT MODIFICATION
DE L’ARTICLE 581 DU CODE DE PROCEDURE PENALE
EXPOSE DES MOTIFS
En vue de renforcer l’Etat de droit au Bénin, et de rendre les dispositions internes applicables aux libertés, conformes aux instruments internationaux relatifs aux droits de la personne humaine, le législateur béninois a, courant 2011, adopté un projet de code de procédure pénale qui, a été consacré à travers la loi n°2012-15 du 18 mars 2013 portant code de procédure pénale.
Dès sa publication au journal officiel du 29 mai 2013, le code de procédure pénale est entré immédiatement en vigueur conformément à son article 896. Ce code renforçait la protection des libertés individuelles, et celles de l’innocent en particulier.
Mais à la pratique, il est apparu très vite que les dispositions de l’article 581 pouvaient constituer une brèche importante à ce souci de protection de l’innocent, en raison de l’interprétation qui en est faite, interprétation objet de controverse puisqu’elle n’est pas partagée par tous.
Pour être plus précis, il est à craindre que l’article 581 ne devienne la caution législative des décisions politiques de détentions abusives : il est donc urgent que les dispositions de cet article soient précisées et reformulées dans un sens qui protège les citoyens innocents contre l’arbitraire.
En effet, tel qu’il est interprété aujourd’hui, au prétexte qu’un pourvoi en cassation a été formé contre un arrêt de non-lieu de la chambre d’accusation qui est tout de même une juridiction d’appel et une juridiction collégiale, l’innocent peut être gardé indéfiniment en prison. Et ce pendant des années, en raison de la durée de l’examen du pourvoi par la Cour Suprême.
Dans notre nouveau code de Procédure Pénale, le prévenu relaxé ou absous, ou condamné à l’emprisonnement avec sursis, ou à la peine d’amende, est mis en liberté nonobstant pourvoi. A fortiori, pour raison d’équité dans la procédure pénale, l’individu à l’égard duquel la Chambre d’accusation a déclaré n’y avoir lieu à poursuite, doit être mis en liberté.
Par ailleurs, la Cour Suprême (chambre judiciaire) n’est pas juge des faits ; elle est seulement chargée de vérifier l’application de la loi ; elle ne peut donc pas se prononcer sur les mesures de privation de liberté, lesquelles sont strictement limitées aux nécessités de la procédure.
Enfin, la lecture croisée des dispositions des articles 226 alinéa dernier, 231, 581 et 895 du même code, suggère que l’inculpé bénéficiant d’un arrêt de non lieu rendu par la chambre d’accusation de la cour d’appel, ne peut être maintenu en détention.
Ces considérations, ainsi que le principe du caractère exceptionnel de la détention prévu à l’article 146 du code de procédure pénale, conduisent à formuler une proposition de loi modificative de l’article 581 du code de procédure pénale.
Article 581 ancien
Pendant les délais du recours en cassation et s’il y a eu recours, jusqu’au prononcé de l’arrêt de la cour suprême, il est sursis à l’exécution de l’arrêt, sauf en ce qui concerne les condamnations civiles.
Toutefois, n’est pas suspensif, le pourvoi formé par l’accusé après l’expiration du délai de pourvoi contre l’arrêt de la chambre d’accusation qui le renvoie devant la cour d’assises. En ce cas, la demande en nullité et les moyens sur lesquels elle est fondée ne sont soumis à la cour suprême qu’après l’arrêt définitif de la cour d’assises.
Est, nonobstant pourvoi, mis en liberté, immédiatement après l’arrêt, le prévenu détenu qui a été relaxé ou absous, ou condamné soit à l’emprisonnement assorti de sursis, soit à l’amende.
Il en est de même du prévenu détenu condamné à une peine d’emprisonnement, aussitôt que la durée de la détention atteint celle de la peine prononcée.
REPUBLIQUE DU BENIN
FRATERNITE – JUSTICE – TRAVAIL
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ASSEMBLEE NATIONALE
Loi n° …………………………………. portant modification de l’article 581 du code de procédure pénale
L’Assemblée Nationale a délibéré et adopté en sa séance du …………… la loi dont la teneur suit :
Article 1er : Est modifié comme suit, l’article 581de la loi n°2012-15 du 18 mars 2013 portant code de procédure pénale :
Article 581 nouveau
Pendant les délais du recours en cassation et s’il y a eu recours, jusqu’au prononcé de l’arrêt de la cour suprême, il est sursis à l’exécution de l’arrêt, sauf en ce qui concerne les condamnations civiles.
Toutefois, n’est pas suspensif, le pourvoi formé par l’accusé après l’expiration du délai de pourvoi contre l’arrêt de la chambre d’accusation qui le renvoie devant la cour d’assises. En ce cas, la demande en nullité et les moyens sur lesquels elle est fondée ne sont soumis à la Cour Suprême qu’après l’arrêt définitif de la cour d’assises.
Nonobstant pourvoi, est immédiatement mis en liberté après le prononcé de l’arrêt, l’inculpé ou le prévenu détenu qui a été relaxé ou absous, ou qui a bénéficié d’un arrêt de non-lieu de la chambre d’accusation, ou encore qui a été condamné soit à l’emprisonnement assorti du sursis, soit à l’amende.
Il en est de même du prévenu détenu condamné à une peine d’emprisonnement, aussitôt que la durée de la détention atteint celle de la peine prononcée.
Article 2 : La présente loi entrera en vigueur dès sa promulgation, sera applicable aux procédures en cours, et sera exécutée comme loi de l’Etat.