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Fraternité N° 3553 du 28/2/2014

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Déclaration de Boni Yayi sur la situation la crise sociale
Publié le lundi 3 mars 2014   |  Fraternité


Conseil
© Autre presse par Presidence
Conseil de l`entente: réunion des chefs d`Etat et de gouvernement à Niamey.
Mardi 17 Décembre 2013, à Niamey (Niger). Tenue de la 2 ème session ordinaire de Conférence au sommet des Chefs d`Etat et de Gouvernement du Conseil de l`Entente. Photo : Le president Boni Yayi.


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Béninoises, Béninois,
Mes chers Compatriotes,
En ce jour, 28 février 2014, date anniversaire de la clôture solennelle de l’historique Conférence Nationale des Forces Vives de 1990, événement fondateur de notre démocratie, j’ai décidé de m’adresser à vous et vous prendre à témoin face à la fronde sociale menée par certaines organisations syndicales de notre chère commune patrie, le Bénin.

Comme vous le savez, mes chers compatriotes, depuis quelques semaines, notre chère Patrie, le Bénin, traverse une crise sociale due à l’arrêt de travail décidé par certaines centrales et confédérations syndicales suite à des manifestations publiques non autorisées par l’Autorité départementale au regard des dispositions légales.

Sous le prétexte que les libertés publiques sont ainsi menacées, certains responsables syndicaux ont suscité des mouvements de débrayage visant en vain la paralysie de l’administration publique. Cependant, face à leur détermination des perturbations ont été observées par endroit.

Malgré les concertations sectorielles entre ministres concernés et syndicats ainsi que les négociations entre Gouvernement, centrales et confédérations syndicales, en présence des facilitateurs, en vue de trouver une issue favorable à la grève, les discussions entamées depuis le 05 février 2014 n’ont pas abouti en raison des exigences maintenues par les centrales syndicales et relatives entre autres, à la restitution intégrale des défalcations opérées sur les salaires des mois de janvier et de février 2014 au titre des jours de grève de janvier.

Mes Chers Compatriotes,
Par respect pour le peuple béninois, nos institutions et notre démocratie ainsi que pour chacune et chacun de vous, j’ai toujours pris le parti de vous tenir un langage de vérité et de cœur face aux enjeux engageant l’avenir de notre Nation. C’est dans ce même état d’esprit que je veux encore m’adresser à vous aujourd’hui.

Le droit de grève est un acquis de notre démocratie et mon gouvernement entend respecter ce droit des travailleurs pour autant qu’il s’exerce dans les conditions définies par la loi.
La question qui se pose alors est de savoir si les mouvements de grève en cours s’exercent dans les conditions de légalité. A notre entendement la réponse est négative.

En effet, le déclenchement de ces grèves s’est fait en violation des articles 3, 4, 6 et 7 de la loi portant exercice du droit de grève en République du Bénin et qui définissent la procédure à suivre en la matière.

Face à ma responsabilité constitutionnelle de garant du respect et de la mise en œuvre des lois de la République et conformément aux dispositions de l’article 59 de notre Constitution, j’ai, avec mon gouvernement, opté en un premier temps de procéder à la retenue sur salaire dans l’application stricte des lois de la République d’une part et pour éviter dans un esprit de justice de pénaliser la majorité des travailleurs qui ont continué de vaquer à leurs obligations républicaines d’autre part.

Dans le même temps, mon gouvernement est interpelé dans sa mission de préserver la paix sociale, la stabilité, conditions indispensables à la prospérité partagée, à la création d’emplois des jeunes et des femmes en vue de l’élimination de la pauvreté dans notre pays.

Mes chers Compatriotes,
C’est le lieu de vous rappeler les efforts consentis par mon gouvernement depuis 2006 pour améliorer les conditions de vie et de travail des agents de l’Etat. Ainsi, de 2006 à 2013, la masse salariale a presque triplé passant de 135 milliards en 2006 à 300 milliards en 2013 alors que sept ans auparavant, cette même masse salariale n’a augmenté que de 11% c’est-à-dire de 1998 à 2005.

Au même moment, la part de la masse salariale allouée aux enseignants dépasse 55% en 2013 contre 44% en 2006. Cet effort n’intègre pas la construction en moyenne de 1000 salles de classe par an.
Quant aux revendications d’ordre salarial, elles ne résistent pas à l’épreuve d’une analyse objective fondée sur des faits montrant les efforts de mon gouvernement depuis 2006 pour améliorer les conditions de service de travailleurs.

Au surplus, je dois rappeler que les initiateurs de cette grève sont ceux-là mêmes qui, en 2011 ont conclu un accord avec le gouvernement au terme duquel ils ont pris l’engagement de surseoir aux revendications salariales jusqu’à la fin de l’année 2014 contre l’acceptation par le gouvernement du paiement échelonné des 25 % de revalorisation du point indiciaire.

Mes chers compatriotes,
Où se trouve alors le bien fondé des revendications actuelles de certaines centrales et confédérations syndicales ?
A défaut, ne doit-on pas chercher les vrais mobiles ailleurs ? Je laisse le soin aux organisations syndicales elles-mêmes de répondre à ces questions.

Le Peuple béninois, pour sa part, n’est pas dupe. Il est persuadé que ces mouvements de grève participent d’un vaste plan de ternissement de l’image du Bénin, de ses institutions et de sa démocratie avec comme conséquence, la déstabilisation de notre système démocratique et la remise en cause de la cohésion nationale.

Mes très chers compatriotes,
Comme vous pouvez le constater, ces mouvements de grèves constituent une préoccupation majeure parce qu’ils touchent au cœur de notre système éducatif, fondement de l’avenir de notre nation.

Bien que ces mouvements n’aient pas atteint l’ampleur attendue par leurs organisateurs, tout enfant béninois, où qu’il se trouve, a droit à l’éducation, à la protection et à la défense de ses droits qui relèvent des prérogatives du gouvernement.

En définitive, les victimes réelles de ces débrayages, loin d’être leurs initiateurs, sont plutôt nos malades, nos justiciables, nos usagers de l’administration, nos femmes, nos jeunes et surtout nos enfants.
Avons-nous le droit de compromettre l’avenir de ces enfants, relève de demain, en les laissant livrés à eux-mêmes et à la rue ?

Mes chers Compatriotes,
En ce jour anniversaire de la fin de l’historique Conférence Nationale de février 1990, symbole de l’esprit de consensus de réconciliation et de pardon et répondant au cri de cœur et à l’appel des confessions religieuses, des sages, des têtes couronnées de notre pays, des parents d’élèves et des nombreux citoyens anonymes, j’ai décidé en ma qualité de Président de la République en toute responsabilité et dans un souci d’apaisement de faire procéder à la restitution des défalcations opérées en 2014 et ce, nonobstant tous les vices de procédures qui ont entaché le déclenchement de ces grèves ainsi que les enjeux, de toute évidence étrangers aux intérêts corporatistes des travailleurs.

Cette décision est l’expression de la volonté de mon gouvernement de maintenir le dialogue avec toutes les composantes de notre société pour la sauvegarde de la paix et de la cohésion sociale, obligation constitutionnelle dévolue au Président de la République et condition incontournable pour le développement durable de notre pays.

Une telle décision ne saurait être interprétée comme un recul, encore moins une capitulation. Elle est plutôt l’affirmation du sens élevé de responsabilité qui doit prévaloir dans la gestion des affaires de notre Cité commune.

En définitive, c’est notre peuple connu pour son sens légendaire de responsabilité et de recherche permanente de la paix qui a gagné. C’est même la victoire de ceux qui ont accepté de continuer de travailler et de tous les travailleurs ainsi que les responsables des centrales syndicales qui ont lancé un appel au travail pour assurer la sécurité humaine dans notre pays.

C’est pourquoi, je leur exprime au nom de la Nation mes remerciements pour ce comportement patriotique et citoyen. J’adresse aussi mes remerciements aux facilitateurs qui ont toujours été à nos côtés durant ces moments difficiles et leur renouvelle la reconnaissance de la Nation.

Mes chers compatriotes,
Compte tenu de ce qui précède, j’invite tous les agents grévistes à reprendre sans délai le travail. En tout état de cause, les dispositions de la loi seront appliquées jusqu’à nouvel ordre car force doit rester à la loi et les dispositions seront prises à cet effet.

Mes chers compatriotes,
Une Nation qui ne parle pas avec elle-même court à sa ruine. Nous devons donc collectivement réaffirmer notre attachement à notre patrie commune, le Bénin et notre volonté inébranlable de la construire dans la paix, dans l’amour et la sécurité. Le Bénin ne peut être construit que par ses filles et ses fils, l’extérieur ne peut apporter qu’un appoint.

A nous de nous convaincre du Bénin que nous voulons construire. Je continue de vous proposer qu’on construise ensemble un Bénin paisible, prospère où sera assurée la sécurité humaine.
J’en appelle donc au dialogue politique qui, à mon avis, doit être au cœur d’un ensemble de pactes stratégiques faits de partenariats noués dans un esprit patriotique et de responsabilité.

Nous devons nous imposer de dépassionner et de dépersonnaliser les débats sur les problèmes de la Nation, en discuter sans préjugés ni arrière-pensée. Ainsi, le dialogue politique tant souhaité doit absolument se nouer au sein de la classe politique en se démarquant des calculs d’intérêts personnels et surtout du refus de l’acceptation de l’autre, dénoncé depuis des siècles mais qui, malheureusement, se perpétue dans nos comportements, nous empêchant collectivement d’aller de l’avant pour le bien-être de notre Chère Nation.

Je veux aussi réaffirmer ma détermination à continuer d’œuvrer pour la promotion d’un dialogue stratégique entre mon gouvernement, la société civile et le secteur privé fondé sur un pacte de citoyenneté et de responsabilité en vue de préserver les intérêts réciproques avec pour point de mire la promotion de l’emploi des jeunes et des femmes et la création de richesses.

Mes Chers Compatriotes,
J’exhorte également le secteur privé et les syndicats à un dialogue fécond visant à établir un équilibre des intérêts de tous en vue de sauvegarder, d’une part, la compétitivité des entreprises sans perdre de vue la nécessité d’une juste rétribution du travail réellement accompli, d’autre part.

La prise en compte des intérêts des travailleurs dans ce dialogue constructif doit s’accompagner d’une gouvernance syndicale responsable débarrassée de tout opportunisme.

Cette nouvelle gouvernance devra concourir à promouvoir le développement de notre pays et son image en toute circonstance et en tout lieu. Du reste, l’image du Bénin doit être une préoccupation de chacune, de chacun et de tous.

Enfin, le dernier dialogue et pas le moindre, c’est le dialogue interreligieux. Celui-ci est indispensable pour renforcer la laïcité de notre Etat et préserver la liberté de conscience, de culte et de croyance.

Les confessions religieuses doivent contribuer à la refonte de notre culture et de nos mentalités pour promouvoir davantage dans notre société les valeurs éthiques, morales et spirituelles sans lesquelles notre rêve commun d’émergence de notre pays serait vain.

Mes Chers compatriotes,
Comme vous en conviendrez, ces différents pactes stratégiques, ces chantiers que j’invite à ouvrir en toute confiance, ont en définitive pour finalité de développer une vraie démocratie avec des institutions fortes et crédibles dans la perspective d’intensifier les grands travaux générateurs d’emplois et de richesse pour les prochaines années, 2014 et suivantes.

Je m’en voudrais de ne pas remercier du fond du cœur toutes les confessions religieuses, les parents d’élève, les sages et les têtes couronnées, les facilitateurs ainsi que nos compatriotes qui ont continué de servir la nation prouvant ainsi leur sens de responsabilité et d’amour de la patrie.

Mes chers compatriotes,
Je ne terminerai pas sans cet appel que je lance à tous pour préserver les droits et les devoirs de la personne humaine conformément à l’article 15 de notre Constitution. Chacun de nous a une part de responsabilité pour y parvenir et je vous fais confiance, car il s’agit d’une question fondamentale au cœur de notre démocratie.

Faut-il vraiment que j’en parle alors qu’au quotidien, le Bénin est aujourd’hui reconnu comme un pays de liberté, un Etat de droit, où on ne compte ni prisonnier politique, ni prisonnier d’opinion et que sais-je encore ? Notre pays est considéré par la communauté internationale comme l’un des plus sûrs au monde. Je n’en veux pour preuve que les rapports périodiquement publiés par les puissances occidentales avec lesquelles nous partageons les valeurs du monde libre et par les instances les plus crédibles.

Je vous renvoie aux publications de 2013 de l’Office Français pour la Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) dans lequel le Bénin apparaît parmi les 18 Etats les plus sûrs du monde. Il en est de même des dernières publications du Département d’Etat Américain (Freedom House Report), sur Les Libertés dans le Monde. Notre pays y est cité dans le pré-carré des pays reconnus pour leur liberté.

Mes chers compatriotes,
Ensemble nous sommes plus forts et l’avenir plus radieux, l’espérance et l’espoir sont permis à condition que nous renforcions nos valeurs éthiques, morales et spirituelles et notre volonté de nous aimer, de travailler et de construire ensemble notre pays, le Bénin.

Que Dieu bénisse notre chère patrie !
Que Dieu bénisse la République !
Que Dieu bénisse le Bénin !
Cotonou le 28 février 2014

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