Salles de classe désertes, écoliers et élèves abandonnés à eux-mêmes et errant dans les cours. C’est la situation qui a prévalu hier mardi 4 mars dans certains établissements primaires et secondaires publics à Parakou, en dépit de l’annulation des défalcations sur salaires annoncée par le gouvernement.
Par Claude Urbain PLAGBETO A/R Borgou-Alibori
Malgré l’annonce faite par le chef de l’Etat vendredi dernier de restituer les retenues sur salaire opérées pour faits de grève au titre des mois de janvier et février derniers, les enseignants grévistes de Parakou ne démordent pas. A l’opposé des praticiens hospitaliers qui ont suspendu leur mouvement et ont donné un moratoire au gouvernement, ils estiment que le gouvernement n’a pas fait un pas considérable par rapport à la satisfaction des points contenus dans leur plate-forme revendicative et ne sont pas ainsi prêts à reprendre le chemin des classes. Loin du dégel de la situation qui perdure depuis début janvier 2014, ils ont déserté hier mardi les salles de classe pour se retrouver en assemblée générale à l’école primaire publique OCBN.
Les militants du Front d’action des syndicats des trois ordres de l’enseignement des départements du Borgou-Alibori visiblement déterminés, sont venus nombreux à la rencontre. Le ton est resté grave. «Les travailleurs sont toujours fâchés. Est-ce à cause des défalcations que nous nous sommes mis en mouvement?
Nous ne sommes pas contents et nous ne sommes même pas prêts pour reprendre», a laissé entendre Cyriaque Bocovo, responsable de la coordination départementale des syndicats des enseignements maternel et primaire du Borgou-Alibori.
Et au porte-parole du Front d’action des syndicats des trois ordres de l’enseignement des départements du Borgou-Alibori, Maurice Fadégnon, d’enfoncer le clou : «Il faut s’attendre à un mouvement corsé parce que la décision du chef de l’Etat ne prend pas en compte les sept points de revendications que nous avons soumis». «Des avis que nous avons eu jusque-là, c’est la poursuite des mouvements jusqu’à satisfaction de nos légitimes revendications», a renchéri Maurice Fadégnon.
Rappelons que la grève déclenchée par les Centrales et Confédérations syndicales fait suite à la bavure policière de la Bourse du travail le 27 décembre dernier. Les syndicalistes posent entre autres conditions de dégel de la situation de crise, le limogeage du préfet de l’Atlantique-Littoral, Placide Azandé et du commissaire central de Cotonou, Pierre Coovi Agossadou, le remboursement des défalcations sur salaires pour les grèves de 2012.
A Cotonou, les enseignants poursuivent le mouvement
Malgré la décision du gouvernement de restituer les défalcations de 2014 et l’appel à la reprise sans délai du service, la grève lancée par les Centrales et Confédérations syndicales depuis quelques mois dans le secteur de l’éducation, se poursuit toujours. C’est du moins le constat fait hier mardi 4 mars, dans certains établissements parcourus dans les 11ème et 12ème arrondissements de Cotonou.
Par Christel S. JIHOUAN (Stag)
Portails grandement ouverts, salles de classes entièrement fermées, sinon ouvertes par endroits. Dans la cour, des apprenants se livrent à des jeux divers. C’est le moins qu’on puisse dire de la scène qu’offrait la cour de l’Ecole primaire publique de Cadjèhoun.
Malgré la décision du chef de l’Etat, vendredi 28 février dernier, de restituer les défalcations opérées sur les salaires des mois de janvier et février 2014 et son exhortation à l’endroit des travailleurs afin qu’ils reprennent le service sans délai, les enseignants ne démordent pas.
Le mouvement de grève est poursuivi.
Cependant, dans quelques rares salles de classe, des écoliers suivaient normalement les cours. Ces enfants n’étaient pas encadrés par leurs enseignants, mais par des normaliens préparant leurs examens de fin de formation devant déboucher à l’obtention du Certificat d’aptitude professionnel.
Ce que soutient le directeur du groupe A de l’Ecole primaire publique de Gbégamey, Léopold Anani. «Les enseignants surpris dans les salles de classe donnant des cours aux enfants sont les normaliens et les stagiaires assujettis à l’examen du CAP» Hormis cette catégorie d’acteurs, il y avait aussi des répétiteurs recrutés par les directions d’écoles en collaboration avec les Associations des parents d’élèves (APE), venus renforcer l’effectif insuffisant des enseignants.
Elise Megnigbêto, directrice du groupe A de l’Ecole primaire publique de Cadjehoun a, pour sa part, rappelé que les mouvements de grève se poursuivent à raison de 72 heures par semaine.
«Quand deux éléphants se battent, seules les herbes en souffrent», dit-on. Vivement que ce bras de fer entre le gouvernement et les syndicats ne conduise pas à une année blanche dont les apprenants paieront le prix !
Les responsables en charge de l'enseignement secondaire implorent l’indulgence des syndicalistes
Le sort de l’année scolaire en cours est désormais entre les mains des responsables confédéraux syndicaux, notamment ceux dont les organisations sont signataires des motions de la grève qui paralyse actuellement le système éducatif. C’est d’ailleurs à eux que les directeurs techniques et centraux du ministère en charge de l’Enseignement secondaire se sont adressés, hier mardi 4 mars, à l’occasion d’un point de presse, les suppliant de mettre la balle à terre pour sauver l’école béninoise.
Par Josué F. MEHOUENOU
Les 28 semaines, soit 14 par semestre, exigées au minimum sur les 36 pour la validation d’une année scolaire, peuvent être encore obtenues à condition que les secrétaires généraux confédéraux à l’origine de la présente grève dans le secteur de l’éducation au Bénin, reviennent assez tôt sur leur décision et ordonnent la reprise des cours dans les écoles, lycées et collèges. Face à la presse hier, les directeurs techniques et centraux du ministère de l’Enseignement secondaire, de la Formation technique et professionnelle, de la Reconvention et de l’Insertion des Jeunes (MESFTPRIJ) ont imploré leur clémence et solliciter leur sens d’écoute, ainsi que leur patriotisme pour que l’année scolaire soit validée. Par la voix du directeur de cabinet dudit ministère, Mohamed Gibigayé, ces cadres investis de la mission de veiller au bon fonctionnement de l’école béninoise, ont exprimé leur inquiétude face à la persistance de la tension, malgré les dernières mesures prises par le chef de l’Etat, visant la restitution des défalcations opérées sur les salaires des travailleurs grévistes.
Selon Mohamed Gibigayé, le Bénin jouerait même sa crédibilité au plan sous-régional, puisque les dates de déroulement de certains examens ne sont plus de son seul ressort.
C’est le cas par exemple du Baccalauréat dont la date est fixée de commun accord par plusieurs pays de la sous-région, notamment ceux membres de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA). Dans ces conditions, a-t-il expliqué, il est important que les élèves béninois se mettent au pas, d’abord en ce qui concerne les cours et ensuite pour être en harmonie avec les exigences communautaires.
S’agissant du Certificat d’études primaires (CEP) et du Brevet d’études du premier cycle (BEPC) dont les dates relèvent de la souveraineté nationale, le porte-voix des directeurs sous tutelle du ministère en charge de l’Enseignement secondaire a indiqué que leur organisation est aussi menacée, du fait de ce mouvement de grève dont les initiateurs ne démordent pas, malgré les multiples efforts consentis par le gouvernement et les concertations qui se multiplient.
Pour ces directeurs, leur plaidoyer à l’endroit des responsables syndicaux ne vise pas une remise en cause des droits qui leur sont reconnus par les textes en vigueur.
Il a plutôt pour objectif d’éviter aux écoliers et élèves, une année blanche. Ceci, parce que sur l’ensemble du territoire national, les écoles privées dont le nombre est nettement supérieur, n’ont connu aucune perturbation et ont donc besoin aussi de jouir des efforts et investissements qu’elles ont consentis, ce qui passe avant tout par la validation de l’année scolaire.
L’espoir est encore permis
Face à la situation actuelle, l’école béninoise est déjà dans une zone de turbulence. Seul, un sauvetage express lui éviterait de franchir la ligne rouge, celle de l’année blanche.
En effet, selon les explications fournies hier par Mohamed Gibigayé, il faut tout au moins 2/3 des 36 semaines indiquées pour valider une année scolaire normale.
Ainsi, a-t-il indiqué, une moyenne de quatorze semaines par semestre, soit au total 28 semaines tout au moins, est exigée pour obtenir la validation de l’année. Pour l’heure, «nous sommes encore dans le délai», rassure-t-il, non sans attirer l’attention sur le fait que la poursuite de la grève n’est pas de nature à arranger les choses.
Pour ce qui est du mouvement de grève en question, les chiffres illustrent clairement qu’il s’agit d’un mouvement parcellaire, puisque seulement 2000 enseignants le suivraient, sur un effectif de 11.000. Cette même grève ne serait « profonde » que dans des villes comme Cotonou, Porto-Novo, Abomey et Parakou.