Les activités académiques à l’Université d’Abomey-Calavi prévues pour prendre fin en juillet prochain ne le seront plus. Les mouvements de débrayage déclenchés qui perdurent ont eu un impact sur le calendrier académique. De concert avec les chefs d’établissements, l’équipe rectorale a procédé au réaménagement de l’ancien calendrier, espérant que les grèves prendront fin très bientôt.
Ainsi, l’année universitaire prolongée de trois mois, connaîtra son épilogue en octobre. Lire l’interview du 1er Vice-recteur chargé des affaires académiques, Maxime da Cruz accordée à cet effet.
Le Matinal : M. le Vice-recteur, cela fait plusieurs mois que les activités académiques sont paralysées au campus d’Abomey-Calavi. Etes-vous sûr qu’avec les grèves, le calendrier universitaire sera respecté ?
Vr Maxime da Cruz : Un mouvement de grève de cette ampleur qui dure depuis des semaines aura forcément d’impact sur le calendrier universitaire. Il faut rappeler qu’au début de la grève, nous étions en fin du 1er semestre dans la plupart des établissements ; donc en période d’évaluation. Le déclenchement du mouvement de débrayage a interrompu malheureusement lesdites évaluations. Avec l’espoir ces derniers temps que les choses reviendraient à la normale, nous avons remis en chantier un nouveau calendrier. D’ailleurs en fin de semaine dernière, il y a eu quelques évaluations qui ont pu se faire la semaine dernière. Nous comptons continuer dans ce sens les jours à venir.
Peut-on avoir une idée du calendrier réaménagé ?
Nous avons tenu une rencontre avec les Chefs d’établissements vendredi dernier. Au cours de cette rencontre, les conséquences des mouvements de grève qui durent ont été évaluées. Des échanges, il ressort que beaucoup d’activités sont bloquées. Ensemble, nous avons essayé de voir les mesures palliatives à prendre pour qu’on puisse rattraper ce qui peut l’être. L’une des décisions prises est le réaménagement du calendrier universitaire. De façon globale, le point fait par les établissements permet de retenir qu’il va falloir prolonger l’année. Habituellement, nous avons prévu tout finir en fin juillet. Nous tenons au respect de la période des vacances prévue pour le mois d’août. Mais avec la situation actuelle, il peut arriver que pour des besoins de rattrape, des établissements arrivent à travailler une partie du mois d’août. L’autre conséquence est que si on finissait les activités en juillet normalement, on revient en septembre pour les sessions de rattrapage. Mais dans le cas d’espèce, il va falloir prolonger les activités. On a même demandé aux collègues de faire des propositions. L’exercice était difficile. Certains ont fait estimations qui nous conduisaient jusqu’à fin novembre. Mais des discussions, nous avons retenu que chacun fasse des efforts pour qu’à la mi-octobre, tout soit terminé. Ce sont des vœux et cela suppose que le mouvement ne va pas perdurer.
Le réaménagement du calendrier via la programmation des compositions du 1er semestre veut-il signifier que l’équipe rectorale a mare du mouvement de débrayage ?
En situation de crise, il faut savoir choisir les mots. Pour cela, il urge que les parties en présence puissent arriver à un consensus. Si la grève se poursuit, ça perturbe tout ce que nous avons remis en place ; ce qui n’est pas bien non seulement pour l’institution universitaire, mais pour notre pays et son image à l’extérieur.
La première conséquence, est que nous sommes dans un pays où les citoyens sont incapables de se parler. Quand on projette de son pays cette image, on n’en mesure toujours pas les conséquences. C’est grave et cela voudra dire que nous ne sommes pas aussi responsables qu’on pourrait le penser. Quand on vous juge de cette façon, cela vous fait dégringoler dans l’image que vous projetez de votre pays. L’autre situation, nous avons des apprenants, une jeunesse qui est en formation. Perdre un an dans son cursus universitaire sans que cela ne soit lié à vos performances, cela pose un problème. Nous avons des enseignements, des activités de recherche. Nous sommes en relation non seulement avec l’institution universitaire, mais aussi avec des collègues à l’étranger. Donc tout cela est perturbé et c’est mauvais pour l’université.
Les mouvements de débrayage n’auront-ils pas un impact sur le rang qu’occupe actuellement l’université au plan africain et international ?
Il ne faut pas exclure cela. Les classements de l’Uac sont faits par des institutions extérieures qui nous observent. Elles ont des critères sur lesquelles elles se basent. Peut-être que le respect du calendrier fait partie de ces critères. Si on continue sur cette lancée, certainement qu’il y aura des remises en cause.
Si éventuellement il devait avoir année blanche, quelle conséquence cela peut avoir sur la communauté estudiantine ?
Les conséquences les plus dramatiques sont pour les apprenants. Je prends un étudiant que les parents ont envoyé à l’université. Ils doivent mettre à sa disposition des frais pour payer le loyer, s’entretenir, se déplacer etc. Si l’année n’est pas validée, cela veut dire que ces dépenses vont être reconduites. Mieux, les étudiants sont des jeunes pour la plupart. Quand ils vivent ces moments de désœuvrement, beaucoup de drames dont on parle peu peuvent se produire. Je me souviens avoir vu sur des chaînes de télévision, des élèves tombées grosses au niveau des établissements secondaires pendant ces moments de grève. Et là-dessus, beaucoup de nos jeunes doivent apprendre à utiliser leur temps libre imposé.
Pour l’université par exemple, il y a du personnel que nous avons recruté pour les inscriptions. Compte tenu des grèves, il y a une partie de ce personnel que nous avons dû maintenir. Ce sont des frais additionnels non programmés dans le budget. Mais on s’arrange quand même pour tenir parce que pour nous, l’institution doit passer avant tout le reste. Tous les sacrifices qu’il faut faire pour que l’institution se renforce, nous sommes prêts à les faire.
A quoi les étudiants doivent-ils s’attendre si l’année n’était pas validée ?
Cette éventualité n’est pas à l’ordre du jour. Je ne peux pas me situer dans la logique d’une année blanche. Je l’exclus par principe car je reste convaincu que nous serons capables du sursaut salutaire pour sauver ce qui peut l’être. C’est pourquoi j’insiste une fois encore sur la nécessité que les partenaires sociaux et le gouvernement se parlent franchement de façon à mettre au devant de tout, les intérêts du pays. Cela est important.
Si malheureusement il devait avoir année blanche, on avisera. Nous prendrons des dispositions afin que les uns et les autres puissent continuer ce pour quoi, ils sont venus à l’université sans remettre en cause leurs acquis.
L’équipe rectorale a juré respecté le calendrier universitaire. Quels sont vos sentiments face à la situation ?
C’est assez éprouvant. Nous ne sommes pas à l’aise. Dans toute activité humaine, la gestion du temps est une denrée précieuse. C’est à travers le respect de votre agenda que les autres vous respectent et déterminent les activités qu’ils peuvent mener avec vous. N’importe qui échoue à ce niveau, crée des situations désastreuses dont les conséquences rejaillissent sur beaucoup d’autres secteurs.