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La Nation N° 5967 du 14/4/2014

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Inculpé pour assassinat : plus de 6 ans de prison encore pour Chabi Itoni
Publié le mardi 15 avril 2014   |  La Nation




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C’est d’une affaire d’assassinat, crime prévu et puni par les articles 295 à 298 et 302 du Code pénal, que la Cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou a connu samedi 12 avril dernier. L’accusé qui répond au nom de Chabi Itoni, a été condamné au terme de l’audience, à 10 ans de réclusion criminelle. En détention préventive depuis octobre 2010, il passera six ans et demi encore en prison.



Par Claude Urbain PLAGBETO A/R Borgou-Alibori


Nul n’a le droit de se faire justice ; Chabi Itoni l’apprend à ses dépens. Ce cultivateur et orpailleur à Kotopounga, 39 ans, est condamné à 10 ans de réclusion criminelle par la Cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou qui l’a jugé samedi dernier pour crime d’assassinat sur le sieur Bayimba N’tcha.

Courant octobre 2010, il avait tué à coup de fusil ce présumé voleur qui aurait dérobé sa chèvre, avant de se livrer lui-même à la brigade de gendarmerie.La cour qui a connu de cette affaire, est composée du président Huguette Théodora Balley Falana, des assesseurs Aboudou Ramanou Ali et Adame Nouhoum Banzou et des jurés tirés au sort :

Abdouramane Soulé, Dossa Cyrille Dakin, Moussa Anki Dosso et Jean Fara. Le greffier audiencier s’appelle Me Brice Dossou-Yovo. Les intérêts de l’accusé étaient défendus par Me Dieudonné Mamert Assogba.

Les faits

« Dans la soirée du mercredi 20 octobre 2010, un jeune homme du village de Yakpangoutingou, dans l’arrondissement de Kotopounga, commune de Natitingou, a rencontré le nommé Bayimba N’tcha. Il portait une chèvre et allait en direction de Natitingou.

Le jeune homme, du nom de Poy, a reconnu la chèvre comme étant la propriété de Chabi Itoni. Contre le gré de Bayimba N’tcha, la bête lui est retirée et remise au chef du village Yakpangoutingou qui la restitue à son propriétaire contre versement d’une somme de trois mille francs CFA.

Le soir, aux environs de 00 heure, Chabi Itoni se rend au domicile de Bayimba, muni d’un pistolet de fabrication artisanale. Une dispute éclate entre les deux hommes. Le grand-frère de Bayimba entend un coup de feu. Il cherche sa lampe-torche, sort et retrouve son petit frère à terre, baignant dans une flaque de sang. Chabi Itoni prend la fuite et se rend à la brigade plus tard de lui-même ».

Le prévenu a reconnu les faits tout en soutenant qu’il s’agit d’un accident. L’enquête de moralité lui est favorable. Il est reconnu comme un homme calme, respectueux et non provocateur.Le rapport psychiatrique et médico-psychologique montre qu’il serait lucide au moment des faits.


Des débats pour plus de compréhension

A la barre samedi dernier, l’accusé n’a pas nié les faits.
Mais il a soutenu qu’il s’agit d’un accident. Mais pourquoi s’est-il rendu au domicile de la victime avec une arme, lui demandent les juges ?

«J’ai le pistolet depuis 95 quand j’achetais de l’or, parce qu’il y avait des bandits dans notre localité», répond-il. «Depuis, j’ai pris l’habitude de sortir avec l’arme la nuit», poursuit-il. Pourquoi a-t-il sorti l’arme face à la victime ? «C’est dans l’intention de l’influencer», déclare Chabi Itoni avant d’ajouter : «Il voulait arracher l’arme et c’est en ce moment que le coup est parti. Il a commencé à crier. J’ai pris peur et tourmenté, j’ai fui pour rentrer dans la brousse.

Je suis allé me confier à une tante et après, je me suis rendu à la brigade».Trois témoins, le chef du village de Yakpangoutingou : Sanda Kouagou, la tante de l’accusé, dame N’tcha M’po et le grand-frère de la victime, ont défilé à la barre pour dire leur part de vérité, ce qu’ils savent chacun de l’affaire. A noter que le grand-frère de la victime a reconnu que son frère défunt vole souvent. Il ne se constitue pas partie civile.
Réquisition

Le ministère public représenté par Fiacre Azalou fait observer que l’accusé a choisi délibérément de fouler au pied le principe sacro-saint : «Tu ne tueras point» des livres saints. Mais les faits ont-ils la qualification d’assassinat ? L’avocat général s’évertue à démontrer les quatre éléments qui devront conduire à cette conclusion, après avoir indiqué qu’assassinat égales meurtre plus préméditation.

Il s’agit de : la personne humaine atteinte par l’acte d’homicide du sieur Chabi Itoni, l’acte matériel constitué par le coup de feu, l’intention de l’accusé qui a réfléchi, pris son arme et choisi de tirer dans le dos de son vis-à-vis et le lien de causalité entre l’acte matériel et la mort de la victime. Pour le ministère public, Chabi Itoni fait économie de vérité quand il dit que c’est parce que Bayimba N’tcha voulait lui arracher le pistolet que le coup est parti.

Pourquoi a-t-il alors enlevé l’étui qu’il a jeté en brousse avant de se rendre à la brigade, se demande Fiacre Azalou ? Chabi Itoni, est bel et bien, selon lui coupable de meurtre sur la personne de Bayimba N’tcha.

Quid de la préméditation ? La préméditation, c’est le dessein réfléchi formé avant l’exécution de l’action criminelle, définit le ministère public. Dans le cas d’espèce, l’accusé a pris son pistolet sur lui, il l’a chargé et s’est rendu nuitamment au domicile du présumé voleur de sa chèvre pour lui prendre une prétendue somme de 3.000 F CFA.

En fait, dit-il, en se référant aux propos circonstanciés tenus par l’accusé à l’enquête préliminaire, c’est parce qu’il est exaspéré par les nombreux cas de vol de Bayimba N’tcha qui réussissait toujours à fuir du village et à échapper à la justice, que Chabi Itoni a voulu en finir avec lui une fois pour toutes. Or, nul n’a le droit de se faire justice, insiste-t-il.

En principe, l’acte d’assassinat est puni par la peine de mort qui est remplacé depuis peu par la perpétuité. Mais le ministère public fait mention des circonstances en faveur de l’accusé : il est de bonne moralité, travailleur ;

il s’est rendu à la justice sans complainte après son forfait, la moralité de la victime est peu reluisante, le casier judiciaire de l’accusé ne porte mention d’aucune condamnation antérieure même si lui-même a reconnu avoir été condamné à trois mois de sursis pour une affaire d’exploitation d’or.

Fort de ces éléments, il requiert qu’il plaise à la cour de le déclarer coupable d’assassinat, de le condamner à 15 ans de travaux forcés et d’ordonner la destruction du pistolet de fabrication artisanale mis sous scellés.

La défense plaide la clémence de la cour
La défense, Me Dieudonné Mamert Assogba, se dit surpris par la sévérité des réquisitions du procureur de la République. Les faits tels que narrés, sont en déphasage avec ce qu’on comprend du dossier, laisse-t-il entendre.

Contrairement au ministère public, il estime que ce n’est pas par vengeance que son client s’est rendu nuitamment au domicile de la victime mais qu’il allait plutôt chez sa copine quand il s’est souvenu que la maison du voleur de sa bête est sur le chemin.

Par ailleurs, il relève l’inexistence de certaines pièces qu’il juge nécessaires pour une meilleure appréciation des faits : le certificat médical d’expertise du cadavre manquant au dossier malgré l’insistance du procureur de l’ajouter dans l’arrêt de renvoi devant la cour d’assises, l’expertise des empreintes digitales non faite. Pour l’avocat de l’accusé, l’enquête préliminaire a été mal faite et les certitudes ne peuvent être révélées.

En témoigne, dit-il, la substitution de l’arme qui aurait servi au crime : l’accusé n’ayant pas reconnu le pistolet de fabrication artisanale présenté à lui à la barre; le sien serait tout en fer, fait-il savoir.

Comment un autre fusil a-t-il été mis sous scellés, s’interroge son avocat ?Pour finir sa plaidoirie, le conseil demande à la cour de tenir compte de ce que l’accusé est un honnête homme, qu’il est de bonne moralité, qu’il ne s’est mêlé à des affaires louches par le passé, que des éléments d’appréciation manquent au dossier, que son client est en détention préventive depuis plus de neuf ans alors qu’il a quatre enfants à sa charge, pour prendre la sanction qu’elle juge nécessaire pour punir son acte.

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, a déclaré Chabi Itoni coupable d'homicide sur la personne de Bayimba N’tcha avec circonstance aggravante de préméditation, le condamne à 10 ans de réclusion criminelle et aux frais envers l’Etat. La destruction du pistolet mis sous scellés est ordonné.

C’est tout sourire que l’accusé a accueilli cette sentence. Mis sous mandat de dépôt depuis le 25 octobre 2010, il passera encore un peu plus de six ans et demi en prison.La cour connaît depuis hier lundi d’une affaire de coups mortels impliquant les sieurs Thomas Fatoumbi, Mohamed Assoum, Saadath Kada Gado, et Abdoulaye Amoussa.

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