(Quand la violation des textes devient le sport favori au Bénin)
Le dossier Ubipharm et l’ordre des pharmaciens du Bénin refait surface. Les pharmaciens dénoncent le Conseil des ministres qui selon eux, a pris une décision au mépris des dispositions de la loi n°97-028 et de l’ordonnance n°73-38 du 21avril 1973 alors que le gouvernement affiche une position tranchée. Après donc les guerres de déclarations et d’attaques diverses, les professionnels de la Pharmacie menacent de saisir toutes les instances juridictionnelles compétentes. D’où une bataille juridique dans laquelle le gouvernement part perdant, de l’avis des juristes.
Alors que le dégel progressif de la crise sociale est amorcé au Bénin, le gouvernement risque de faire face à une nouvelle tension.
En effet, le 23 mars 2009, dans une lettre de demande conformément à la loi 97-020 du 17 juin 1997, les dirigeants d’Ubipharm-Bénin ont sollicité du ministre de la Santé une licence d’ouverture et d’exploitation d’une société grossiste par l’introduction à l’Ordre national des pharmaciens du Bénin.. Selon l’article 3 alinéa 1 de ladite loi, la licence d’ouverture est donnée par le ministre de la santé en commission technique après avis favorable du conseil de l’Ordre compétent.
Cette disposition est complétée par l’article 7 du décret d’application n° 2000-450 du 11 septembre 2000 qui stipule que « l’ouverture et l’exploitation de toute société de grossistes répartiteur est subordonnée à une autorisation délivrée par le ministre de la Santé après étude par la commission technique ». La commission technique après plusieurs séances et au regard des dispositions de l’article 10 de la loi 97-020 a donné un avis défavorable au dossier de Ubipharm.
Violation des textes
Lors de sa séance en date du 26 mars 2014, le Conseil des ministres a autorisé le ministre de la Santé à donner une licence à Ubipharm. Une décision qui, selon le collectif des ordres nationaux et associations de santé au Bénin est très grave. Mieux, le collectif des ordres nationaux et associations de santé estime que le règlement du dossier en dehors du cadre légal constitue un précédent très grave que personne ne pourra maîtriser à l’avenir. « Nous devons nous évertuer à respecter les textes de lois que nous nous sommes donnés.
Aucune autre procédure ne devrait donc pas être mise en œuvre pour régler les problèmes ou remplir les formalités administratives pour lesquelles il existe déjà des textes et lois les définissant. Le Bénin est un pays de droit et nous avons déjà saisi les institutions compétentes pour barrer la route à la ruse de certains citoyens qui ne veulent pas respecter les lois de la République », explique Docteur Moutiatou Toukourou, présidente de l’Ordre des pharmaciens.
A qui profite la crise ?
De plus en plus, le régime Yayi devient coutumier des faits de violation fragrante des textes de lois en vigueur au Bénin. Pour le Juriste Chance Ligali, il y a un contraste dans le comportement du gouvernement. Selon lui, c’est dans le même relevé du Conseil des ministres où le gouvernement dénonçant la violation des textes régissant l’organisation des concours à la Fonction publique au Bénin a annulé plusieurs concours organisé dans nombre de ministères qu’il se permet de fouler aux pieds l’arsenal juridique qui permet de réglementer le secteur de la Santé.
« Ouvrir le secteur à d’autres acteurs qui en ont les qualités et les compétences est une très bonne chose mais le gouvernement a l’obligation de respecter les règles de l’art », conclut Me Chance Ligali qui regrette que le pouvoir en place ne prête malheureusement pas mains fortes à l’application des textes de lois et des décisions de Justice au Bénin. Dans ce bras de fer qui risque de prendre une nouvelle tournure si rien n’est fait, Dr François Ahlonsou voit plutôt une guerre d’intérêts dans laquelle le gouvernement ne respecte forcement pas les procédures en vigueur.
En somme, on retiendra que le rapport de forces entre le gouvernement et l’ordre des pharmaciens prendra une dimension juridique dans les tous prochains jours. En attendant le verdict, Ubipharm peut encore compter sur la bénédiction du gouvernement.