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Edito : Investisseurs de mon œil !!!
Publié le vendredi 18 avril 2014   |  L`événement Précis




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L’investissement privé étranger est devenu la grande astuce stratégique du régime Yayi. Tout est fait pour attirer chez nous les investisseurs étrangers. Oui, les pesanteurs administratives, odieuses et franchement désespérantes, les font fuir, en dépit des dispositifs institutionnels mis en place. Rien de bien nouveau… Mais ils sont si choyés qu’on se demande bien ce que les nationaux ont fait pour mériter le sort funeste qui leur est fait.

C’est une utopie largement partagée que le capital étranger est le seul qui doive être encouragé. Ainsi donc, l’Etat se met en devoir d’offrir nombre de faveurs parfois ahurissantes aux investisseurs étrangers, y compris même en écrasant le capital national>

Un journal de la place s’est mis en devoir depuis le début de la semaine de dénoncer en des termes crus les nombreuses faveurs accordées en 2008 à la Nouvelle Cimenterie du Bénin (NOCIBE) par l’Etat béninois, au détour des ordonnances à polémique prises par le Chef de l’Etat cette année-là. Commentant hier les dispositions de cette ordonnance concernant le régime E du code des investissements au Bénin, mes confrères ont pu dire ceci : « C’est comme une feuille blanche que le gouvernement béninois mettrait entre les mains d’un homme d’affaires à qui il est loisible d’y inscrire tous les avantages qui lui passent par la tête pour sécuriser ses investissements. » Cet investisseur libano-sénégalais a pu s’installer au Bénin depuis lors et l’on ne peut regretter tout le capital ainsi que la technologie que son groupe a déployés dans notre pays. Là n’est pas le problème. Le problème véritable, c’est qu’au moment où l’on offre des avantages fous aux entreprises étrangères, tout le monde voit les efforts surhumains que déploie le même Etat pour asservir le capital national et le déstabiliser.

Je suis souvent sidéré par la capacité des autorités béninoises à défendre becs et ongles les investisseurs étrangers, cependant qu’ils martyrisent et méprisent leurs propres compatriotes. La rhétorique officielle consiste à faire croire que le capital étranger est le seul ou même la clé de voûte de notre développement, de la création d’emplois et de richesse. Cette théorie consistant à offrir le Bénin comme sur un plateau d’argent aux investisseurs français, chinois, indiens, turcs, et autres arabes, est basée sur la lubie d’un développement excentré, pensé comme venant d’ailleurs. Dans la pratique, il n’y a rien de plus faux.

S’il nous faut l’expérience, la fraîcheur, la technologie ou encore l’apport financier des étrangers comme d’ailleurs dans tous les pays du monde, il est faux et nuisible de prétendre que notre salut ne pourrait provenir que de l’étranger. L’appui intelligent qu’un Etat responsable devrait apporter à ses industriels, à ses magnats financiers comme à ses commerçants et à ses artisans devrait surpasser celui qu’il apporte aux hommes d’affaires étrangers. L’étranger est essentiellement de passage, même s’il peut contribuer autant (sinon plus parfois) que l’autochtone, aux recettes fiscales et à la création d’emplois. Comment ne pas mettre aussi l’accent sur le label national que portent ces investisseurs de chez nous qui portent sur leur dos la responsabilité de la fierté nationale sur d’autres terres.

Tout se passe comme si les investisseurs nationaux ne représentaient qu’une engeance de bandits et de coupeurs de routes que l’Etat central et l’administration se mettent en devoir d’écraser. Et pour se protéger, ceux-ci entrent dans l’arène politique où leur soif légitime de gain prime la défense de l’intérêt national qu’incarne normalement un responsable politique.

Je me demande toujours ce que pensent nos dirigeants lorsqu’ils reçoivent chez nous les plus hautes autorités françaises, allemandes, espagnoles ou japonaises toujours accompagnées de leurs industriels, de leurs producteurs, de leurs financiers pour explorer les opportunités à saisir chez nous. Et je ne comprends pas, je ne comprendrai jamais pourquoi le Chef de l’Etat béninois n’imite pas (même pas un peu) ses pairs européens, asiatiques ou américains dans ce registre qui ouvre à ses compatriotes fortunés d’autres horizons d’enrichissement pour vendre aux autres le gari ou le tapioca du Bénin, l’alcool du Bénin, les très bons cahiers du Bénin, l’expertise du Bénin en matière de BTP, de mode, d’énergie solaire ou encore notre patrimoine touristique immense… Pourquoi ? Pourquoi tous ces gens aussi ferment-ils les yeux et ne crient-ils pas au scandale face à ce qui ailleurs aurait été vu et jugé comme une preuve patente d’apatridie et de parjure ?

Par Olivier ALLOCHEME

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