La Csa-Bénin, la Cgtb, la Cosi-Bénin et la Cspib ont suspendu la grève à leur niveau le mardi 15 avril 2014. La Cstb et la Fésyntra-finances s’y accrochent encore rendant difficile, la réouverture effective des salles de cours dans le secteur public. Du coup, la plupart des écoles n’ont pas ouvert leurs portes du retour des congés de pâque hier jeudi 24 avril 2014.
Lokossa : des écoles toujours fermées
La reprise des cours dans les établissements publics programmée pour ce jeudi 24 avril 2014 a connu un grand échec. A l’instar de plusieurs lycées et collèges d’enseignement général du Bénin, les établissements scolaires de Lokossa n’ont pas ouvert leurs portes.
La grève bat encore son plein dans le Mono. Au Ceg1 de Comè par exemple, certains professeurs ont répondu présents et ont normalement déroulé les cours. Par contre, d’autres qui ont suivi le mot d’ordre des syndicats encore en mouvement de grève sont restés chez eux. D’après les explications du chef de cet établissement, les vacataires viennent normalement au cours, sauf ceux qui appartiennent aux syndicats ayant maintenu leur mot d’ordre de grève. Cette situation ne laisse pas indifférents les enfants qui dénoncent leurs enseignants.
Phygelle Dah Sonon
(stagiaire)
Sit-in des enseignants sur l’esplanade de l’Assemblée Nationale
Alors qu’ils étaient attendus dans les classes à cette reprise après douze jours de congés, les enseignants ont préféré assiéger la devanture du parlement pour dénoncer ce qu’ils appellent le mutisme des députés face à la crise sociale.
Après avoir sillonné les artères de la ville de Porto-Novo scandant des slogans hostiles au gouvernement, la marche des travailleurs des départements de l’Ouémé et du Plateau, regroupés au sein du Comité des luttes des travailleurs de l’Ouémé et du Plateau, a échoué sur l’esplanade de l’Assemblée nationale. Cette marche a connu la participation du secrétaire général de la CSTB, Paul Essè Iko. Après plusieurs heures sous le soleil, les manifestants ont été finalement reçus par le Directeur de cabinet du président de l’Assemblée Nationale, Comlan Dadégnon assisté du secrétaire général administratif de l’institution parlementaire et certains responsables hiérarchiques de la police. Le secrétaire général de la Cstb, Paul Essé Iko, en tête du mouvement, n’a pas manqué de décocher des flèches à l’encontre du gouvernement et même du premier responsable de l’Assemblée Nationale. Il a fait remarquer qu’il ignore les raisons pour lesquelles le président Mathurin Nago les évite et chaque fois qu’ils viennent au parlement, il envoie toujours son directeur de cabinet. Par ailleurs, Paul Essè Iko dénonce le mutisme du parlement dans la crise sociale qui secoue le pays depuis janvier 2014 et proteste contre le laxisme du président de l’Assemblée Nationale et celui de tous les élus qui favorisent l’introduction des projets de loi sur la révision de la constitution et le droit de grève en République du Bénin ; il dénonce à cet effet, le jusqu’auboutisme du président de la République malgré les multiples rejets desdits projets par le peuple et les travailleurs.
Charles Honvoh
Porto-Novo : « journée écoles mortes »
Dans la plupart des écoles de Porto-Novo et environs, les apprenants n’ont pas bénéficié du savoir comme attendu.
Du Lycée Béhanzin aux collèges d’enseignement généraux de Davié, Gbokou, Koutongbé, Ananvié, Adjarra et Ifangni, ce n’est pas la grande affluence des jours de travail. Les apprenants qui massivement ont effectués le déplacement de leurs écoles respectives dans le but de la reprise des activités pédagogiques ont été déçus. Les enseignants dans la grande majorité ont simplement boycotté cette reprise des cours foulant aux pieds la décision de suspension prise par les quatre secrétaires généraux de la CGTB, de la CSA, de la COSI et de la CSPIB. Les enseignants se sont donc conformés au maintien du mot d’ordre de grève annoncé par la CSTB de Paul Essè Iko et la Fésyntra-finances de Laurent Mètongnon. Dans certaines écoles où l’on note la présence de quelques enseignants, pas de cours dispensé, si ce ne sont des petits groupes de discussions et d’autres enseignants qui, carrément observent une grève sur le tas dans leurs classes. Quelques parents d’élèves venus faire le même constat étaient partagés entre le doute et la désolation car n’ayant pas remarqué l’effectivité de cette reprise des cours.
Charles Honvoh
Sèmè-Podji : absence remarquable des élèves et enseignants
Si par endroit quelques enseignants étaient au poste en l’absence des apprenants, c’est la situation inverse qui s’est produite ailleurs dans la commune de Sèmè. Très tôt dans la matinée de ce jeudi, certains apprenants inscrits dans les établissements scolaires installés dans la commune de Sèmè-Podji ont pris le chemin de l’école. Mais, c’était sans compter avec la détermination de leurs enseignants à poursuivre le mouvement de grève. Au Collège d’Enseignement Général (Ceg) de Djèrègbé, peu après huit heures, la cour de l’école grondait de monde. En petit groupe de quatre ou cinq, les uns allaient d’un bout à l’autre et d’autres s’adonnaient aux jeux divers. Dans deux ou trois salles de classe, on pouvait remarquer la présence de quelques enseignants vacataires qui s’adonnaient aux activités pédagogiques. Un peu plus loin du côté de l’arrondissement d’Aholouyèmè situé dans la même commune, le constat est beaucoup plus alarmant. A l’école primaire Publique de Kétonou, les écoliers étaient bien nombreux à répondre présents lors de cette première après les douze jours de congé de Pâques. Mais au grand désarroi de ces écoliers et de leurs parents qui pensaient que les grèves étaient du passé, aucun enseignant n’était présent. De même pour le Collège de la localité ou en dépit de la présence des autorités administratives et de quelques enseignants vacataires, ce sont en l’occurrence les élèves qui étaient carrément absents. Un tour du côté des Ceg Sèmè-Podji, Agblangandan, Ekpè1 et Sèkandji et on peut se rendre compte que le boycott de la reprise est général.
Rodrigue Tokpodounsi
Silence coupable du gouvernement
Aussitôt la motion des centrales et confédérations syndicales suspendue, Martial Sounton, ministre du Travail, de la fonction publique et de la reforme administrative et institutionnelle, également chargé du dialogue social a effectué une sortie médiatique. Au cours de son intervention, le représentant du gouvernement a salué le patriotisme dont a fait montre les secrétaires généraux qui ont suspendu leur motion. Selon lui, ces généraux ont priorisé l’intérêt supérieur de la nation en suspendant la motion. A l’en croire, cette suspension fait non seulement honneur au peuple mais aussi, elle est de nature à éviter le spectre de l’année blanche qui planait sur l’école béninoise. Par ailleurs, le ministre Sounton a invité les confédérations syndicales (la Cstb de Paul Essè Iko et la Fésyntra-finances de Laurent Mètongnon) qui sont encore en grève à emboiter le pas à leurs camarades. Maintenant que l’appel du ministre Souton n’est pas écouté, que fait le gouvernement ?
Phygelle Dah Sonon (stagiaire)
Le difficile réaménagement du calendrier scolaire
Le lundi 14 avril 2014, les autorités en charge du système éducatif béninois se sont retrouvées au ministère en charge de l’Enseignement supérieur pour se pencher sur la question du réaménagement du calendrier scolaire 2013-2014. Une situation qui s’annonce difficile vu les exigences d’une part et l’obligation d’accorder un délai raisonnable pour rattraper les trois mois de cours perdus, d’autre part.
Après l’annonce de la suspension de la grève par quatre des six centrales syndicales depuis le mardi 15 avril dernier, le réaménagement du calendrier scolaire est devenu une imminente préoccupation. Déjà, le lundi 14 avril dernier, les membres des directions des examens, les représentants des ministères en charge de l’éducation, les représentants des écoles privées et le directeur de l’Office du Bac étaient en concertation. A l’issue de leurs échanges, la date initiale pour le déroulement du Bac a été repoussée, ils étaient tombés d’accord sur le principe du report. Du côté des promoteurs d’écoles privées, le véritable souci se résume à comment prendre en charge le salaire des enseignants pendant le délai de prorogation vue qu’eux autres étaient en situation de classes à plein temps. Concernant l’examen du Certificat d’Etude Primaire qui relève du ministère des enseignements maternel et primaire, la difficulté semble levée dans la mesure où, le ministre Eric N’ Dah y a préalablement travaillé avec les siens. Ainsi, au primaire, la date des vacances était fixée pour le 16 juillet. Au niveau du secondaire qui organise le gros lot des examens de fin d’année, rien n’est encore précis.
Rodrigue Tokpodounsi
Suspension de la gève : Jacques Ayadji voit une main invisible du gouvernement
Le secrétaire général adjoint du Syndicat national des travailleurs du secteur des travaux publics et des transports, Jacques Ayadji fait sa lecture de la suspension de la grève par certaines centrales syndicales et la reprise manquée des cours annoncée pour ce jeudi 24 avril 2014. Selon lui, cette volonté des responsables confédéraux en balayant du revers de la main la position de la base, n’est rien d’autre que celle du gouvernement.
Quelle lecture faites-vous de la situation ?
C’est un mauvais signe pour les secrétaires généraux de confédérations syndicales que sont la Csa-Bénin, la CGTB, la Cosi-Bénin, et la Cspib qui ont décidé de vendre les enseignants de ce pays sur l’hôtel de je ne sais quel intérêt. Donc ayant dénoncé ces secrétaires généraux et ayant apporté tous mon soutien dans la résolution de la crise à la Cstb, la seule centrale syndicale qui défend réellement les travailleurs, je ne peux que me réjouir de la désobéissance des enseignants parce que le constat aujourd’hui est que le mot d’ordre de reprise des cours n’a pas été suivi par les enseignants qui ont refusé pour ne pas se laisser vendre par des personnes que nous ne comprenons pas. S’il y a une seule classe restée fermée, nous secrétaires généraux considérons que le mot d’ordre n’a pas été suivi.
Ces résistances sont pourtant légions…
Lorsque les leaders confédéraux reconduisaient leur mot d’ordre, il y avait de la résistance dans la mesure où certains enseignants faisaient cours. C’est le même constat et je me réjouis du fait que ce mot d’ordre des quatre centrales n’ait pas été respecté.
On apprend qu’il y a des menaces, de qui viennent-elles ?
Cette volonté des responsables confédéraux en balayant du revers de la main la position de la base, n’est rien d’autre que celle du gouvernement dans la mesure que ceux qui n’ont pas suivi leur mot d’ordre sont menacés selon quoi, la loi leur sera appliquée. Non ces secrétaires généraux se sont mis à la place du gouvernement pour réprimer les travailleurs qui vont poursuivre la grève. C’est très grave. Ils ont fait leur choix dans la défense de leurs intérêts. Ce qui me réjouit c’est la désobéissance de ces enseignants.
Propos recueillis Marc Gbaguidi
Ils ont dit…
Marina Hounsou, étudiante
Etant donné que la décision des mouvements de grève étaient prise ensemble au départ, les centrales et confédérations syndicales devraient toutefois s’entendre pour décider. Si quatre des six centrales syndicales ont suspendu les mouvements de grève, cela voudra dire que ces mouvements n’ont plus de poids.
Amina Awali, étudiante
Les quatre centrales syndicales n’ont pas mal fait de suspendre les mouvements de grève. Même s’ils ont sauvé l’année scolaire, je crois qu’il y a à dire parce qu’ils viennent de trahir leurs camarade. Ce qui donnera peut-être naissance à une division au sein des centrales et confédérations syndicales.
Elisée Chadaré, Enseignant
La levée de la motion de grève par les quatre centrales syndicales est une trahison et je me demande quelle est la valeur qu’on peut accorder aux luttes syndicales au Bénin. Moi je pense que l’argent a une fois encore fait parler de lui dans cette affaire mais la lutte continue jusqu’à satisfaction totale des revendications.
Pauline Yonlonfoun, Elève
Si les syndicalistes savaient qu’ils ne voulaient pas aller jusqu’au bout de la grève, je pense qu’ils ne devraient pas signer une motion de grève. Certes cette décision nous avantage nous les apprenants mais si les enseignants ne sont pas motivés ils n’auront pas le cœur à l’œuvre. Voilà qu’il y a un autre groupe qui est toujours en grève.
Aminata Adjalla, parente d’élève
Je pense que les vrais ennemis de ce pays, ce sont ces quatre secrétaires généraux. J’ai aussi mes enfants dans les cours publics et ils sont restés tout le temps à la maison du fait de ces grèves. Depuis que nous sommes en train de crier, pourquoi c’est maintenant qu’ils trouvent le plaisir de suspendre la grève ? Ils ont suspendu pour revenir encore sur les mêmes revendications l’année prochaine pour faire perdre le temps à nos enfants ? Je crois que ces personnes ne veulent pas de l’évolution de notre Ecole. Le mouvement de grève est donc devenu une vache à lait où il faut aller traire chaque fois quand on sent le besoin.
Toussaint Wanèédou, SG départemental du Syntras-Rce affilié à la Cgtb
Par respect à la hiérarchie syndicale, j'ai obéi depuis le jour de la suspension en envoyant un Sms à tous mes militants de l'Ouéme /Plateau de reprendre les classes à cause de la discipline syndicale et après on pourra laver notre linge sale en famille. Je loue la décision des quatre afin de pouvoir sauver l'année scolaire 2013 -2014 pour le bonheur de nous les parents d'élèves.
Metonou Cosme, Elève
Moi j’apprécie simplement le pas des syndicats et je les remercie d’avoir sauvé l’année. Ils ont vraiment fait preuve de patriotisme. De toute façon, on ne peut pas dire qu’ils n’ont pas eu gain de cause puisque sur les 7 revendications, ils ont obtenu 5 donc, ce n’est pas mal. A présent, j’invite le gouvernement à se pencher sur le problème des vacataires et à leur sédentarisation. Aussi, il faut que les autres secrétaires généraux qui ne veulent pas lever leur motion suivent le pas des autres camarades pour qu’ensemble on organise les examens.
Kpanou M. Frédéric, Parent d’élève
En ma qualité de parent, c'est une joie dans mon cœur. Ça permettra à nos enfants de ne pas perdre l'année scolaire. A mon avis les deux autres syndicats sont dans leurs rôles. Mais qu'ils sachent que le Bénin a besoin d'évoluer. Qu'ils mettent un peu de sagesse dans la revendication et penser à la population. Ils sont les seuls pouvant la satisfaire. Vraiment, j'invite le gouvernement et son chef à prendre conscience des désagréments que ces débrayages causent à nos populations afin que nous évitions ces gens de choses pour notre pays.